Partager la publication "Pour le climat, résistons à la climatisation"
Un vent frais et régulier soufflait entre les gratte-ciel vitrés et climatisés et s’engouffrait en rafraîchissant toutes celles et ceux venus se réfugier sur cette oasis “en béton aéré” en abandonnant leurs appartements surchauffés.
Oui, Paris a étouffé. Comme toutes les grandes métropoles de France et de Navarre. Comme toutes les grandes agglomérations européennes, à l’exception notoire de Lisbonne, surprise d’une telle clémence, lors de cet épisode brûlant.
Il va falloir s’habituer à ces nouveaux épisodes caniculaires. Mais il va falloir le faire intelligemment, sans suivre le réflexe classique et potentiellement catastrophique du “tout climatisation”.
Non au “tout climatiseur”
Une pointe de consommation “d’électricité estivale” a été atteinte le 27 juin 2019, avec 59 436 mégawatt. Pour comparaison, le pic hivernal a été de 83000 MW le 18 janvier 2019.
Pour chaque degré au-dessus des températures normales de saison, les équipes de RTE – Réseau de transport d’électricité – observent une hausse de consommation équivalente à la consommation – en électricité – de la Ville de Bordeaux.
L’Europe a su, jusqu’ici, merveilleusement résister à la tentation du tout climatiseur.
Avec moins de 5 % de logements équipés de climatiseurs contre 85 % aux USA et encore probablement davantage en Asie (la généralisation de la climatisation augmenterait la température moyenne des Villes de plus de 2°C l’été), la France fait bonne figure.
Sûrement est-ce dû aux marges opérées par les importateurs et distributeurs, qui revendent en France 500 euros des climatiseurs achetés 50 euros en Chine ou en Corée du Sud. Mais, le tsunami de la climatisation s’annonce…
La situation n’est pas durable
1,6 milliard, c’est le nombre de climatiseurs sur la planète. Auxquels il faut ajouter ceux des 100 millions de véhicules neufs vendus chaque année avec cet accessoire dorénavant indispensable. Est-ce durable ? Non.
Les quartiers les plus chauds de la Capitale sont aussi ceux avec le plus grand nombre de clims et de SUV rutilants neufs, contribuant à l’élévation locale de la température. Soyons clair : il vaut mieux prendre le frais à Ménilmontant que sortir Avenue Rapp, et ce n’est pas qu’une question d’altitude relative.
Apaisons et végétalisons nos villes
“Canicula”, tu es là et bien là, pour un long moment. Réveillés trop tard, incapables d’avancer sous le feu croisé des lobbies de l’industrie pétrolière et automobile qui participent à cette situation, nous sommes confrontés à un problème qui ne pourra que s’aggraver.
Isolons nos bâtiments
Depuis que Tokyo a éradiqué le diesel – permettant la diminution de moitié de la pollution aux particules fines – les attaques cardiaques et les journées d’hospitalisations ont fortement diminué, comme ont reculé les pneumopathies et autres pathologies liées à la pollution.
Mais Tokyo, c’est deux degrés de trop à cause de la climatisation. Il faut donc aussi isoler autrement nos habitations, nos combles et toitures avec des matières naturelles, en oubliant le polystyrène qui est totalement inefficace lors des fortes chaleurs.
La loi Malraux a permis la rénovation régulière des façades d’immeubles dans les villes noircies à l’époque par le charbon, comme c’est le cas aujourd’hui avec le diesel. Puisque le diesel sera prescrit dès 2024 à Paris, il serait intéressant de prescrire un moratoire pour le nettoyage des façades et de consacrer obligatoirement ces dépenses sur l’isolation thermique des bâtiments.
Nous devons également former nos architectes, nos urbanistes et nos artisans sur l’isolation thermique des bâtiments pour résister aux assauts du climat que nous avons su, hélas, faire dégénérer. Il faudra construire autrement des bâtiments qu’il faut aujourd’hui refroidir en réchauffant l’air extérieur par la climatisation qui accroît l’effet de serre. Tenir compte de l’exposition des bâtisses est une nécessité écologique.
Pour rappel, nous devons laisser une planète vivante à nos enfants.
A propos de l’auteur
Aujourd’hui, il est Conseiller auprès de la Maire de Paris, chargé du Développement durable, de l’Environnement, du Plan climat et de l’Économie circulaire.
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