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Bike for Bees : elle a traversé l’Europe à vélo pour sensibiliser au sort des abeilles

La jeune Autrichienne Nadine Schuller pédale pour sauver les abeilles. Avec son vélo, elle a sillonné l’Europe pour sensibiliser au sort des insectes pollinisateurs. Rencontre.

Nadine Schuller
Nadine Schuller a réalisé un périple de 40 jours à travers l'Europe pour sensibiliser les populations au sort des insectes pollinisateurs. Photo : DR.
Nadine Schuller a réalisé un périple de 40 jours à travers l'Europe pour sensibiliser les populations au sort des insectes pollinisateurs. Photo : DR.

C’est à Vienne que l’on a rencontré Nadine Schuller, 27 ans. Passionnée de biodiversité, cette Autrichienne est partie seule durant six semaines à vélo en Europe, à la rencontre de personnes qui œuvrent pour la préservation des insectes pollinisateurs. Sa confiance en elle et sa gentillesse en font une jeune femme particulièrement inspirante. Aujourd’hui, elle continue de mener de nombreux projets environnementaux, notamment à l’échelle européenne. Avec toujours une priorité : les insectes, plus que jamais l’avenir de l’humanité.

Changearth Project est une série de portraits de jeunes engagés pour la transition écologique, partout en Europe. Co-créé par deux étudiantes, Astrid et Carla, ce projet vise à mettre en lumière ces jeunes qui se mobilisent en faveur du climat et de la biodiversité, et à inspirer les autres à faire de même. Tout au long de l’été, WE DEMAIN va publier une fois par semaine l’un de ces portraits engagés.

Un lien tout particulier avec la nature

Nadine a vécu à la campagne avant de s’installer dans la capitale autrichienne pour étudier les sciences politiques. Son engagement pour l’environnement a démarré très jeune, puisqu’elle a grandi dans la nature, près d’une grande forêt. “Cela peut paraître un peu naïf, mais à l’âge de 8 ans, je prenais déjà très à coeur le fait de protéger les arbres.” Au même âge, Nadine a commencé à nettoyer les forêts en ramassant les déchets. Très vite, elle a été marquée par le fait d’être la seule à le faire, alors que les adultes avaient plutôt tendance à jeter leurs ordures dans la nature.

Elle regardait régulièrement la série documentaire Universum sur les animaux et la nature avec sa famille, ce qui a renforcé sa fascination pour la nature. Quelques années plus tard, elle a lancé sa start-up pour s’engager elle-même dans la protection de la biodiversité. C’est ainsi qu’en janvier 2020, elle a co-fondé Pollinator Ambassadors avec Nynke Blömer, pour alerter et éduquer aux enjeux de la pollinisation. À travers ce projet, elle cherchait aussi à prouver la valeur des connaissances sur l’environnement. Et le fait qu’elles puissent être transmises de manière pérenne.

Financer son travail pour l’environnement, un vrai challenge

L’idée à l’origine de l’aventure Pollinator Ambassadors a en réalité commencé à germer dès 2019, alors que Nadine était apicultrice bénévole au Danemark. Lors d’un évènement, elle a pu échanger avec des membres de la Commission Européenne. “J’ai pris la parole et je leur ai fait remarquer que, bien que je sois profondément engagée pour le climat depuis plusieurs années, je n’arrivais pas à en vivre. Je devais gagner ma vie autrement et utiliser cet argent pour financer mes projets environnementaux. En dehors du Corps européen de solidarité (CES), il existe très peu de mécanismes de financement accessibles aux jeunes en Europe”, explique Nadine.

C’est lors du même événement qu’elle a rencontré Nynke, la future co-fondatrice de Pollinator Ambassadors. Elles ont décidé qu’il fallait faire quelque chose pour remédier au manque de valorisation financière du travail dans le domaine de l’environnement. Leur objectif était de trouver un moyen pour que les jeunes aient accès à des financements, qui leur permettent de réaliser leurs ambitions. La Commission européenne les a alors invitées à Bruxelles pour mettre en oeuvre leur idée. C’est à ce moment-là que les jeunes femmes se sont lancées dans une aventure d’ateliers, de conférences, et de développement de leur start-up Pollinator Ambassadors.

Avec Pollinator Ambassadors, Nadine ne se contente pas d’enseigner comment protéger les insectes pollinisateurs, mais souhaite aussi sensibiliser au biomimétisme, et notamment son impact dans la prise de décision collective. L’objectif est double : protéger les pollinisateurs et ouvrir une nouvelle voie de communication et d’échange entre individus. Elle s’intéresse en effet à l’application de nos connaissances sur le modèle social des abeilles et leur organisation, aux activités humaines. De manière très concrète, le biomimétisme peut par exemple donner lieu à des expériences de team building, et à une meilleure prise de décision.

Son combat à vélo pour la biodiversité

En 2021, Nadine s’est lancée dans son premier grand projet personnel, Bike for Bees : traverser l’Europe à vélo, pour sensibiliser à l’importance des abeilles et des pollinisateurs en général. Nadine a rencontré d’autres “ambassadeurs des pollinisateurs” à travers l’Europe: des apiculteurs, des experts de la nature, des groupes de jeunes et des défenseurs de la biodiversité de tous horizons. Cela lui a par exemple permis de découvrir la Slovénie, véritable “royaume des abeilles”.

L’importance des enjeux liés à la préservation des pollinisateurs

Les insectes pollinisateurs font aujourd’hui face à de nombreuses menaces. Une étude scientifique menée en Allemagne a permis d’observer l’évolution de la biomasse des insectes pollinisateurs dans les espaces naturels protégés du pays durant 25 ans. Résultat : leur biomasse a chuté de 75 %, alors même que cette expérience concernait des zones protégées ! “On a aussi observé un déclin conséquent d’autres espèces, en particulier de populations d’oiseaux. Ce sont les principaux prédateurs naturels des insectes, ces derniers sont essentiels à leur alimentation”, ajoute la jeune femme.

Si l’usage des pesticides dans le secteur agricole est évidemment un des problèmes majeurs, il faut également prendre en compte les impacts directs du dérèglement climatique. Les insectes pollinisateurs sont contraints de se déplacer vers d’autres latitudes et altitudes, ce qui perturbe l’écosystème local. Ils souffrent également des variations anormales de température, et de famine en raison du manque d’habitats naturels.

Or, les abeilles jouent un rôle primordial dans le phénomène de pollinisation. “C’est le processus qui permet la reproduction sexuée des plantes, en mettant en contact le pistil de la fleur (organes reproducteurs femelles) avec les étamines (organes reproducteurs mâles). Sans pollinisation, pas de reproduction, c’est-à-dire pas de plantes, pas de fruits, pas de légumes, bref pas de vie sur Terre !”, décrit Nadine. C’est donc la sécurité alimentaire mondiale qui dépend du nombre de pollinisateurs et de leur diversité, chaque insecte ayant un rôle de pollinisation particulier auprès d’une certaine espèce et à une certaine saison. 

Agir pour la biodiversité, mode d’emploi

Pour Nadine, il est important d’être en lien avec la biodiversité locale et autour de nos espaces de vie. “Nous devons repenser notre perception culturelle de l’esthétique, et ce à quoi nous aimerions que notre environnement ressemble. Ce n’est pas pour rien que le fait d’être entouré par la nature nous rend heureux. Par exemple, une pelouse taillée à ras, uniquement composée d’herbe, n’est ni souhaitable pour la biodiversité, ni pour notre bien-être. Elle est trop stérile”. Pour sortir de l’impasse environnementale, la jeune femme encourage avant tout chacun à établir un rapport à la nature plus personnel et positif.

Cependant, elle rappelle qu’un changement systémique est nécessaire. “On ne peut pas se contenter de blâmer les individus sur leurs choix de consommation, sans regarder du côté des grandes industries, des dynamiques économiques et des intérêts politiques. Il ne s’agit pas seulement de nous, les citoyens. Nous avons besoin d’un changement à tous les niveaux.”

Et pour la suite ?

Nadine voyage beaucoup, la plupart du temps toute seule. Des expériences qui lui ont énormément apporté. Grâce à son projet Bike for Bees, elle a pris confiance en l’avenir. Elle a pu évoluer et se dépasser, en roulant à vélo sous la chaleur parfois écrasante de l’été, car elle avait des ateliers à animer à chaque étape. Elle campait dans la nature et portait tout son équipement sur son vélo. “Alors que j’étais seule dans ma tente, quelque part sur une falaise, j’ai regardé autour de moi. J’ai réalisé la chance que j’avais d’être entourée de toute cette nature et tout cet espace, infiniment plus spacieux que mon appartement à Vienne.”

Ces expériences resteront gravées dans sa mémoire. Et avec son amie Nynke, elles comptent bien continuer de prendre à coeur leurs rôles d’ambassadrices des pollinisateurs, afin de faire découvrir les projets de l’UE aux jeunes, et les habitats des pollinisateurs.

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