TRIBUNE. Pour peu que l’on s’intéresse aux enjeux de notre époque, les choix qui nous incombent au quotidien relèvent du cornélien. À chaque décision, on hésite à sortir sa balance opposant plaisir personnel et conscience écologique. Notre vie se résume à parcourir une infime portion de la ligne étroite et périlleuse qui porte notre civilisation vers un avenir possible, et nous sentons qu’elle s’affine. L’équilibre auquel parvenir entre nos comportements (collectifs et individuels) et les conditions de la survie de notre espèce semble toujours plus inaccessible. Dans tous les domaines, et nous ne prétendrons pas ici vouloir résoudre tout.
Tout le monde ou presque est volontaire pour trier ses déchets, acheter bio et d’occasion, manger moins de viande, faire pipi sous la douche, prendre son vélo, voter pour le bon, marcher pour le climat, même si chacun le fait avec plus ou moins de conviction. À constater la gabegie énergétique ou les pollutions que s’autorisent quelques-uns ou certaines entreprises, on peine à se convaincre de son impact réel et accepter les sacrifices que demande l’hygiène écologique.
Voyage : une voile plutôt que des ailes ?
Une des choses les plus tristes dans cette histoire, c’est que le sacrifice qui serait le plus utile semble être le plus dur à accepter. Voyager étant sacré, l’avion vole comme un roi. C’est de (très) loin la plus grosse part de l’empreinte de ceux qui le prennent plusieurs fois par an. Celle qui annule tous les efforts concédés à-côté. Et si nous sommes évidemment les premiers à dire que découvrir le monde est la plus incroyable de nos libertés, nous savons aussi qu’il faut se raisonner, et jouer de la balance pour qu’elle ne penche pas follement du mauvais côté.
Partir moins loin, moins souvent, plus longtemps !
C’est pour aider à cette transition que nous avons décidé de relancer le transport de passagers… à la voile.
Ça a toujours existé et, contrairement aux ferries ou aux avions, nous sommes assurés que tant qu’il y aura des hommes, ils pourront se déplacer sur mer grâce au vent. Alors pourquoi pas ? Voyez le nombre de voiliers qui restent au port toute l’année. Qu’on ne sort que pour dérouiller ou faire un pique-nique dans une crique. On pourrait leur offrir une meilleure vie, non ? Et les propriétaires, ils ne seraient pas contents que cela leur rapporte de l’argent, plutôt que de ne leur en coûter ? Et puis après, pour voir grand et penser confort, on pourrait développer de nouveaux voiliers, plus rapides, capables d’embarquer plusieurs centaines de passagers.
Sailcoop : une autre idée du voyage
Alors pour commencer, on a imaginé un plan de navigation idéal. Méditerranée l’été, avec des aller-retour vers la Corse, puis transatlantique vers les Antilles en octobre, où le voilier fera quelques mois durant des navettes entre Guadeloupe et Martinique (ou d’où il poussera jusqu’à Rio ou New-York), avant de rentrer pour mars en France, se refaire une beauté pour la saison suivante. On a mis ça dans un tableau, avec en face différents bateaux. Et puis on a joué avec les chiffres.
Réalisé que les prix de location des voiliers habituellement loués rendaient l’activité déficitaire, trop chers. Bientôt viendra le temps des propriétaires qui loueront bon marché pour participer à un tel projet de société, pour l’instant ça reste une question d’argent. Car ça coûte cher, l’entretien d’un bateau. Mais moins si on l’utilise, et puis on pourrait aussi se répartir les charges, en devenant co-propriétaires ! Vous avez un bateau, vous êtes chaud ?
Pour ne pas rater la saison et regarder impuissants les avions prendre l’air, on a fait le grand plongeon, et on a acheté notre premier voilier. 50 pieds. 10 couchettes en plus du skipper. 135.000€. Prêt au voyage. Entre famille et amis, on joue aux co-propriétaires idéaux : on va le louer à la coopérative. Sailcoop, elle s’appelle, d’ailleurs.
Le financement participatif pour s’engager dans le projet
Si l’enthousiasme qu’a suscité l’annonce du lancement de notre initiative de voyage alternatif, et si les pré-réservations se transforment en billets, alors le modèle économique est là. Mais qui n’a pas d’argent, comme disait l’autre, est comme un oiseau sans ailes, et comme un navire sans voiles. Or bien que le projet soit enthousiasmant, aucun milliardaire bienfaiteur n’est encore venu frapper à notre porte pour nous proposer de tout financer (vous en connaissez un motivé ?). Et puis quoi de plus logique pour un projet tel que le nôtre que de proposer aux citoyens d’y être associés, via une plateforme engagée comme LITA.co ?
Nous avons donc lancé une campagne en phase de pré-collecte, sur laquelle chacun peut déposer une intention d’investissement, non engageante et modifiable, avant le lancement effectif de la collecte début avril. Cette intention vous permet de réserver votre investissement et d’être tenu au courant de l’avancement de cette belle aventure !
Une belle aventure qui n’attend que de se concrétiser
En fonction du montant que nous parviendrons à mobiliser, nous achèterons 1, 2 ou 3 monocoques, ou bien un catamaran de 60 places, ou mieux, tout ça à la fois ! Nous prévoyons une équipe de quatre salariés dès l’année prochaine, et nous créerons bien évidemment aussi des emplois stables de skipper pour assurer les traversées et l’ambiance à bord 🙂
Un voilier Sailcoop permettra d’économiser, chaque année, l’émission d’au minimum 128 tonnes de CO2 !
Ça commence maintenant, et c’est pensé pour durer longtemps. Faites tourner, et rendez-vous sur cette page pour embarquer dans l’aventure .
Ah oui, d’ailleurs, notre premier bateau prêt au voyage, il s’appelle ‘Belle Aventure’ !
Tribune de Maxime de Rostolan.