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2050, un monde partagé avec le vivant

À l’occasion de l’événement we are_ DEMAIN, la juriste et présidente de l’association Wild Legal Marine Calmet s’est prêtée au jeu du récit de prospective sur le vivant. Où en sera la Seine en 2050 ? “Projetons-nous dans un jour un peu spécial. Ce jour-là, il y a une grande assemblée qui se tient. Il y a des jeunes enfants, il y a des anciens. Et un premier groupe se lève. Il se trouve que c’est le comité de sentinelle, les sentinelles de la Seine. Elles racontent : la Seine va bien, va mieux. Elle a traversé 20 ans de sécheresse, 20 ans d’aridité. Les poissons avaient disparu. Aujourd’hui les sentinelles racontent que tout va mieux. Les poissons sont revenus, des poissons magnifiques. On a vu des oiseaux, ils sont sublimes. Ils voyagent à travers toute l’Europe et ils se sont posés sur les bords de la Seine.”

“Puis le groupe des gardiens de la Seine se lève. Il évoque un projet pour le fleuve. Un projet de péniche à voile qui se déplacerait uniquement grâce aux marées et qui remonterait la scène. Notamment pour le trafic de marchandises, mais aussi pour le tourisme. Les gardiens sont là pour étudier si ce projet est compatible avec les droits de la Seine. Et après avoir longuement étudié la question, après avoir tenté d’interroger justement les poissons, les oiseaux, les arbres qui bordent la Seine, ils livrent leur avis : le projet pourra être accepté par la Seine. Enfin, un dernier groupe se lève : les ambassadeurs et les ambassadrices du fleuve. Ce jour-là, ils présentent une jeune fille qui a été nommée pour être le visage humain de la Seine. Elle en sera aussi sa voix. Elle siégera désormais à la mairie de Paris. Et puis elle sera aussi chargée de faire le tour de toutes les écoles pour former des jeunes enfants.”

Reconnaître demain les droits du vivant, des écosystèmes fluviaux, des montagnes, des forêts…

Le récit de Marine Calmet ne pourra devenir une réalité qu’à une condition : notre capacité à tous d’endosser la responsabilité d’être ses sentinelles, d’être ses gardiens, d’être ses ambassadeurs de nos écosystèmes. Aussi bien les écosystèmes fluviaux, les montagnes ou encore les forêts. C’est tout le travail de l’association Wild Legal qui planche sur des propositions juridiques pour faire en sorte que ce mouvement des droits de la nature prenne racine, en France et ailleurs. Reconnaître au vivant des droits, un défi majeur.

L’Espagne, par exemple, a été le premier pays à reconnaître les droits fondamentaux d’une lagune salée de 135 km2. Une lagune, la mar menor, qui était très fortement impactée par des activités agricoles et qui dépérissaient sous les yeux des citoyens. Ceux-ci ont décidé de dire stop. La mar menor est désormais une “personne”, un sujet de droit. En France, aux îles Loyauté – qui dépendent de la Nouvelle-Calédonie –, les droits des requins et des tortues ont été reconnus cet été. “Désormais, ils ont des porte-parole humains qui les représentent auprès de l’administration mais aussi au sein des villages maoris”, qui sont donc les porte-paroles officiels désormais des tortues et des requins”, explique Marine Calmet.

Droits humains et droits de la nature, intimement liés

Reconnaître juridiquement les droits des écosystèmes naturels est une tendance mondiale croissante avec des exemples en Équateur, en Nouvelle-Zélande, en Ouganda, en Inde, aux États-Unis… “C’est d’autant plus important qu’on ne peut pas penser les droits humains si on ne prend pas en compte les droits de la nature, du vivant, souligne Marine Calmet. Demain, on n’arrivera plus à protéger les droits humains si on ne peut pas garantir les droits fondamentaux de la nature. Il faut penser le droit à un environnement sain.”

“On ne peut pas penser les droits humains si on ne prend pas en compte les droits de la nature”

Marine Calmet

L’Équateur l’a bien compris, en intégrant en 2008 dans sa Constitution, à l’article 71, le fait que la Terre verte a des droits fondamentaux. Et ces droits peuvent être évidemment revendiqués devant les tribunaux. “Cela a servi notamment quand deux entreprises minières ont voulu creusé dans une très belle forêt humide. Ils allaient raser 80 % de la surface. Des citoyens ont porté le sujet devant les tribunaux et ils ont gagné. Même l’État s’est fait taper sur les doigts pour avoir octroyé un permis d’exploitation.” Cela donne de l’espoir. Pour aujourd’hui comme pour 2050.

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