78 litres, c’est la quantité d’eau nécessaire pour la fabrication d’un seul rouleau de papier toilette. Chaque année, 10 millions d’arbres sont abattus dans le monde pour confectionner ce produit a priori indispensable à notre hygiène intime. Et lorsque l’on tire la chasse d’eau de nos toilettes, ce sont en moyenne neuf litres d’eau potable à chaque utilisation qui sont évacués, d’après les chiffres du Planetoscope.
Sachant qu’une personne va au petit coin quatre fois par jour en moyenne, en un an, c’est l’équivalent du remplissage de 16 Jacuzzi ! On n’en a pas toujours conscience mais c’est un vrai luxe en ces temps de sobriété. D’autant plus quand on sait qu’utiliser autant d’eau et de papier toilette demeure le privilège de quelques pays dans le monde. Face à l’énormité de ces chiffres, des solutions existent.
En 2022, WE DEMAIN a noué un partenariat avec le Centre de Formation et de Perfectionnement des Journalistes (CFPJ). Onze jeunes journalistes en contrat de professionnalisation ont travaillé à la production d’une série d’articles autour du thème de la sobriété. Retrouvez ici l’ensemble des sujets publiés sur la question.
Recycler l’eau des toilettes
Pour réduire leur consommation d’eau, certains décident de se lancer dans l’autoconstruction. Comme Mathieu Cartier-Millon, qui a fait installer chez lui un récupérateur d’eau, il y a trois ans. L’électricien l’a fabriqué lui-même en quelques week-ends. “Je me suis lancé un défi perso, par conscience écologique, car c’est du gâchis d’utiliser de l’eau potable à ce point.”
Il décide de “construire une cuve en béton, pour récupérer de l’eau d’infiltration dans le vide sanitaire”, à l’aide d’un trou creusé dans le sol. 400 litres d’eau sont récupérés par jour, mais pas toute l’année… “En général, ça dure six mois, de l’automne au printemps, quand il pleut, puis je bascule automatiquement sur le réseau d’eau potable si la cuve est vide.” Si le système ne lui a pas permis d’économiser beaucoup d’argent, “seulement une centaine d’euros”, le quadragénaire ardéchois compte bien poursuivre ses gestes écologiques, en construisant au printemps prochain, un autre récupérateur d’eau mais… de pluie cette fois.
Des solutions existent aussi en appartement
De son côté, Céline Grimaych a mis en place une méthode “plus simple lorsqu’on habite en appartement”. Cette habitante de Chatou (Yvelines) âgée de 34 ans récupère l’eau qui lui a servi à nettoyer ses légumes, et à prendre sa douche dans un seau qu’elle verse ensuite dans la cuvette pour lui éviter de tirer la chasse. Une solution facile à gérer au quotidien qui a permis à cette mère de famille de réduire un peu sa facture d’eau.
Du côté du Low-tech Lab, un programme de recherches de solutions techniques utiles, accessibles et durables, on préconise les toilettes sèches. “Cela reste la meilleure solution. Puisque l’eau utilisée dans les toilettes classiques pour évacuer les déchets ne permet pas de résoudre le problème de pollution de l’eau.” De fait, une fois arrivées dans les stations d’épuration, les eaux usées sont rejetées dans l’environnement. Avec les toilettes sèches, il n’y a aucun gaspillage d’eau. Et d’après un article de Reporterre, le Réseau d’assainissement écologique affirme que “depuis la sécheresse de cet été, on sent une accélération du nombre de personnes intéressées” par l’achat de toilettes sèches.
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L’émergence du papier toilette recyclé
Concernant le papier toilette, le constat environnemental est, là aussi, loin d’être parfait. S’ils ne sont pas les plus gros consommateurs en Europe, derrière l’Allemagne et le Royaume-Uni (selon le portail de statistiques Statista), les Français utiliseraient en moyenne 6.4 kg de papier toilette par an et par personne, soit une centaine de rouleaux.
Des entreprises ont investi ce créneau. C’est le cas de Popee qui propose depuis trois ans des rouleaux de papier toilette recyclé, fabriqués en France à partir de papiers de corbeilles de bureaux d’entreprises. “Une fois récupérés, on enlève l’encre, les agrafes, etc.”, évoque Audray Destand, PDG de l’entreprise qui a reçu le prix “Entrepreneure de l’année par le label Origine France. “Aucun blanchiment et produit nocif n’y sont ajoutés.” Si elle permet d’économiser de grandes quantités de cellulose issue de la transformation du bois, la fabrication nécessite toutefois d’utiliser presque autant d’eau que pour fabriquer un papier hygiénique classique. “En ne coupant aucun arbre, on aide tout de même à faire mieux que ce qui existe déjà.”
Des alternatives pour moins consommer de papier toilette
Et, pour aller encore plus loin dans la sobriété, on peut désormais trouver du papier toilette lavable, le plus souvent “fait à la main”. Des lingettes en tissu à réserver toutefois aux petites commissions ! D’autres tablent carrément sur l’abandon du papier toilette, comme les inventeurs du bidet moderne Boku.
C’est un dispositif qu’on pose sur les toilettes et qui promet un nettoyage complet avec seulement de l’eau. Cette méthode, utilisée dans la plupart des pays du monde, n’empêche pas de s’essuyer les fesses… mais avec une serviette. Si certains ne sont pas encore prêts à passer le cap, il existe toujours la douchette !
Non aux produits chimiques dans l’eau des toilettes !
Dernier problème, les produits de nettoyage dédiés aux WC. Parmi les plus vendus, on retrouve ceux qui permettent de déboucher les toilettes. Composés de soude caustique, d’eau de Javel et d’ammoniaque, nocifs pour l’environnement. Selon l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), “le comble, c’est que tous ces produits sont relargués à chaque chasse d’eau, et qu’ils contiennent des substances chimiques”. Ces molécules toxiques comportent des risques pour la santé et l’environnement.
Comment s’en passer ? Pour Isabelle Louet, autrice du livre Le ménage facile au naturel (Massin, 2019), rien de plus facile. “Les recettes ‘maison’ sont tout aussi efficaces que les détergents vendus dans le commerce. À condition d’entretenir régulièrement ses toilettes…”
Vinaigre blanc, bicarbonate de soude, marc de café pour déboucher, savon de Marseille liquide pour détartrer, nombreuses sont les recettes pour les nettoyer de façon saine. Et, pour remplacer les diffuseurs de parfum, pourquoi ne pas utiliser des huiles essentielles ? En prime, “on fait des économies !“. Une raison supplémentaire de laisser la porte des toilettes ouverte et de faire entrer la sobriété…
Autrice : Agathe Caudron.