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Mpox : tout ce qu’il faut savoir sur l’épidémie, urgence sanitaire mondiale

L’Organisation mondiale de la santé tire la sonnette d’alarme après une recrudescence inquiétante de la variole simienne (mpox) en République démocratique du Congo.

Le 17/08/2024 par The Conversation
Vue au microscope du virus de la variole du singe. Crédit : kontekbrothers / iStock.
Vue au microscope du virus de la variole du singe. Crédit : kontekbrothers / iStock.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré la variole simienne, ou mpox pour « monkeypox », comme une urgence de santé publique de portée internationale, après l’augmentation du nombre de cas en République démocratique du Congo et la possibilité d’une nouvelle propagation.

Cette déclaration déclenche une réponse internationale coordonnée suite à un événement extraordinaire et la mobilisation de ressources, telles que des vaccins et des tests de diagnostic, pour enrayer la propagation de cette maladie infectieuse. Mais l’OMS n’a pas déclaré que le mpox était une pandémie. Les mesures qu’elle a déclenchées visent plutôt à empêcher qu’elle ne le devienne.

Qu’est-ce qui a déclenché cette dernière alerte ?

Le mpox, autrefois connu sous le nom de variole du singe, est une infection virale étroitement liée à la variole. Les premiers symptômes comprennent de la fièvre, des maux de tête, un gonflement des ganglions lymphatiques et des douleurs musculaires. Une éruption cutanée typique suit, principalement sur le visage, les mains et les pieds.

La propagation du mpox à travers certains pays africains a conduit les Centres africains de contrôle et de prévention des maladies à déclarer en début de semaine le mpox comme une urgence de santé publique continentale. C’est la première fois que l’organisation émet une telle alerte depuis sa création en 2017. La situation en République démocratique du Congo, en Afrique centrale, est particulièrement préoccupante depuis plus d’un an.

Deux types de mpox coexistants, dont un particulièrement dangereux

On distingue deux principaux types du virus, ou clades, de mpox. Le clade 2, originaire d’Afrique de l’Ouest, est moins grave. Son taux de létalité peut atteindre 1 % (une personne sur 100 en meurt). Le clade 1, originaire d’Afrique centrale, présente quant à lui un taux de létalité allant jusqu’à 10 % (jusqu’à un décès sur dix). À titre de comparaison, le taux de mortalité est de 0,7 % pour le variant Omicron du SRAS-CoV-2, le virus responsable du Covid-19. La République démocratique du Congo connaît d’importantes épidémies du clade 1 du mpox, le plus mortel.

Le mpox est endémique dans certaines régions d’Afrique centrale et occidentale, où le virus existe chez les animaux et peut se transmettre à l’homme. Les flambées augmentent, avec une propagation interhumaine plus importante, depuis 2017.

Cela est dû en partie à de très faibles niveaux d’immunité contre le virus mpox, qui est apparenté au virus de la variole. La vaccination de masse contre la variole a cessé il y a plus de 40 ans à l’échelle mondiale, ce qui fait que les populations actuelles n’ont qu’une immunité minimale contre le mpox.

La désignation de l’OMS annoncée cette semaine concerne le clade 1. Non seulement ce clade a un taux de mortalité plus élevé, mais il présente de nouvelles mutations qui favorisent la propagation interhumaine. Ces changements, ainsi que l’absence d’immunité mondiale contre la variole, rendent la population mondiale vulnérable au virus.

Il y a deux épidémies différentes de mpox

En 2022, une épidémie de mpox a touché les pays où la maladie n’était pas endémique, y compris hors d’Afrique. Il s’agissait d’un variant du clade 2 originaire du Nigéria, appelé clade 2b. Ce variant se transmettait par voie sexuelle, touchait principalement les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes et présentait un faible taux de létalité.

Cette épidémie a atteint son apogée en 2022, quand des vaccins ont été mis à la disposition des personnes à risque dans les pays à revenu élevé, mais il y a eu une recrudescence en 2024.

Dans le même temps, d’importantes épidémies de clade 1 se produisaient en République démocratique du Congo, mais on y prêtait beaucoup moins attention.

Les vaccins n’y étaient pas disponibles, même en 2023, année où l’on a recensé 14 626 cas et 654 décès. La mortalité était de 4,5 %, et plus élevée chez les enfants.

monkeypox mpox
Une chercheuse de laboratoire portant un EPI tenant un tube à essai étiqueté Monkeypox. Crédit : monkeybusinessimages / iStock.

Les enfants particulièrement vulnérables au mpox

En réalité, la plupart des cas et des décès en République démocratique du Congo ont été des enfants. Cela signifie que la plupart des transmissions n’y sont pas sexuelles et qu’elles ont probablement eu lieu par contact étroit ou par aérosols respiratoires.

Cependant, en 2023, une flambée dans une région de l’est de la République démocratique du Congo, le Sud-Kivu, où la maladie n’était pas endémique, s’est avérée être causée par un mode de transmission par voie sexuelle, ce qui indique qu’il y a dans ce pays plus d’une épidémie et différents modes de transmission.

À la mi-2024, le pays comptait déjà plus de cas que pendant toute l’année 2023 – plus de 15 600 cas et 537 décès.

La capacité de dépistage est faible en République démocratique du Congo, la plupart des cas ne sont pas confirmés par des tests de laboratoire, et les données dont nous disposons proviennent d’un petit échantillon de séquences génomiques de la région de Kamituga, dans le Sud-Kivu.

Ces séquences montrent des mutations du virus du clade 1 vers septembre 2023, vers une variante appelée clade 1b, qui est plus facilement transmissible d’une personne à l’autre. Nous ne disposons pas de beaucoup de données pour comparer ces virus avec les virus à l’origine des cas dans le reste du pays.

Le mpox se propage à l’échelle internationale

Au cours du mois dernier, le virus s’est propagé à des pays qui partagent une frontière avec la République démocratique du Congo, en l’occurrence le Rwanda et le Burundi. Il s’est également propagé à d’autres pays d’Afrique de l’Est, tels que le Kenya et l’Ouganda. Aucun de ces pays n’avait connu de cas de variole auparavant.

Dans un monde interconnecté et en mouvement, les cas peuvent se propager à d’autres continents, comme cela s’est produit en 2018 du Nigéria au Royaume-Uni et à d’autres pays.

Quelques cas liés à des voyages entre 2018 et 2019 pourraient être à l’origine de la grande épidémie de clade 2b ayant touché plusieurs pays 2022.

Nous avons des vaccins, mais pas là où ils sont nécessaires

Le virus du mpox et le virus de la variole étant apparentés (ce sont tous deux des orthopoxvirus), les vaccins antivarioliques offrent une protection contre le mpox. Ces vaccins ont été utilisés pour endiguer l’épidémie de clade 2b de 2022.

Cependant, la majeure partie de la population mondiale n’a jamais été vaccinée et n’est pas immunisée contre le mpox.

Le nouveau vaccin (appelé Jynneos dans certains pays et Imvamune ou Imvanex dans d’autres) est efficace. Toutefois, les stocks sont limités et le vaccin est rare en République démocratique du Congo.

La classement par l’OMS du mpox comme “urgence de santé publique de portée internationale” contribuera à mobiliser les vaccins là où ils sont nécessaires. Les Centres africains de contrôle des maladies avaient déjà entamé des négociations pour obtenir 200 000 doses de vaccin, ce qui représente une fraction de ce qui est nécessaire pour contrôler l’épidémie en République démocratique du Congo.

Que va-t-il se passer maintenant ?

En fin de compte, une grave épidémie survenant n’importe où dans le monde nous concerne tous, car elle peut se propager à l’échelle mondiale par le biais des voyages, comme nous l’avons vu avec la pandémie de Covid-19.

Le contrôle à la source est la meilleure mesure, et la dernière déclaration de l’OMS aidera à mobiliser les ressources nécessaires.

La surveillance de la propagation de cette forme plus grave du mpox est également essentielle, sachant que de nombreux pays n’ont pas la capacité d’effectuer des tests à grande échelle. Il faudra donc compter sur les cas présumés, basés sur une définition clinique, pour suivre l’évolution de l’épidémie.

La veille épidémiologique open source – comme l’utilisation de l’IA pour surveiller les tendances en matière d’éruption cutanée et de fièvre – peut également être utilisée comme système d’alerte précoce dans les pays où les systèmes de santé sont faibles ou où la déclaration des cas est tardive.

Une maladie qui provoque des éruptions cutanées, comme la varicelle

variole du singe
Exemple d’éruption cutanée provoquée par la variole du singe. Crédit : MarioGuti / iStock.

Une autre difficulté est que 20 à 30 % des personnes atteintes de mpox peuvent simultanément avoir la varicelle, une infection sans rapport qui provoque également une éruption cutanée. Par conséquent, un diagnostic initial de varicelle (qui est plus facile à tester) n’exclut pas la présence de la variole.

Une communication efficace et la lutte contre le rejet des mesures de santé publique et la désinformation sont également essentielles. Nous avons vu à quel point cela était important lors de la pandémie de Covid-19.

Désormais, l’OMS coordonnera la réponse mondiale au mpox, en mettant l’accent sur l’équité dans la prévention de la maladie et l’accès aux diagnostics et aux vaccins. Il appartient à chaque pays de faire de son mieux pour se conformer au Règlement sanitaire international et aux protocoles relatifs à la gestion d’une telle urgence mondiale.

À propos de l’autrice : C Raina MacIntyre. Professor of Global Biosecurity, NHMRC L3 Research Fellow, Head, Biosecurity Program, Kirby Institute, UNSW Sydney.
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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