Déchiffrer

Empreinte carbone : le grand défi écologique de l’IA verte

Imaginer aujourd’hui notre monde sans intelligence artificielle (IA) devient de plus en plus compliqué tant cette technologie s’immisce chaque jour un peu plus dans notre quotidien. Qu’il s’agisse de recommandations personnalisées sur les plateformes de streaming, de prédictions météorologiques précises, d’assistants virtuels qui nous aident à organiser notre journée ou de ChatGPT.

Pourtant, alors que nous nous émerveillons devant ces prouesses technologiques, un détail, qui n’en est pas un, est souvent laissé de côté : l’impact environnemental de l’IA. Lors de la phase d’apprentissage mais aussi pour pouvoir fournir les réponses souhaitées, chaque intelligence artificielle consomme énormément d’énergie. À l’instar des blockchains et des cryptomonnaies, les calculs intensifs requis pour entraîner et exécuter ces systèmes ne sont pas négligeables.

L’IA : une consommation énergétique élevée

Les intelligences artificielles sont particulièrement énergivores, lors de leur création comme lors de leur utilisation. Crédit : Frame Stock Footage / Shutterstock.

L’empreinte carbone de cette technologie est loin d’être négligeable. Une étude de l’Université de Californie a estimé que sur la seule phase d’entraînement de ChatGPT en l’alimentant en millions de données issues du web a eu un poids énergétique majeur. Elle juge que cela a nécessité 1 287 MWh d’électricité, soit la production de 552 tonnes d’équivalent CO2. Cela correspond à la consommation moyenne d’un peu plus de 123 véhicules diesel par an. C’est aussi comparable à la consommation annuelle d’énergies d’une petite ville.

Une autre étude, réalisée à l’Université du Massachusetts cette fois, a établi que le processus d’apprentissage d’un seul modèle d’IA complexe peut produire autant de dioxyde de carbone que cinq voitures au cours de toute leur durée de vie. En outre, chaque fois que nous faisons une recherche sur Google, que nous demandons à Alexa de jouer notre chanson préférée, ou que nous laissons Netflix choisir notre prochain binge-watching, nous sollicitons l’IA, et donc, nous consommons de l’énergie. Ainsi, derrière le confort et les facilités qu’apporte l’IA dans notre quotidien, se cache une consommation énergétique conséquente, souvent sous-estimée.

Les data centers, symboles du défi écologique de l’IA

Les data centers, indispensables au fonctionnement des IA, sont particulièrement énergivores. Crédit : Gorodenkoff / Shutterstock.

Les data centers sont indispensables pour stocker et traiter les quantités gargantuesques de données que nous générons quotidiennement. Regroupant des milliers de serveurs, ces infrastructures consomment une quantité astronomique d’énergie pour fonctionner et pour être refroidis. Selon le rapport “Clicking Clean” de Greenpeace, la consommation d’énergie des data centers et des réseaux d’information a représenté environ 7 % de la consommation mondiale d’électricité en 2022. Et avec l’accroissement constant du volume des données traitées, cette tendance ne fait que s’accélérer.

De plus, ces centres de données ne sont pas seulement des consommateurs d’énergie, ils sont également producteurs de déchets électroniques. Le renouvellement fréquent des serveurs pour rester à la pointe de la technologie et assurer une performance optimale génère d’énormes quantités de déchets, ajoutant une autre dimension à l’empreinte écologique de l’IA.

L’IA peut-elle être “verte” ?

Le cerveau humain peut faire des choses incroyables avec peu de consommation d’énergie. La grande question est de savoir comment pouvons-nous construire des machines aussi efficientes”, souligne Siva Reddy, chercheur à l’Université de Stanford, le mot de la fin. Malgré le tableau assez sombre que l’on pourrait peindre de l’empreinte écologique de l’IA, il existe des signes encourageants. Des chercheurs et des entreprises du monde entier commencent à se pencher sérieusement sur l’idée d’une IA plus “verte”. Aussi bien pour le bien de la planète pour que celle de leurs portefeuilles. OpenAI, maison-mère de ChatGPT, dépense en effet des fortunes pour supporter le nombre de requêtes envoyées par ses utilisateurs.

Du matériel informatique mieux recyclé permettrait déjà d’alléger en partie l’empreinte carbone des IA. Crédit : Doidam 10 / Shutterstock.

Parmi les solutions envisagées, il y a l’optimisation des algorithmes pour réduire la consommation énergétique ou encore le développement de hardware plus éco-efficients. Par ailleurs, certaines entreprises s’efforcent de rendre leurs data centers plus durables, notamment en recourant à des énergies renouvelables et en mettant en place des systèmes de refroidissement naturels. Il est évident que le chemin vers une IA véritablement verte est encore long, mais ces initiatives montrent que nous avons déjà commencé à le parcourir.

SOUTENEZ WE DEMAIN, SOUTENEZ UNE RÉDACTION INDÉPENDANTE
Inscrivez-vous à notre newsletter hebdomadaire
et abonnez-vous à notre magazine.

Recent Posts

  • Découvrir

Sobriété : j’ai passé un hiver sans me chauffer

Et si on essayait de vivre l’hiver autrement ? Par choix plus que par nécessité,…

1 jour ago
  • Déchiffrer

Face au climat qui se réchauffe, le train pourra-t-il garder son cap ?

Après un an et demi d’arrêt forcé, la liaison ferroviaire Paris-Milan vient enfin de reprendre,…

2 jours ago
  • Ralentir

Sciences attaquées : nouvelle mobilisation Stand Up For Science

Jeudi 3 avril, des milliers de personnes – agents publics, étudiant·es, chercheur·ses et leurs soutiens…

3 jours ago
  • Respirer

Classer les nuages : quand la science et l’art apprivoisent l’insaisissable

Longtemps insaisissables, les nuages fascinent autant les scientifiques que les artistes, tous désireux de capturer…

3 jours ago
  • Ralentir

Feux dans les Landes en 2022 : tirer les leçons d’une catastrophe annoncée

L’été 2022 a laissé une cicatrice profonde dans la forêt des Landes. Entre manque d’anticipation,…

5 jours ago
  • Déchiffrer

David Christian : “La Terre est en train de devenir consciente d’elle-même”

Pour David Christian, historien et fondateur de la Big History, l’humanité franchit un seuil inédit…

6 jours ago