En campagne pour les élections de mai 2021, Nicola Sturgeon, Première ministre de l’Écosse, avait annoncé en avril : « Depuis qu’il est au pouvoir, le SNP [Scottish National Party, ndlr] a énormément investi pour libérer le potentiel de l’Écosse en énergies renouvelables. L’année dernière, nous avons généré l’équivalent de plus de 97 % de notre demande en électricité à partir de sources renouvelables. »
Résultat d’une forte volonté politique et d’investissements publics importants, la production d’électricité verte a été multipliée par trois en dix ans. Et cela grâce au développement de l’éolien terrestre. Aujourd’hui, l’électricité renouvelable provient à 73 % du vent (éolien terrestre et maritime). Le reste s’appuie sur l’hydraulique, les panneaux solaires, le gaz émanant des déchets et l’énergie des marées et des vagues.
Ces chiffres ne garantissent pas un avenir 100 % renouvelable. Car le vent est un élément capricieux. En 2019, les sources renouvelables n’avaient constitué que 61 % du mix électrique. Cette année-là, le réseau électrique écossais avait aussi été alimenté grâce au nucléaire (24 %) et aux énergies fossiles (12 %).
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Respecter son objectif de neutralité carbone d’ici à 2045 tout en continuant à extraire les hydrocarbures en mer du Nord. Voilà le jeu d’équilibriste auquel se livre le gouvernement écossais depuis plusieurs années. Certes, la dernière centrale à charbon a fermé ses portes en 2016. Mais en 2018, le pétrole et le gaz constituaient toujours près de 80 % de la consommation totale d’énergie du pays. Contre 70 % au sein de l’Union européenne. En Écosse, les secteurs les plus carbonés restent le transport, l’industrie et l’agriculture.
Côté finances, en 2019, l’extraction des hydrocarbures a représenté pas moins de 9 milliards de livres (10,4 milliards d’euros). Soit 5 % du PIB écossais (en 2018, le Royaume-Uni était le second producteur de pétrole de l’UE). En 2018, Le secteur des énergies fossiles générait 100 000 emplois directs et indirects. Au printemps 2021, Nicola Sturgeon a affirmé qu’un arrêt immédiat des exploitations serait trop coûteux pour « les emplois, les moyens de subsistances et les niveaux de vie » de la côte Nord-Est. Pourtant, c’est bien Londres qui fixe les grandes orientations stratégiques au niveau des hydrocarbures. En mars 2021, le gouvernement a décidé de continuer à délivrer des licences d’exploitation en mer du Nord. Aucun plan de sortie n’a été communiqué.
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Déjà, dans les années 1970, la découverte des champs pétroliers en mer du Nord avait redonné du souffle aux revendications indépendantistes écossaises. Dans les années 2000, les ressources ont commencé à décliner. Et la préoccupation climatique s’est imposée, ouvrant de nouvelles perspectives d’indépendance vis-à-vis du Royaume-Uni. Depuis son arrivée au pouvoir en 2007, le SNP, réélu haut la main en mai 2021, a remplacé dans son discours le mot pétrole par énergies renouvelables.
« L’Écosse est l’un des leaders mondiaux de l’énergie. C’est une bonne chose pour notre présent et notre avenir. Quel qu’il soit. » Voilà ce qu’avait glissé, Nicola Sturgeon en 2018, lors d’une visite d’un parc éolien off shore.
Quelques années plus tôt, le gouvernement nationaliste avait promis que le secteur du renouvelable allait permettre de créer 40 000 emplois. Mais aujourd’hui, les résultats ne sont pas là. En 2019, les énergies renouvelables ont généré seulement 22 000 emplois directs et indirects.
La raison ? En Écosse, la quasi-totalité des éoliennes est aujourd’hui détenue par des entreprises étrangères. Comme EDF qui préfère les faire fabriquer à l’étranger. Nicola Sturgeon a admis que l’Écosse n’avait « pas fait assez » pour exploiter les avantages économiques du renouvelable. Un échec qui pourrait jouer en sa défaveur en cas de nouveau référendum d’indépendance. En mai, un sondage a montré que seuls 48 % des Écossais souhaitaient un divorce avec le reste du Royaume-Uni.
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C’est un maillon clé de la politique énergétique écossaise. En février, l’ex-ministre écossais de l’Énergie Paul Wheelhouse avait expliqué : « Les abondantes ressources de l’Écosse, naturelles, humaines et physiques, permettront l’émergence d’un secteur florissant. » Sa production massive pourrait rapporter près de 25 millions de livres par an (30 millions d’euros) à l’économie écossaise d’ici à 2045. L’exécutif compte sur le développement de l’éolien en mer pour produire, à long terme, cet hydrogène « vert » grâce à l’électrolyse de l’eau.
Perspective plus controversée, il est aussi prévu de produire, à moyen terme, de l’hydrogène « bleu » grâce à la combustion des énergies fossiles. Pour limiter les émissions de CO2 occasionnées, le gouvernement entend développer le captage et le stockage du carbone. Des technologies que les Verts écossais dénoncent comme « n’ayant pas fait leurs preuves et dont la majorité des projets sont liés à l’extraction des hydrocarbures ». En développant l’hydrogène, l’exécutif souhaite décarboner les transports, l’industrie et le chauffage. Pour le moment, une quinzaine de bus sont ainsi alimentés dans la ville d’Aberdeen.
Après le pétrole, l’avenir énergétique de l’Écosse restera-t-il off shore ? C’est le pari qu’ont fait les gouvernements successifs depuis une décennie. Entre 2008 et 2020, les capacités des parcs éoliens off shore pour l’électricité renouvelable ont bondi de 10 mégawatts à 1 gigawatt. D’après l’exécutif, l’éolien en mer devrait même atteindre une puissance multipliée par 10 d’ici à 2030 ! L’énergie des vagues et des marées, elle, a vu ses capacités progresser à une allure beaucoup plus lente.
Mais la cadence pourrait bien s’accélérer dans les années à venir. « Grâce à la force des marées, l’Écosse a le potentiel de fournir 25 % de l’énergie renouvelable en Europe », s’est enthousiasmée la chef de file des Verts Lorna Slater. Les îles Orcades, au nord du pays, sont le théâtre d’un bouillonnement scientifique et expérimental. Le Centre européen des énergies marines (Emec), ouvert en 2004, mène de nombreuses expériences. Objectif : créer de l’électricité via l’énergie houlomotrice et marémotrice. En avril, l’entreprise écossaise Orbital Marine Power a mis en mer une turbine de 72 m de long, dont les pales devraient produire 2 MW. De quoi alimenter 2 000 foyers !
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