Partager la publication "Batterie au sodium : un premier produit commercialisé"
En matière de batteries, on évoque régulièrement des technologies prometteuses, voire révolutionnaires, mais qu’on ne voit jamais sortir des laboratoires ou qui restent à l’état de prototype. Mais cette nouvelle batterie sodium-ion fait exception. Si le concept existe depuis un demi-siècle, jusqu’à présent, les performances n’étaient pas au rendez-vous. Les recherches du CNRS ont permis de régler cette problématique. Et un premier produit embarquant l’innovation – un tournevis sans fil – est désormais commercialisé en magasin chez Leroy Merlin.
Quel est l’avantage des batteries sodium-ion en lieu et place des classiques batteries lithium-ion ? “Elles s’affranchissent du lithium et du cobalt habituellement utilisés – des ressources en tension dont la dépendance géostratégique affaiblit la souveraineté – et en pallie certaines limites, explique Hervé Beuffe, président de Tiamat, spin-off du CNRS. Ainsi, nos batteries sont plus durables – avec une durée de vie de 10 ans contre 3-4 ans pour celles au lithium dans des conditions d’usage continu – et 10 fois plus rapides à recharger (en 5 minutes seulement). Et ce, à coût équivalent aux technologies basées sur le lithium. Il s’agit donc d’une alternative écologique, économique et fiable.”
Des batteries 10 fois plus rapides à recharger, avec une durée de vie plus longue et moins polluantes.
Une nouvelle génération de batterie au sel de mer
Pour éviter d’aller chercher le lithium en Chine ou en Norvège ou de créer des mines de lithium en France, la piste du sodium dans les batteries semble particulièrement intéressante. Concrètement, le sodium est extrait du sel de mer. La source est donc aisément disponible notamment en France, avec ses quelque 20 000 kilomètres de côtes. Présent en larges quantités sur la planète, facilement accessible, renouvelable et avec une transformation moins impactante pour l’environnement, le sodium présente bien des avantages par rapport au lithium. Pour ce dernier, l’extraction est non seulement très polluante mais elle est aussi très peu recyclée.
Concrètement, une batterie sodium-ion fonctionne de la même manière qu’une batterie lithium-ion. Seule différence : les liaisons chimiques permettent d’utiliser la sodium de l’eau salée pour stocker l’énergie. En outre, le sodium est plus sûr car sa température de fonctionnement est faible. Cela permet aussi de garantir un nombre de cycles (longévité à l’usage) bien plus important (jusqu’à 5 fois plus qu’avec une batterie au lithium).
Une spin-off du CNRS derrière ce nouveau type de batterie
Au sein du CNRS, ce sont les équipes du professeur Jean-Marie Tarascon, chimiste mondialement reconnu pour ses travaux pionniers et ses innovations sur les batteries, qui a mis au point cette nouvelle technologie. En 2017, la start-up Tiamat, spin-off du CNRS, a été créée avec pour ambition affichée de commercialiser ce nouveau type de batterie. Dans un premier temps, le tournevis Dexter sera produit en petite quantité. Le temps de créer, d’ici 2025, une véritable usine dédiée au projet.
“Cette unité de production aura pour objectif de produire entre de 500 000 et 700 000 batteries par jour. À terme, cela devrait créer un millier d’emplois, ce dont notre start-up, qui emploie aujourd’hui 20 personnes, se réjouit”, souligne Hervé Beuffe. Pour atteindre cet objectif, Tiamat doit d’abord clôturer d’ici à la fin de l’année un tour de financement de plus de 100 millions d’euros.
Des tournevis aux véhicules électriques
Loin de vouloir se cantonner aux batteries de petit format, Tiamat compte développer des modèles plus volumineux afin d’adapter sa technologie aux usages de la mobilité électrique et du stockage d’énergies renouvelables intermittentes (éolienne ou solaire) via des batteries stationnaires.
“Nous nous intéressons notamment aux flottes de véhicules en location, qui requièrent des temps de recharge courts et nécessitent une continuité de service aux usagers. Nous avons déjà équipé, pour preuve de concept, des trottinettes, des chariots élévateurs et des scooters électriques”, conclut Hervé Beuffe.
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