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Vers un Internet plus sûr pour les enfants ?

Le 22/05/2019 par Albane Guichard
Menthe, rhubarbe, laurier... Dans la cité de la Grande Borne, les CM1 de l'école du Bélier ont tous des plantes à  soigner. (Crédit : à‰mile Luider)
Menthe, rhubarbe, laurier... Dans la cité de la Grande Borne, les CM1 de l'école du Bélier ont tous des plantes à  soigner. (Crédit : à‰mile Luider)

Chaque seconde, deux enfants se connectent sur Internet pour la première fois. Et chaque seconde, des réseaux sociaux et sites web récupèrent leurs données. Pour les entreprises dont le modèle économique dépend de ces datas, les enfants sont une cible de choix.
 
Face à l’augmentation du nombre de mineurs sur Internet, certaines institutions tirent la sonnette d’alarme. En France, la CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés) promet de faire du traitement des données des mineurs une de ses trois priorités pour 2019. “Une attention particulière sera apportée à ce public vulnérable”, annonce-t-elle dans un communiqué de presse.
En mai dernier, son équivalent britannique, l’Information Commissioner’s Office, avait publié un code de conduite très strict à appliquer par tout service en ligne susceptible d’être utilisé par des mineurs.

Nouvelle stratégie de contrôle pour la CNIL

“Les mineurs sont des acteurs à part entière de la société du numérique mais ils n’ont pas ou peu conscience des risques liés au traitement de leurs données personnelles”, explique à We Demain Astrid Mariaux, chef de service des contrôles à la direction de la protection des droits et des sanctions de la CNIL.
 
Des dispositions spécifiques aux mineurs ont d’ailleurs été inscrites dans le Règlement général sur la protection des données (RGPD), entré en vigueur en mai 2018. Une décision prise suite à de nombreuses plaintes reçues et face à l’augmentation des technologies numériques, poursuit Astrid Mariaux :
Les traitements des données [l’analyse de ces données, ndlr] des mineurs se sont multipliés ces dernières années, par le biais des réseaux sociaux mais également par le développement d’objets connectés à destination des enfants : montres, bracelets ou même doudous connectés.”

Lire aussi : Pourquoi les Gafam peuvent avoir peur de l’Europe

Un “Internet 3.0” pour les enfants

Avant que les institutions ne se saisissent du problème, des entreprises avaient déjà fait d’un safer Internet leur objectif, et leur fond de commerce.

Kidscorp, Tankee, Two Hat Security, Super Awesome … elles proposent toutes des kidtech, des outils technologiques pour créer des contenus, des jeux vidéos et même des publicités adaptées aux enfants, tout en protégeant leurs données.

 

Présent à Viva Tech, le PDG de Super Awesome, Dylan Collins, a affirmé qu’“Internet a été conçu pour les adultes” et que personne ne s’intéresse à la sécurité des enfants dans la Silicon Valley. D’ailleurs, les parents qui y travaillent interdissent bien souvent à leurs enfants les technologies qu’ils vendent, comme Steve Jobs qui refusait que ses enfants aient un iPad.  
 
Dylan Collins en est convaincu, la nouvelle génération d’Internet, l’“Internet 3.0”, sera axée sur les enfants et la protection de la vie privée, et elle ne sera pas conçue dans la Silicon Valley. En France, certains acteurs de la tech misent déja sur un  Internet plus éthique.

La solution : durcir les sanctions

Le PDG de Super Awesome s’est réjoui des législations mises en place aux États-Unis, en Amérique du Sud, en Australie  et plus récemment en Europe. Mais selon lui, seules les sanctions financières ont un réel impact :
“C’est une chose de faire passer une loi et de prévenir les plateformes Internet qu’elles doivent la respecter, c’en est une autre de les condamner à une amende de 5 millions de dollars.”
En février dernier, la Commission fédérale du commerce américaine a condamné l’application TikTok à une amende de 5,7 millions de dollars, la plus élevée jamais donnée. L’application de vidéos avait illégalement récupéré les données personnelles d’enfants de moins de 13 ans, enfreignant ainsi le Children’s Online Privacy Protection Act.

Après une période de tolérance, la CNIL promet de son côté d’appliquer les sanctions prévues par le RGPD : rappel à l’ordre, limitation temporaire ou définitive du traitement, amende administrative qui pourra s’élever jusqu’à 10 millions d’euros ou 2 % du chiffre d’affaires de la société mise en cause.

Assez pour inciter les géants d’Internet à veiller de plus près à la protection des données des mineurs ?

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