Partager la publication "États-Unis : l’avocate qui a dit “Non !” au gaz de schiste"
Vu d’Europe, New York est immanquablement associée à la forêt de gratte-ciels de Manhattan. Big Apple, en réalité, s’étend sur un État rural, parsemé de petites bourgades, de fermes laitières, de vignes et de « bed and breakfast ». Au nord de cet État paisible, se trouvent les « schistes de Marcellus » : une formation géologique qui renfermerait rien de moins que la plus grande réserve de gaz de schiste au monde, à en croire certains industriels. Et comme la nature est bien faite, le tout est enfoui juste en dessous des Finger Lakes : un ensemble de lacs qui constitue la plus grande réserve d’eau potable de l’État de New-York.
C’est en 2009 que Helen Slottje, avocate de son métier et habitante de la région, lit dans un journal local l’annonce un rassemblement de citoyens inquiets de la perspective d’un forage. Elle se rend à la réunion et en sort horrifiée. Helen ne peut se résoudre à voir les paysages qu’elle chérit défigurés par les multiples concessions accordées aux industriels pour tenter d’extraire du gaz de schiste. Sans parler des risques qu’implique l’emploi de la fracturation hydraulique, qui mobilise force produits chimiques et radioactifs, à proximité des lacs. Elle décide d’utiliser ses compétences juridiques pour entrer en lutte.
170 villes bannissent la fracturation
Helen s’engage d’abord dans un procès contre le vaste complexe industriel d’une société de fracturation dans une région voisine. Elle perd la bataille mais ne baisse pas les bras. Si un procès national échoue, peut-être que la législation locale, comme celle sur les nuisances sonores et visuelles, permettra de faire barrage aux forages. Avec son mari, elle sillonne l’Etat de New York et organise des meetings pour informer les habitants de leur droit à dire non, et des armes légales dont ils disposent.
« La fracturation n’est que le symptôme d’un problème plus large dans nos société : une oligarchie prend des décisions sans consulter ceux qui en sont affectés », explique l’avocate. Très vite, un groupe de citoyens se forme et l’aide à faire signer des pétitions, tout en harcelant les mairies au téléphone pour manifester leur opposition à la fracturation hydraulique.
Victoire en 2011. La municipalité de Dryden, 15 000 habitants, est la première à faire passer une loi bannissant la fracturation hydraulique sur son territoire, malgré un appel au tribunal de première instance lancé par les industriels, qui avaient investi des millions dans les concessions. Preuve est faite que la lutte à l’échelon local fonctionne. Depuis, près de 170 villes de l’État de New-York ont suivi le mouvement enclenché par Helen et interdit les forages. Des ponts ont également été établis avec des collectifs de citoyens opposés au gaz de schiste au Texas, au Colorado ou en Californie.
En Avril, Helen a été récompensée du Prix Goldman de l’environnement pour son engagement. Elle a reçu 175 000 dollars pour l’aider à continuer son combat.
Naviguez sur la carte pour découvrir les cinq autres lauréats du Prix !
Côme Bastin Journaliste We Demain Twitter : @Come_Bastin