Partager la publication "Nouveau radar piéton : La liberté, un outil au service de la sécurité"
Testé actuellement dans le sud-est de la France, ce “radar piéton” devrait être mis en service début janvier à Calais (sans doute pour éviter que la circulation n’y ressemble à une “jungle”…). Cette information a priori mineure est l’occasion de relancer le nécessaire débat entre sécurité et liberté, entre sanction et prévention, entre culpabilisation et responsabilisation. Entre défiance et confiance.
Principe de précaution…
Elle s’ajoute à une multitude d’autres, des mentions obligatoires sur les paquets de cigarettes ou les bouteilles d’alcool, rappelant que “fumer tue” et que l’alcool est “à consommer avec modération” à la révision générale des normes imposées aux ascenseurs, en passant par les dispositions de protection concernant les piscines privées, ou les obligations faites aux écoles qui ont fait diminuer drastiquement le nombre des “classes vertes” proposées aux enfants.
Tous ces interdits encombrent la vie quotidienne des gens. Ils compliquent le fonctionnement des entreprises, même s’ils font parfois la fortune de certains prestataires, comme celle des huissiers ou avocats. Mais les “sécuritaires” ajouteront que des accidents ont ainsi pu être évités, des vies ont été sauvées, citant en exemple la circulation routière.
… ou de responsabilisation
Ceux-là verront surtout dans ce projet, comme dans beaucoup d’autres, une nouvelle illustration du manque de confiance entre les pouvoirs publics et les citoyens.
Ils reconnaîtront que des vies (nombreuses) ont été sauvées par les mesures de la prévention routière (qu’il faudrait peut-être rebaptiser “surveillance routière”). Ils seront beaucoup plus sceptiques sur le nombre de drames évités par les clôtures des piscines ou les nouvelles normes imposées aux ascenseurs.
Rétablir la confiance plutôt qu’alimenter la défiance
Des études montrent qu’il l’est aussi sur le plan économique, car il conduit à de meilleurs résultats, pour un coût bien inférieur. On le constate notamment dans les entreprises qui donnent plus de liberté et d’autonomie à leurs collaborateurs ; elles obtiennent une “productivité” plus élevée que celles qui choisissent la contrainte et la surveillance. Sans avoir à supporter les frais matériels que cela engendre, ni les dégâts humains (stress, maladie, mal-être, burnout…).
Ce constat est également vérifié à l’échelle des nations. Le Danemark en est un bon exemple : la confiance accordée a priori à chacun se traduit par des comportements plus responsables. La délinquance y est ainsi inférieure à celle que l’on connaît chez nous et les relations sociales bien plus apaisées. Les entreprises y sont aussi plus performantes, avec des taux de satisfaction supérieurs et des taux d’absentéisme inférieurs.
Au total, le sentiment de “bonheur” y est maximal ; le Danemark détient en la matière un record mondial, tandis que la France est minée par un sentiment récurrent de déclin, de “moins bien”, et conserve depuis des années son record peu enviable de pessimisme. Cette crainte de l’avenir explique largement sa préférence pour le statu quo et sa difficulté à se transformer.
Une question de culture, pas de nature
Ce sont ainsi les rôles et les influences du milieu familial, des médias et de tout l’environnement humain, social ou politique qui sont en cause. Il ne s’agit pas d’une question de nature, mais de culture.
Au contraire, l’idéologie différencie, oppose et crée des clivages parfois irréconciliables. La plupart des programmes proposés aujourd’hui prennent en compte un supposé besoin irrépressible de confort et de sécurité de la population française. Ces besoins existent dans certains domaines, à l’égard notamment de la menace terroriste, face à laquelle on ne saurait se montrer naïf, angélique, et jouer les “bisounours”.
Mais ils se manifestent de façon très différente dans d’autres domaines : environnement ; transport ; éducation ; logement… Les Français sont potentiellement prêts à participer à la résolution de ces problèmes, par leur action personnelle. A condition qu’ils aient le sentiment qu’on leur fait confiance, et qu’ils peuvent faire confiance aux autres, les deux attitudes étant généralement très corrélées.
Privilégier la responsabilité
Le développement de l’immigration et celui, concomitant, de l’extrême droite ont créé un climat de défiance dans les relations entre les habitants. La montée récente des inégalités l’a étendu aux groupes sociaux, favorisant le communautarisme.
Il est temps de se demander maintenant si l’on ne pourrait pas privilégier l’autonomie et la responsabilité, au service de l’individu comme de la collectivité. Le choix de la confiance n’est pas antinomique avec la demande de sécurité ; il est au contraire un moyen de l’améliorer. Il n’est pas non plus lié à une sensibilité politique. Le temps où la liberté était considérée comme une attente de droite et la sécurité comme une demande de gauche est largement révolu. On peut et on doit aujourd’hui assurer la sécurité en améliorant la liberté. Celle-ci est la condition première du bien-être social et de l’efficacité économique que chacun des partis “raisonnables” appelle de ses vœux. Comme la très grande majorité de leurs électeurs.
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