Partager la publication "Philoxime, le youtubeur philosophe qui débat du climat"
Trier ses déchets, manger moins de viande… Les éco-gestes sont-ils utiles ? Ou ne sont-ils qu’une diversion néo-libérale visant à dédouaner l’État de ses responsabilités ? Voilà un débat qui déchire de plus en plus les internautes. Débat dont s’est saisi Philoxime, youtubeur qui apporte un éclairage philosophique bienvenu aux questions écologiques.
Avec humour, mais sans se défaire de sa rigueur scientifique, ce prof de philo belge vulgarise différentes théories et valeurs sous-jacentes aux débats d’actualité.
“J’avais envie de montrer que la philo n’est pas poussiéreuse. Il s’agit d’un outil hyper puissant pour éclairer le monde d’aujourd’hui !”, explique-t-il à WE DEMAIN.
Sur les éco-gestes, les tenants d’une morale kantienne “estimeront qu’il existe des règles morales absolues à respecter quelles que soient leurs conséquences”, souligne notamment le youtubeur. Par ailleurs nos gestes ont un un fort pouvoir d’influence sur les autres, rappelle-t-il, travaux de chercheurs à l’appui. Ils aident aussi à légitimer les politiques publiques (si l’on prend moins l’avion, il est plus facile de supprimer des lignes intérieures par exemple). Bref, “responsabilité individuelle et collective ne s’opposent pas frontalement”, souligne Philoxime.
“La philo aide à clarifier les enjeux, à apaiser des débats très polarisés”, poursuit-il.
Si sa chaîne aborde diverses questions d’éthiques, l’environnement y est de plus en plus central. Philoxime s’est ainsi penché sur la légitimité de la Convention citoyenne pour le climat ou sur la moralité des SUV. Il prépare aussi un chapitre sur l’antispécisme ou sur la taxation du carbone.
Prof et youtubeur
Une reconversion progressive pour ce diplômé de droit et de philo du droit. À 35 ans, Maxime Lambrecht de son vrai nom a notamment enseigné à la Chaire Hoover d’éthique sociale et économique de l’université de Louvain.
Il commence à réaliser des vidéos en 2018 afin de rendre ses cours plus vivants. Dans un esprit de classe inversée, il demande à ses élèves de regarder ses cours à la maison pour en débattre ensemble. L’accueil est enthousiaste. L’enseignant commence donc à partager ses vidéos sur YouTube. “Cela me permet d’avoir un impact bien plus large.”
D’autant que ses convictions écologiques s’affirment. “Comme beaucoup, je suis passé par différents stades face à l’urgence environnementale, le déni, la colère, le désespoir… Puis j’ai compris que la réponse à la crise climatique serait insuffisante mais que ce n’était pas une raison de s’empêcher d’essayer de sauver ce qui peut l’être.”
“Sphère bouillonnante de la vulgarisation”
Une initiative qui rencontre un certain succès. Philoxime n’est pas encore un influenceur aux millions d’abonnés mais sa chaîne est passée de 2 000 à près de 12 000 abonnés en un an. Honorable. “Il y a sur YouTube une sphère assez bouillante de la vulgarisation et un public plus axé ‘Climat’ qui se remet à la philo via ce biais”, se réjouit-il.
Un succès qui devrait permettre au prof de se consacrer plus amplement à la vulgarisation, et espère-t-il, d’en vivre prochainement. L’université de Louvain vient en effet de lui demander de créer des vidéos pour d’autres professeurs d’éthique. Il devrait aussi concevoir des capsules plus courtes pour Instagram. Et lancera à la rentrée un crowfunding pour rester indépendant. Question d’éthique.