COP21 et élections régionales : “Le monde et la France se retrouvent dos au mur”

Il arrive que l’histoire s’accélère. Ce fut le cas le week-end du 12 et 13 décembre, pendant lequel le monde et la France se sont retrouvés dos au mur, face à leurs responsabilités.

La Cop21 a débouché sur un accord historique. Après 20 ans de négociations et 13 jours et nuits de tractations finales, c’est le premier accord universel de lutte contre le réchauffement climatique qui a été signé par 195 pays, soit toute la planète.

Les climato-sceptiques ont perdu toute crédibilité : 2015 va encore battre le record de 2014 en terme de réchauffement, dont les effets cataclysmiques menacent directement la survie aujourd’hui de certains pays, et demain de l’humanité toute entière. L’objectif de maintenir l’augmentation de la température moyenne “bien en dessous de 2°” et si possible de 1,5° s’impose à tous, et les pays du nord, qui ont reconnu leur responsabilité, s’engagent à verser au moins 100 milliards par an à ceux, pauvres, du sud.

Alors bien sûr tout n’est pas réglé, loin de là. Ce n’est que le début d’un processus que chaque pays doit traduire dans les faits. L’accord prévoit bien des obligations de résultats, des mécanismes de transparence et des rendez-vous de suivi, mais il ne comporte pas de sanctions, ce qui permet à certains écologistes de parler de “droit mou”.

Peut-être plus significatif encore, l’accord de Paris – et c’est une fierté qu’il porte le nom de la capitale – s’inscrit dans une prise de conscience générale. Les maires de grandes villes, les régions, les entreprises et les investisseurs se sont engagés à lutter chacun à leur niveau contre les émissions de CO2 et à désinvestir des énergies fossiles. Le tout, sous la surveillance des ONG et des opinions publiques.

“Entendre le message des urnes, c’est agir dès aujourd’hui”

Dos au mur également les politiques français. La honte et le désastre de régions gagnées par le Front national, c’est à dire par le parti du repli sur soi et du rejet de l’autre, ont pu être évités. Mais chacun admet que ce n’est qu’un sursis si tout continue comme avant, c’est à dire comme depuis 20 ou 30 ans : le chômage, le sentiment de déclassement et d’abandon, l’impuissance et l’éloignement des politiques.

Entendre le message des urnes, c’est agir dès aujourd’hui dans trois directions. D’abord changer les pratiques et les comportements politiques qui créent le rejet des élus et des partis de gouvernement. Xavier Bertrand l’a compris en trouvant les mots qu’on attendait le soir du scrutin, et en démissionnant de ses mandats de député et de maire pour se consacrer entièrement à sa région.

Hélas, au même moment, Claude Bartolone, battu dans le déshonneur après ses propos sur la race blanche, a sans le moindre cas de conscience repris son fauteuil de président de l’Assemblée, 4ème personnage de l’état censé incarner un le consensus républicain. Nicolas Sarkozy n’a, lui, trouvé comme unique priorité que d’évincer sa numéro 2 Nathalie Kosciusko-Morizet, coupable de lèse majesté après avoir défendu le front républicain qui a permis la défaite du FN.

Le gouvernement prendra-t-il les risques d’un “job act” ?

Deuxième urgence, s’attaquer enfin vraiment au chômage, quitte à briser quelques tabous. Manuel Valls annonce des nouvelles mesures pour développer l’apprentissage, que des décisions précédentes avaient rapetissé, pour relancer la formation professionnelle qui vient d’être réformée (!), et pour desserrer les contraintes qui freinent les embauches depuis des décennies : on peut douter que le gouvernement prenne enfin le risque d’un “job act” sur les contrats de travail, le code du travail, ou la réinsertion des chômeurs de longue durée. Ne va-t-il pas plutôt continuer à s’en tenir au “trop peu, trop tard”…?

Il faut enfin assumer l’Europe. Dans la compétition économique mondiale, comme face aux migrations ou pour la sécurité, la France ne pourra s’en sortir seule. L’Union européenne doit être renforcée, par exemple sur le contrôle extérieur de ses frontières. Les politiques français préfèrent en général faire de l’Europe le bouc-émissaire de leurs lâchetés et de leur impuissance.

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