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Vivre dans les bois pour “changer le monde”

Le 18/07/2019 par Jennifer Murzeau
Une vingtaine de personnes vivent dans cette communauté écolo. (Crédit : Lionel Prado)
Une vingtaine de personnes vivent dans cette communauté écolo. (Crédit : Lionel Prado)

Jonathan et Caroline ont une trentaine d’années, deux petites filles, et une cabane dans les bois. Ils y vivent. Pas pour se retirer du monde, “pour le changer”.
 
En avril 2018, ils ont quitté la banlieue parisienne, à bord de leur van, à la recherche d’une forêt dans laquelle ils pourraient s’établir. “À l’époque, explique Caroline, on ne savait pas encore ce qu’on venait chercher, on voulait juste vivre dans la nature, et en collectivité.”
 
Caroline et Jonathan sont écoeurés par “les dérives de l’époque, le massacre de la biodiversité, les lois qui protègent les intérêts économiques et si peu l’humain”. La vie dans la nature leur apparaît comme une issue. La seule.
 
Sur sa route, le couple se heurte à des embuches administratives. Il découvre les restrictions liées aux Plans locaux d’urbanisme (PLU), les prix prohibitifs du foncier. “Or, on voulait entreprendre quelque chose de reproductible et d’accessible à tous”, ajoute Jonathan.

Puis il découvre François. Voilà quinze ans que ce quinquagénaire s’est établi sur un bout de forêt qui lui appartient, en Corrèze, près de Brive-la-Gaillarde. Il y accueille des cabanes où vivent aujourd’hui quatre foyers. Caroline et Jonathan tombent sous le charme du lieu et du personnage. Ils y font peu à peu leur nid. Une cabane en matériaux naturels, donc biodégradable (seules les vitres ne le sont pas), intégrée à son environnement.

Se reconnecter à son environnement et à soi-même

Etablis depuis trois mois, ils ont des panneaux photovotaïques pour recharger leurs ordinateurs, bientôt une machine à laver le linge à pédale, des meubles récupérés ou fabriqués, de l’eau de source, des potagers et de la liberté à revendre.
 
À cela près que rien est à vendre dans cette vie-là. Elle est, selon eux, une réponse à une société qui s’autodétruit à force de tout acheter. “En cent ans, l’être humain a fait toutes sortes de progrès, mais nous sommes incapables de vivre avec les autres espèces, ni même avec la nôtre, estime Caroline. On enfouit nos déchets comme nos émotions, on est conditionnés pour nous adapter à un monde qui ne nous ressemble pas. Vivre dans la nature, c’est se reconnecter à son environnement et à soi-même.”

Et de poursuivre : On voit émerger un sentiment de gratitude, pour la terre qui nous nourrit, pour l’eau, pour la forêt qui nous permet de respirer. Or la gratitude est l’un des fondements du bonheur. Tous les matins, on se réveille et on se dit qu’on a de la chance.”
 

Société des bois

Cette chance, il compte bien la partager. Et la défendre. Car la mairie s’oppose à ces cabanes, certes montées sur un terrain non constructible, mais qui s’apparentent à de l’habitat léger. 

Le couple a donc lancé la plateforme Désobéissance fertile. “Nous avons réalisé que plein de gens vivaient déjà comme nous, explique Jonathan. Seulement, ils se cachaient parce que la loi les dit en infraction. Nous, nous voulons promouvoir ce mode de vie qui ne devrait pas être hors la loi, éveiller les consciences, montrer que l’urgence climatique implique de changer les comportements”.
 
Aussi, on trouve sur cette plateforme des stages immersifs auprès de ces habitants aussi débrouillards qu’idéalistes afin d’apprendre à vivre comme eux.
 
La plateforme incite également les particuliers à acheter des parcelles de forêt afin d’éviter qu’elles soient rasées et exploitées. Elle propose aussi aux propriétaires terriens de céder des terrains pour ce genre d’initiatives.

Le site recense déjà une cinquantaine de lieux qui se reconnaissent dans le projet en France. 
 
“Si on n’apprend pas à vivre ensemble, on est morts, lance Jonathan. Le survivalisme est une réponse individualiste, capitaliste, qui pousse chacun à s’approprier les ressources. Nous, nous concevons les ressources en commun. Et nous invitons les habitants de toutes les contrées à s’orienter vers une logique dite de ‘municipalisme’. L’échelle locale est toujours la plus appropriée pour prendre des décisions. Il y a urgence et il n’y aura pas de sauveur.” 

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