Partager la publication "Jobbing : menace ou opportunité pour les travailleurs ?"
Comme de plus en plus de français, peut-être avez-vous déjà eu recours aux plateformes de jobbing pour faire faire vos petits travaux du quotidien ? Digne héritière d’Uber et de l’économie participative, cette nouvelle forme de service fait des émules, mais pour assurer la protection de ses utilisateurs, elle doit s’accompagner d’une évolution des mentalités, des pratiques et de l’encadrement juridique.
Le jobbing, ses origines
Le dictionnaire d’Oxford traduit littéralement “jobbing” par “faire du travail ponctuel ou occasionnel”. Concrètement, le jobbing, c’est la mise en relation pour des petits services entre particuliers : les “offreurs”, en quête de services du quotidien et les « jobbers », à la recherche de nouvelles opportunités économiques. D’après une étude menée en 2018 par Jobijoba, moteur de recherche d’emploi, les jobbers recherchent en priorité des missions de ménage et d’aide à la personne (16 %), de soutien scolaire (16 %) et d’hôte dans l’événementiel ou d’extras (15 %) et les missions de jobbing les plus proposées sont le déménagement-bricolage-jardinage (61 %), le baby-sitting (30 %) et le ménage (4 %).
Cette tendance de fond s’explique de plusieurs manières : la détérioration progressive du marché de l’emploi qui pousse les moins qualifiés à trouver de nouvelles sources de revenus, la simplification des démarches administratives liées à l’entreprenariat (depuis janvier 2018), mais aussi l’accès croissant aux technologies. Selon Bertrand Tournier, cofondateur du site Youpijob, le marché du jobbing s’élèverait aujourd’hui à 48 milliards d’euros et pourrait atteindre les 100 milliards dans dix ans ! De nombreux acteurs se sont d’ailleurs lancés à l’assaut de ce marché : Jobijoba, Frizbiz déployé par Leroy Merlin, Allovoisins, la plateforme d’entre-aide de proximité, et bien d’autres.
Si l’on écoute le discours commercial de ces plateformes, le jobbing facilite le recours au service, développe l’entre-aide entre voisins et créé des emplois. Mais l’avènement de ces plateformes apporte aussi son lot de nouvelles problématiques : la confiance des utilisateurs en cette nouvelle économie, l’encadrement juridique, la protection des usagers, la précarisation de l’emploi, mais aussi l’accès pour tous à ces services dans les meilleures conditions.
La confiance, condition Sine qua none
La mise en relation de ces plateformes de jobbing repose sur le principe de confiance mutuelle. Selon Rachel Botsman, auteur de La montée de la consommation collaborative, la confiance serait même “la monnaie du XXIème siècle”.
Or l’incertitude et l’anonymat lors d’un échange de services attisent les peurs. Pour réduire ces risques, les plateformes mettent peu à peu en place la notation et les avis des acteurs, les assurances, la vérification de l’identité ou le passeport numérique.
Mais le regroupement de ces données utilisateurs n’est pas sans risque, et la neutralité des plateformes pas toujours respectée. Pour pallier à ces problématiques, trois décrets ont été signés (en application aux 1er janvier 2018 et 2019). Les plateformes de jobbing devront désormais préciser les critères de référencement et de classement leur permettant d’orienter les choix des consommateurs : qualité des utilisateurs, montant des frais de mise en relation, modalités de règlement des litiges, etc.
Risque de dérive et encadrement juridique
Qui dit nouveau marché, dit nécessité d’un cadre juridique pour protéger ses utilisateurs, notamment les plus fragiles. Or celui-ci est quasi inexistant pour les plateformes de jobbing qui résument leurs activités à la mise en relation d’une offre et d’une demande, elles ne sont donc pas considérées comment employeurs : les jobbers sont payés à la mission et sont contraints d’opter pour le statut d’indépendant. Mais il est souvent bien plus facile de travailler au noir, d’autant plus que cette pratique est bien ancrée dans la mentalité française.
Pour la petite histoire : le travail au noir trouve son origine au Moyen Age, où le travail était réglementé de telle façon qu’il ne pouvait s’effectuer qu’en journée. Afin d’augmenter leur rentabilité, les employeurs faisaient travailler clandestinement leurs employés, en soirée, à la lueur des bougies. L’expression populaire est restée.
Afin de lutter contre cette pratique, deux avancées majeures ont été mises en place (loi des Finances 2018): les utilisateurs sont exonérés d’impôts jusqu’à 3 000 euros de revenus générés via des plateformes collaboratives, et à partir de 2019, il sera obligatoire pour celles-ci de déclarer les revenus réalisés par leurs utilisateurs.
Alors si vous souhaitez recourir à une plateforme de jobbing, n’oubliez pas de lire attentivement les conditions d’utilisation des plateformes, de vérifier les notes et avis de la personne que vous sélectionnez, de vous assurer, et enfin de déclarer vos revenus issus du jobbing ou de vérifier que la personne que vous employez les déclare.
Bonne mise en relation !
Justine Lécuyer, Consultante Senior Adway.
8 ans d’expérience en Digital dont une mission de 19 mois en tant que chef de projet Marketing pour une Strat-up qui met en relation des particuliers souhaitant faire des travaux et des professionnels du bâtiment. Présente aux débuts de cette Start up digitale, elle a eu la chance de travailler à sa construction, son développement et à sa croissance.