Nous entendons aujourd’hui, suite à une mobilisation sectorielle et locale, que l’écotaxe est suspendue, et ses modalités d’application remises en cause. Rappelons qu’il s’agit d’une initiative européenne, déjà mise en œuvre avec succès par nos voisins, qui répond au triple objectif de relocaliser l’économie en encourageant les circuits courts, de favoriser l’emploi local sur les territoires, et de faire payer l’entretien du réseau routier par ses utilisateurs. Malheureusement, son déploiement n’a pas été accompagnée des nécessaires démarches de communication, de sensibilisation et d’implication démocratique des territoires.
La filière agroalimentaire française et bretonne en particulier ne sera pas sauvée par la suspension de l’écotaxe. Confrontée à des enjeux sans précédent, qu’il s’agisse des fermetures d’abattoirs ou de la nécessaire reconquête de la confiance du consommateur, elle doit effectuer une métamorphose aussi nécessaire qu’ urgente. Rappelons à ce sujet que sa mise en place aurait permis de relocaliser l’abattage des porcs élevés en Bretagne mais abattus en Allemagne, ce qui a privé la filière d’abattage et de transformation bretonne de plus de 3 mois de travail.
Des ajustements à la taxe peuvent être envisagés pour des questions d’équité, ils sont connus et localisés : limitation des “effets de bord” pour les acteurs économique à proximité immédiate d’un portique (quelques points sensibles, de l’ordre de la dizaine) et intégration dans le périmètre de la taxe des importations portuaires. Mais sa mise en œuvre est nécessaire à la fois par les ressources qu’elle génère et par le signal-prix qu’elle implique pour relocaliser l’économie.
Quant aux difficultés de la filière agro-alimentaire en Bretagne, celles-ci seront très loin de s’arrêter par la suspension de l’écotaxe. C’est bien une métamorphose qu’il s’agit de réaliser, en cessant de se battre sur le seul prix de vente en délaissant les impacts environnementaux et sur l’animal, en cessant d’expédier de la matière brute mais au contraire en la transformant localement, et en rétablissant la confiance du consommateur par le jeu de la qualité.
C’est pourquoi Green Cross choisit de prototyper en conditions réelles, une variété de modèles productifs, notamment ceux qui font le choix d’une meilleure qualité, d’un ancrage territorial fort, et de la triple performance économique, écologique et sociale. Par exemple, nous avons développé une initiative en Pays de Saint-Brieuc pour développer la production d’un porc durable, sur paille, alimenté localement à hauteur de 60%, générant une viande de qualité à un coût accessible tout en traitant convenablement l’animal et en contribuant à améliorer le revenu des éleveurs. Il nous semble important que de tels modèles puissent être encouragés, pour contribuer à donner de nouvelles perspectives à la filière agroalimentaire, mais également pour initier un changement amené à générer une meilleure compétitivité en se reposant sur la qualité, l’innovation, la formation et la construction d’un rapport de confiance avec le consommateur.
Nous souhaitons donc insister d’une part sur l’importance de maintenir le principe de l’écotaxe et d’en confirmer sans délai le calendrier, après quelques éventuels ajustements des “effets de bord”, mais également de mettre en place concrètement les maillons d’une métamorphose de la filière agro-alimentaire en Bretagne, notamment de l’élevage, autour de produits de qualité, d’une organisation transparence restaurant la confiance, et d’une triple performance économique, écologique et sociale.
Nicolas Imbert est directeur exécutif de Green Cross France et Territoires.
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