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Armel Le Coz : “l’esprit du web peut réinventer la démocratie”

Le cofondateur du collectif et blog démocratieouverte.org était invité au LH Forum la semaine dernière. Il a répondu à nos questions sur le renouveau démocratique qu’il promeut.

Le 30/09/2013 par WeDemain

Armel Le Coz est cofondateur du collectif et blog démocratieouverte.org, qui suit l’actualité de l’open-gouvernance et des acteurs qui œuvrent pour son avènement. Il participe à la FING (Fondation Internet Nouvelle Génération), et au programme Innovations democraTIC, dédié à la démocratie locale et numérique. Il s’est aussi récemment lancé dans un tour de France des innovations auprès des maires et candidats aux municipales, pour les interroger sur ce que pourrait être, d’après eux, ce nouveau monde et cette démocratie efficace que de plus en plus de citoyens recherchent.

WE DEMAIN : Vous dites vous inspirer de l’Open Source. Comment l’esprit du web peut-il réinventer la démocratie ?
 
Armel Le Coz : De l’Open Source est né un paradigme qui peut irradier de nouveaux échelons de la société. Transparence, participation, collaboration : on a là les graines d’une nouvelle façon de penser une démocratie plus horizontale. Elle ne se caractérise plus par une concurrence de droit privé mais par une collaboration ouverte dans la recherche du bien commun.
 
Créer un Parti Pirate, comme l’ont fait les Allemands, peut-il être la solution ?
 
Oui et non. La logique de parti ne me parle pas du tout. J’ai décidé de ne pas m’encarter, même si je trouve des choses intéressantes dans tous les partis. Être en concurrence avec d’autres pour prendre le pouvoir, c‘est obsolète.
 
Mais ne faut-il pas un parti pour promouvoir ce projet de société et, in fine, abolir les partis ?
 
Pas forcément. Si les partis doivent mourir ils le feront d’eux-mêmes. Je ne pense pas que ce soit l’avenir d’avoir des organisations pyramidales faites pour prendre et répartir le pouvoir. Ce qu’il faut aujourd’hui voir apparaître c’est une nouvelle génération de citoyens en capacité d’exercer directement le pouvoir plutôt que de le déléguer à des représentants.
 
C’est un peu vite dit, non ? Les citoyens sont- ils aptes à légiférer sur tout ? Si on avait consulté les citoyens sur la peine de mort, ils ne l’auraient pas abolie…
 
Est-ce qu’aujourd’hui le politique précède vraiment le citoyen ? Si l’on se cantonne à une vision de la démocratie comme dictature de la majorité, alors bien sûr on a besoin de politiques éclairés pour décider à la place du peuple qui ne sait pas encore ce qu’il doit penser. Personnellement, je crois beaucoup plus à l’empowerment (octroi de plus de pouvoir aux individus ou aux groupes pour agir sur les conditions sociales, économiques, politiques ou écologiques). C’est en le mettant en situation de débattre et de décider par lui même qu’on peut faire confiance au citoyen. Si on le maintien dans l’ignorance, avec la consommation débridée comme seule exutoire, il ne faut pas s’étonner que les politiques décident à sa place. Alors certes, il faut un cadre général au respect des droits de l’Homme et de la planète. Mais à l’intérieur, place à la controverse !

La France, cramponnée aux institution de la Vème République, est-elle prête pour une telle mutation ?
 
La culture politique française est assez réfractaire à ces nouvelles formes de gouvernance. La plupart des députés et sénateurs n’y comprennent pas grand chose. Ni le président de la République, ni le Premier ministre ne tiennent vraiment de discours sur la question. C’est dommage : avec l’affaire Cahuzac, il y avait une réelle fenêtre médiatique pour parler d’opengov. Au lieu de cela, tout a tourné autour d’un débat ridicule sur les déclarations de patrimoine. La France n’a toujours pas adhéré à l’OpenGov Partnership, qui regroupe pourtant plus de 50 états autour d’engagements concrets. L’opacité règne sur la politique Française et nous sommes de plus en plus mal placés sur le plan de la corruption.
 
Le tableau est-il si sombre ?
 
Non. Au niveau de la société civile, le développement de l’Opendata va bon train et les collectivités locales et le gouvernement jouent le jeu. La création d’EtaLab et du SGMAP (secrétariat général pour la modernisation de l’action publique) va dans le bon sens. Et Fleur Pellerin, ministre déléguée à l’Économie numérique, accompagne tous ces acteurs car elle a bien compris qu’Internet et la génération Y changeaient la manière de gouverner.

Un exemple d’initiative qui inspire votre démarche ?
 
J’ai beaucoup aimé ce que les Colibris ont fait pendant la campagne électorale en proclamant « tous candidats ! » Chacun pouvait se prendre en photo avec une citation et devenir candidat-citoyen anonyme. Colibris a fait imprimer 10 000 affiches, sur du papier recyclé, dans 40 villes de France. Une campagne pour dénoncer la pauvreté de la campagne officielle, qui m’évoque la phrase de Gandhi : « Soyez vous même le changement que vous voulez voir dans le monde. »
 
Je suis également inspiré par le bouillonnement mondial qu’on observe depuis quelques années avec les révolutions arabes, les indignés, le mouvement #Occupy… De plus en plus s’aperçoivent qu’il peut y avoir un pouvoir d’agir là ou il y a quelques dizaines d’années on aurait baissé les bras. Ces mouvements, qui sont encore des réussites partielles, sont révélateurs du sens de l’histoire. Je suis convaincu qu’ils sont amenés à infiltrer le politique tôt ou tard. Sans violence, mais inexorablement.

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