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“La France n’est pas assez préparée au réchauffement”

Corinne le Quéré, présidente du Haut Conseil pour le climat, qui vient de rendre son dernier rapport, pointe le retard de la France. Elle appelle à mieux se préparer au réchauffement.

Le 30/06/2021 par Alice Pouyat
Corinne Le Quéré, présidente du Haut Conseil pour le climat appelle à accélérer la préparation aux effets du réchauffement.
Corinne Le Quéré, présidente du Haut Conseil pour le climat, appelle à accélérer la préparation aux effets du réchauffement. (Crédit : Steve FORREST/PANOS-REA/ Caisse des Dépôts)
Corinne Le Quéré, présidente du Haut Conseil pour le climat, appelle à accélérer la préparation aux effets du réchauffement. (Crédit : Steve FORREST/PANOS-REA/ Caisse des Dépôts)

Peut mieux faire. Voici en résumé le bilan du dernier rapport du Haut Conseil pour le climat concernant les efforts de la France dans la lutte contre le réchauffement. En 2019, les émissions de notre pays ont en effet baissé de 1,9 %, mieux qu’en 2018 (1,1 %). Elles baissent davantage encore en 2020 du fait de la pandémie. Mais “les efforts actuels restent insuffisants” pour atteindre les objectifs fixés par l’accord de Paris : moins 40 % d’émissions d’ici à 2030 par rapport à 1990. 

Avant la COP26, à Glasgow, en novembre prochain, le Haut Conseil plaide donc pour des mesures plus ambitieuses. Son rapport intitulé “Renforcer l’atténuation, engager l’adaptation”, appelle aussi pour la première fois à mieux se préparer aux impacts de plus en plus présents du changement climatique. Le point avec sa présidente, la climatologue Corinne le Quéré. 

  • WE DEMAIN. Quel a été l’impact du Covid sur les émissions de gaz à effet de serre ? 

Corinne le Quéré. Il a été très prononcé puisque l’on constate une baisse de 9 % des émissions sur 2020. Mais cette baisse est temporaire, très conjoncturelle. Elle est liée à la baisse des déplacements, de la consommation. Pas à un changement profond de nos modes de vie… D’ailleurs dès que les mesures de confinement se sont allégées, les émissions sont reparties. En revanche, nous espérons que les investissement faits dans le cadre du plan de relance aient un effet à plus long terme. 

  • Résultat de notre retard, la baisse des émissions doit doubler rapidement pour atteindre 3 % par an dès 2021. Est-ce encore réaliste ? 

Oui, l’objectif est encore tenable, à condition de réagir vite. Les émissions diminuent bien dans trois secteurs : l’industrie, la transformation énergétique et surtout le bâtiment, qui bénéficie de beaucoup de politiques publiques, même s’il faut encore accélérer les rénovations. Mais deux secteurs sont très en retard : l’agriculture et les transports.

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“L’agriculture et les transports sont très en retard”

  • Que préconisez-vous dans ce domaine des transports par exemple ? 

Il y a plein de choses à faire. Du fait de la crise sanitaire, les gens prennent davantage leur voiture. Il faut donc sécuriser les transports en commun. On voit aussi un engouement pour le vélo, à soutenir. Et à plus long terme, il faut accélérer l’électrification du parc automobile. Les règles européennes en 2020 ont offert un débouché, avec 11 % des voitures neuves électrifiées. Maintenant, il faut pousser cette avancée, via des infrastructures de chargement par exemple. Pour le transport de marchandise, il faut favoriser le fret ferroviaire, bien plus développé chez nos voisins européens…

  • Le plan de relance et la loi climat sont-ils à la hauteur de l’urgence ? 

Dans le plan de relance, il y a bien des investissements bas-carbone fléchés pour les deux prochaines années. Ils vont être très utiles, notamment pour la rénovation énergétique des bâtiments, créer des emplois… Mais il faut donner de suite des signaux clairs pour que les investissements suivent dans la durée. 

Quant à la Loi climat et résilience, comme nous l’indiquons dans un avis rendu en février, elle comprend beaucoup de mesures qui vont aider à coordonner les actions bas-carbone. Par contre, les actions pour baisser les émissions ne sont pas assez ambitieuses et rapides. Dès que la loi sera promulguée, il faudra donc pousser pour que les décrets d’application soient à la hauteur de nos ambitions.

“La France a un rôle à jouer à la COP26 contre le réchauffement”

  • Votre rapport appelle aussi à mieux se préparer aux effets du réchauffement… 

Oui, pour la première fois, nous pointons l’urgence de penser à l’adaptation au changement climatique qui touche déjà les deux tiers de la population française, et qui va s’accentuer. Il faut donc se préparer davantage aux impacts du réchauffement, passer à la vitesse supérieure, avec des objectifs quantifiés, des délais précis. Au niveau national mais aussi dans chaque territoire. 

  • Compte tenu de ce retard global, qu’attendez-vous de la France à la COP26 à Glasgow, en novembre prochain ? 

La France, qui est l’architecte de l’accord de Paris, a un rôle essentiel à jouer à la COP26. Elle doit d’abord être exemplaire, puis entraîner les autres pays avec elle, impulser des plans d’implémentation les plus forts possible contre le réchauffement.

Comme l’Union européenne a revu ses objectifs à la hausse, passant de moins 40 à 55 % d’émissions pour 2030, on attend que la France en fasse de même. 

Il faut aussi que la France et l’Europe impulsent des stratégies plus concrètes pour respecter les ambitions affichées. Par exemple imposer un échéancier plus clair et plus rapide pour le retrait des véhicules thermiques, pour l’arrêt du chauffage à énergie fossile dans les bâtiments… Ces échéanciers sont indispensables pour que les entreprises et les individus comprennent qu’il est urgent de faire les investissements nécessaires dans ces secteurs. Il faut y aller et arrêter de procrastiner ! 

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