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Comment le réchauffement climatique affecte-t-il les océans ?

Montée du niveau des eaux, baisse de l’oxygénation, acidification… Le réchauffement climatique affecte durablement l’équilibre des écosystèmes marins, qui sont pourtant en première ligne dans la régulation des températures et de la concentration de carbone dans l’atmosphère.

Le 11/12/2019 par Pauline Vallée
L'océan capte entre 25 et 30 % de l'excès de CO2 et plus de 90 % de la chaleur issue du réchauffement climatique. (Crédit : Pixabay)
L'océan capte entre 25 et 30 % de l'excès de CO2 et plus de 90 % de la chaleur issue du réchauffement climatique. (Crédit : Pixabay)

Est-ce un début de prise de conscience des menaces qui pèsent sur le monde marin ? Quatre mois après la publication du rapport du GIEC sur les océans et la cryosphère, qui prédisait notamment une élévation de plus de 1 mètre du niveau des mers d’ici 2100, le Chili a décidé de présenter la 25e Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP25), qui se tient finalement à Madrid jusqu’à 13 décembre, comme une “COP bleue”.

Car le monde marin et la machine climatique sont intimement liés. Véritable pompe à carbone, l’océan concentre 50 fois plus de CO2 que l’atmosphère, avec laquelle il en échange chaque année près d’une centaine de milliards de tonnes. Il absorbe également plus de 90 % du réchauffement planétaire provoqué par les activités humaines.

Or cet allié incontournables de la lutte contre le dérèglement climatique, déjà stressés par la surpêche et la pollution, est  affecté par la production excessive de gaz à effet de serre.

Zoom sur les cinq grandes menaces qui pèsent actuellement sur les océans.

1. Une montée du niveau des océans

Le réchauffement climatique provoque une hausse de la température globale des océans, ce qui se traduit par une élévation du niveau des océans. Il est ainsi monté de 8,5 cm entre 1994 et 2018, et devrait encore grimper de 60 cm à plus de 1 mètre d’ici 2100 selon les dernières conclusions du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC).

Comment expliquer ce phénomène ? En se réchauffant, l’eau se dilate. Elle occupe donc un volume plus important. Cette dilatation thermique représente environ 30 à 40 % de l’élévation observée du niveau de la mer.

Le dérèglement climatique est aussi responsable de la fonte des glaces, notamment des glaciers continentaux entourant le Groenland et l’Antarctique, ce qui augmente encore le volume d’eau de l’océan.

2. L’acidification des océans

Les activités humaines produisent du gaz carbonique dont une partie vient se dissoudre dans les océans. Ce phénomène permet de réduire l’effet de serre mais provoque également une acidification des eaux marines

On estime que leur acidité a grimpé de 30 % en 250 ans, ce qui se traduit par une diminution de 0,1 unité du pH moyen des océans, passant ainsi de 8,2 avant l’ère préindustrielle à 8,1 actuellement.

Un changement minime en apparence mais qui fragilise certains organismes marins, comme les coraux, les mollusques et le phytoplancton. Les projections annoncent une poursuite de la réduction du pH des océans à l’échelle mondiale, lequel pourrait passer de 8,1 à 7,8 d’ici 2100.

3. Une modification de la salinité des océans

L’eau océanique contient des sels simples, ce qui lui donne son goût salé caractéristique. Lorsqu’elle s’évapore sous l’action du réchauffement, les sels demeurent, eux, dans l’océan. La structure de salinité marine se retrouve ainsi profondément modifiée.

Cela se traduit par un creusement des contrastes de salinité entre les différentes zones marines (les zones à faible salinité deviennent plus douces, les zones à forte salinité plus salées) ainsi qu’une intensification du cycle de l’eau. Autrement dit plus d’évaporation, plus de précipitations et plus de ruissellement sur la terre ferme.

4. Une baisse de l’oxygénation des océans

La hausse de la température des océans ne provoque pas seulement leur dilatation. Elle modifie également la solubilité de l’oxygène dans l’eau : plus celle-ci est chaude, moins il y a d’oxygène. On estime que depuis 1960 la quantité d’oxygène dans l’océan a diminué au rythme de 2 % par décennie, jusqu’à 4 % en périphérie de certaines zones.

Cela affecte de nombreuses espèces marines, qui se voient contraintes de limiter leurs déplacements et de restreindre leurs territoires de vie. L’ensemble de la chaîne alimentaire et la répartition des espèces s’en trouvent perturbés.

5. Encore plus de réchauffement climatique

Le réchauffement de l’océan provoque une plus grande évaporation de l’eau. La vapeur d’eau étant un gaz à effet de serre, elle contribue à accélérer le réchauffement du climat… et donc l’évaporation de d’eau.

L’élévation de la température de l’océan le rend également moins efficace pour capter le carbone. “Une augmentation de 2 ou 3 °C de la température des eaux de surface diminue la solubilité du CO2 de quelques pourcents, et donc la capacité de l’océan à absorber le gaz carbonique”, appuie la plateforme Ocean & Climate dans ses fiches scientifiques élaborées par des spécialistes.

En résumé, outre ses effets néfastes sur la faune marine et la montée des eaux, le réchauffement climatique affaiblit également la capacité des océans à réguler la chaleur et l’excès de carbone. Un cercle vicieux à briser rapidement, sous peine de voir les phénomènes extrêmes (submersion d’îles et zones côtières, disparition de certaines espèces…) se multiplier dans les prochaines décennies.
 

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