Partager la publication "La Louve, le supermarché parisien dont les clients seront les patrons"
La grande distribution vous donne de l’urticaire ? Imaginez. Vous faites vos courses dans un supermarché d’un genre nouveau. Le personnel, en caisse et en rayons, est à la fois bénévole et gérant de ce magasin. Quand vient le moment de payer, surprise ! La somme de vos emplettes est 15 % à 40 % moins élevée que chez la concurrence. Cette expérience, les Parisiens devraient pouvoir la vivre à partir de fin 2015 au sein de
La Louve, une grande surface autogérée et à but non-lucratif.
Campagne de financement
Mais avant cela, le projet devra récolter 150 000 euros grâce au financement participatif, afin de d’offrir des garanties à Paris Habitat, le bailleur des locaux au sein desquels la Louve aspire à s’installer : un espace flambant neuf de 1 450 m2, situé dans le quartier populaire de la Goutte d’or, au coeur du XVIIIe arrondissement.
À ce jour, le projet a déjà récolté « 4 500 euros sur la plateforme HelloAsso et plus de 50 000 euros de dons », précise Tom Boothe, l’un de ses cofondateurs. Cela, sans compter les financements de la ville de Paris et de la région Île-de-France. Confiant, Tom Booth se donne jusqu’à fin janvier 2015 pour réunir la somme manquante. Le bon démarrage du projet réside aussi dans le nombre de coopérateurs déjà inscrits. « Ils sont déjà 400, s’enthousiasme Tom Boothe, soit 1/7e des coopérateurs nécessaires pour un fonctionnement optimal de notre supermarché… Alors qu’il n’existe pas encore. »
Monnaie d’échange
Pour faire vos courses à la Louve, vous devrez en être l’un des membres. Pour cela, il vous faudra investir au moins 100 euros
(10 euros pour les personnes touchant les minimas sociaux). En échange, vous obtiendrez des parts de cette coopérative, chacune étant valorisée à hauteur de 10 euros. Mais surtout, vous devrez également consacrer trois heures par mois de votre temps au supermarché. Parmi les missions possibles : tenir les caisses, faire l’inventaire, nettoyer les locaux… C’est grâce à ce système coopératif que les marges sur les produits seront limitées, permettant aux producteurs d’être rémunérés à un prix juste.
L’idée de la Louve murit dans l’esprit de ses fondateurs depuis 2010. Le concept est né il y a quarante ans aux États-Unis, dont sont originaires Tom Boothe et l’autre cofondateur Brian Horihan. Ensemble, ils se sont inspirés du plus grand supermarché coopératif américain, implanté à New-York et baptisé Park Slope Food Coop. Ce dernier compte 16 000 membres-coopérateurs et affiche un chiffre annuel au mètre carré de plus de 8 000 euros.
L’un des objectifs phares du projet est de proposer une nouvelle manière de faire ses courses. Alors que pour sept Français sur dix, cette activité équivaut à une « corvée », le cofondateur de la Louve entend offrir une expérience radicalement différente : « Dans notre coopérative alimentaire, nous allons récréer une ambiance de marché. Le but ne sera pas l’enrichissement de quelqu’un, mais l’échange. »
Livre de suggestions
La Louve a d’ores et déjà constitué un groupement d’achat. Dirigé par Brian Horian et rassemblant vingt personnes, il vise à déterminer les articles qui seront mis en vente. Si le client-membre devrait trouver dans ce magasin tous types de produits (des ampoules à la lessive, en passant par le miel, la bière, le café), le détail de leur liste reste à déterminer. « Notre boulot, c’est de demander aux gens ce qu’ils veulent consommer, explique Tom Boothe. Nous répondrons à leurs demandes, sans les moraliser. Car nous ne voulons exclure personne, ni par le prix ni par le produit. » À terme, les clients-coopérateurs auront à disposition un livre de suggestions, afin d’orienter la politique d’achat de la coopérative.
Si elle réussit son pari, la Louve table sur un chiffre d’affaire annuel de 4 millions d’euros durant ses premières années. Une somme qui serait réinvestie dans les équipements et afin d’embaucher cinq salariés. À plus long terme, l’entreprise envisage même de financer d’autres coopératives. « C’est l’un de nos rêves », confie Tom Boothe.
Thomas Masson Journaliste We Demain Twitter :
@Alter_Egaux