Partager la publication "Ungersheim, le village alsacien qui prépare l’après pétrole"
Penser écologie, réaliser économie
Peuplé de 2 087 habitants, ce village près de Mulhouse, ressemble à tous ceux du péri-urbain alsacien. Des maisons avec jardins, une salle de sport, une place centrale où trône l’église. Il faut y vivre pour se rendre compte qu’Ungersheim n’est pas un village comme les autres. Depuis 2011, la commune suit le mouvement des villes en transition. Elle a défini 21 projets pour penser « l’après-pétrole ». Ils s’appuient sur trois piliers de réflexion avec pour maître mot l’ « autonomie » : alimentaire et énergétique et intellectuelle.
Un méthaniseur devrait à l’avenir compléter l’installation énergétique alors que la piscine municipale chauffe déjà ses bassins au solaire thermique. Affichée mais pas véritablement recherchée, l’autonomie énergétique est un prétexte pour faire du village une « vitrine des énergies renouvelables » selon le maire. À une vingtaine de kilomètres de la plus vieille centrale nucléaire de France, Fessenheim, il ne prétend pas « révolutionner le monde mais ouvrir des voies ».
Ouvrir la voie, Richelieu le fait concrètement tous les jours. Le cheval de la commune est un employé municipal comme les autres : il aide à arroser les fleurs, labourer le jardin communal et sert de transport scolaire. « C’est un moyen de sensibilisation essentiel », explique Jean-Claude Mensch. Pas de progrès sans pédagogie. Les enfants scolarisés à Ungersheim mangent bio à la cantine. La filière appelée « de la graine à l’assiette » crée un circuit local d’approvisionnement alimentaire. Le jardin communal alimente aussi des paniers de légumes bio accessibles à toute la population.
À la mairie, un large plan trace l’architecture de la future Maison des natures et des cultures. En forme d’hémicycle, « le bâtiment sera équipé d’une conserverie et d’une malterie », décrit le maire « et aussi un lieu d’activités pédagogiques ».
Un tel projet ne monte pas facilement : « Les caractéristiques du projet ne rentrent pas dans les cases des dossiers de subvention », déplore Jean-Claude Mensch. En lieu de mixité sociale et générationnelle, ce projet est emblématique d’une des priorités du village en transition : « créer du lien », insiste le maire. « Le village comptait sept restaurants pour 1 200 âmes, se souvient-t-il. Avec plus de 2 000 habitants aujourd’hui, il n’en compte plus que trois. » « Face à la proche zone commerciale, les petits commerçants ne peuvent pas résister », témoigne Jacques, gérant d’un bar-restaurant. La quincaillerie sur la place centrale du village a aussi disparu.
Démocratie participative
En relocalisant l’économie, le maire souhaite renforcer les liens sociaux au sein de sa commune,« où l’esprit de solidarité manque », d’après Carole, la coiffeuse. Le projet d’éco-hameau, qui devrait aboutir d’ici deux ans, incarne ce souhait. Il regroupe des personnes volontaires pour financer et concevoir ensemble une habitation écologique. « Les idées doivent émaner de la population », souligne le maire. Il a pour cela introduit un conseil participatif. Une quarantaine d’Ungersheimois auquel le conseil municipal soumet ses propositions. « C’est peu, sur 2000 habitants, mais ça a le mérite d’exister », souligne le maire. « Il faut être volontaire, rien n’est obligatoire », fait remarquer Julien Rousseau, au conseil municipal depuis 6 ans. A 33 ans, le conseiller reconnaît que les moins de 20 ans manquent au conseil. Pas besoin non plus d’appartenir à un parti politique. Ni l’opposition ni le maire ne portent d’étiquette. « L’écologie politique n’est pas assez pragmatique », regrette-t-il avant d’afficher sa priorité : « améliorer la vie de la population dans un environnement sain. »
Marion Paquet
Journaliste