Partager la publication "En Inde, on a visité l’université qui forme les “va-nu-pieds” aux métiers de demain"
Tilonia, début décembre.
Et si vous pouviez devenir ingénieur sans avoir, en amont, fait de grande école ? Ou guérir quelqu’un d’une maladie sans avoir passé de longues années sur les bancs d’une fac de médecine ? C’est ce que rend possible le Barefoot College (“l’université des va-nu-pieds”, littéralement), créé en 1972 par Sanjit Bunker Roy, un activiste et entrepreneur social indien. Son objectif d’alors : offrir une éducation avancée à des personnes analphabètes ou semi analphabètes.
Le génie des créateurs du Barefoot College est d’avoir compris que l’on pouvait “démystifier” les métiers techniques et qu’il n’était pas indispensable d’avoir fait de longues études pour fabriquer, installer et réparer des pompes à main ou des équipements solaires, pas plus qu’il n’est nécessaire de suivre un long cursus pour traiter la plupart des problèmes de santé dans une communauté rurale.
Autonomie énergétique de plus d’un millier de villages dans le monde
L’université forme aussi des techniciens capables d’installer des systèmes de récupération et de traitement de l’eau, de fabriquer et de maintenir des fours et chauffe-eau solaire, des pompes à main pour les puits, et étend même ses activités éducatives à la mise en place de crèches et d’écoles de nuit pour les enfants.
Sobriété, économie et vie collective
Certes, tout y est, depuis les salles de classe, la bibliothèque, la cantine, le centre médical, jusqu’à la crèche pour le personnel, la radio FM interne et le gift-shop. Là où le Barefoot se distingue résolument de ses consœurs plus fortunées, c’est dans sa mise en œuvre : “sobriété” et “économie” sont les principes qui guident ici les réalisations. Tout est fait pour que les personnes venant d’environnements pauvres se sentent à l’aise. Ainsi, les repas sont pris collectivement, assis sur une natte ou à une grande table commune et chacun, qu’il soit stagiaire, staff ou visiteur fait sa propre vaisselle.
Les restes sont bien entendu récupérés pour le compost, qui viendra amender le jardin potager de l’université, lequel fournit en légumes la cantine. De même, dans les chambres, les visiteurs comme les stagiaires se douchent avec un seau, apprenant ainsi à ne pas gaspiller l’eau.
Énergie solaire et récupération des eaux de pluie
Le point d’orgue de notre visite à Tilonia reste la visite de la salle de formation des Solar Mamas. Lorsque nous y sommes passés, trente femmes de huit nationalités différentes sur trois continents apprenaient ensemble le métier d’ingénieur solaire, soudant des composants sur des circuits imprimés, assemblant des appareils ou testant des équipements.
Gandhi l’avait pensé et initié, le Barefoot College en apporte la preuve année après année depuis quarante ans : la solution aux problèmes de sous-développement et de pauvreté est à chercher chez les pauvres eux-mêmes. Ce modèle éducatif est duplicable pour peu qu’on l’enracine dans son environnement immédiat : un Barefoot College existe ainsi en Sierra Leone. Nous espérons qu’il y en aura beaucoup d’autres.
Ahmed et Karine Benabadji, fondateurs du projet Open-Villages.
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Et pour (re)lire les précédents épisodes du tour du monde de la famille Benabadji, c’est par ici -> Épisode 1 / Épisode 2 / Épisode 3 / Épisode 4