En France, les toits des zones commerciales seront verts ou ne seront pas

Lors de son inauguration, en avril 2014, le centre commercial Beaugrenelle faisait figure d’exception. 7 000 m2 de toiture recouverts de plantes, en plein Paris ! Mais ce qui reste, à ce jour, la plus vaste toiture végétalisée de la capitale, devrait bientôt devenir la norme.

Car désormais, en France, tous les nouveaux bâtiments situés en zone commerciale devront suivre cet exemple. L’amendement adopté jeudi 19 mars, dans le cadre du projet de loi “pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages” (votée mardi 24 mars à l’Assemblée nationale), prévoit l’installation, sur les toitures, de “dispositifs végétalisés” destinées à rafraîchir l’air ou “de production d’énergie renouvelable”.  

Les associations écologiques et les Verts souhaitaient initialement que ces aménagements soient réalisés “sur l’ensemble des toitures” des nouveaux bâtiments. Mais le gouvernement, craignant une mesure trop “contraignante pour les porteurs de projets commerciaux”, a opté pour un compromis : les constructeurs pourront choisir de recouvrir “tout ou une partie” de leurs toits de verdure. Et s’ils ne souhaitent pas y planter de fleurs ou autres plantes, ils peuvent choisir d’y installer des éoliennes ou des panneaux photovoltaïques.

Comme la surface minimale de ces dispositifs n’a pas encore été précisée, les associations sont dans l’attente d’une deuxième lecture, ou d’un décret d’application qui en fixerait les normes et les seuils. “Même si cette question n’a pas encore tranchée, l’amendement en soi est un grand pas”, affirme Christophe Aubel, président d’Humanité et Biodiversité. “En attendant, nous allons continuer à inciter les bâtiments existants, dont la structure supporterait de telles installations sans avoir recours à de coûteux travaux d’investissement, à verdir leurs toits également”.
 

La cinquième façade qui rafraîchit les villes

Si la mesure ne concerne que les zones commerciales, c’est que les toits des bâtiments y sont suffisamment vastes et bas. Les végétaux qu’ils supportent peuvent ainsi refroidir des volumes d’air conséquents, à proximité du sol.

En effet, les toits végétalisés favorisent l’absorption et le stockage de l’eau de pluie. Une eau qui, lors du processus d’évaporation, rafraîchit l’air ambiant, ce qui permet de réduire l’usage de la climatisation à l’intérieur des bâtiments.
 
Mais les toits végétalisés génèrent un autre type d’économies d’énergie pour les bâtiments : cette “cinquième façade” améliore leur isolation, notamment au niveau du dernier étage.

L’apport d’énergies renouvelables, enfin, doit aider à couvrir une grande partie de leur consommation. 

D’après une étude réalisée entre 1998 et 2008 par l’Ifsttar (Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux) et Météo-France, “les toitures végétalisées permettent d’économiser de l’énergie quelle que soit la saison”, avec 23 % de gains en été, voire 28 % si les toitures sont arrosées régulièrement.

En hiver, ces gains de consommation sont plus faibles (4,5 %), mais “les économies d’énergies correspondantes [sont] plus importantes”. Seule limite observée par l’Ifsttar : ces toits verts n’amélioreraient que “peu” le confort thermique à l’intérieur des bâtiments.

Des gains d’ores et déjà observés à Toronto, au Canada, où, depuis 2009, les toits verts sont obligatoires pour toute construction de bâtiments en zone industrielle et résidentielle.

Ces initiatives visent à rendre les villes, que les chercheurs décrivent comme des 

“îlots de chaleur urbains”, plus vivables et moins énergivores. D’autant que la température qui y règne va croissante. Selon une récente étude de l’ONG scientifique Climate Change Central, à l’horizon 2100, New York devrait par exemple connaître les températures de la Floride.

Lara Charmeil
Journaliste à We Demain
@LaraCharmeil

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