Partager la publication "Valérie Masson-Delmotte : ce qu’a dit la climatologue aux ministres"
Ce jeudi 1er septembre, la climatologue Valérie Masson-Delmotte a publié un thread sur Twitter pour détailler le contenu de sa leçon de climatologie donnée aux ministres lors du séminaire gouvernemental consacré à l’écologie qui s’est tenu à l’Elysée ce mercredi 31 août 2022. Durant sa présentation, la coprésidente du groupe 1 du GIEC a été claire : “La France n’est pas prête aux événements actuels et d’autant plus ceux à venir.” Après l’été caniculaire et les multiples vagues de chaleur que l’Hexagone a connues, le constat ne fait aucun doute.
C’est par le biais d’une vingtaine de slides que Valérie Masson-Delmotte a voulu faire passer un message majeur : l’été que l’on vient de vivre est “emblématique des conséquences du changement climatique qui s’aggravent”. Évoquant un “été le plus chaud derrière 2003” et une sécheresse “plus généralisée qu’en 1976 et 2003”, elle a aussi souligné la multiplication des feux de forêt et la hausse des températures en Méditerranée sans oublier le fort recul des glaciers depuis le début des fortes chaleurs en juin.
L’été 2022, conséquence directe du réchauffement climatique
“L’été 2022 en France a été emblématique de conséquences du changement climatique et s’inscrit dans une augmentation de la fréquence et de l’intensité des extrêmes chauds sur terre comme en mer, des sécheresses, avec des effets composites propices aux incendies et, en montagne, un recul de l’enneigement, des glaciers et le dégel des sols gelés.”, indique la climatologue.
Une hausse des gaz à effet de serre 100 % liée à l’activité humaine
Valérie Masson-Delmotte a ensuite insisté sur la hausse de la présence des gaz à effet de serre dans l’atmosphère et leurs conséquences. “Les émissions mondiales de gaz à effet de serre ont atteint un niveau record au cours de la dernière décennie (et sont reparties à la hausse après la forte baisse et le rebond liés à la pandémie de COVID19). Ce sont les émissions de CO2 (charbon, pétrole, gaz fossile et déforestation) et de méthane (CH4, tirées à la hausse par les fuites de gaz, élevage de ruminants) qui pèsent le plus sur l’augmentation de l’effet de serre.”
Et, “malgré une action pour le climat qui monte en puissance”, elle insiste sur le fait que la hausse des gaz à effet de serre, et plus globalement le réchauffement climatique actuel, est totalement le fait de l’activité humaine. “Aucun facteur naturel n’explique l’accumulation de chaleur dans le climat et les changements observés.” Ce réchauffement a déjà atteint +1,7 °C en France et +1,1 °C en moyenne dans le monde.
Les pays industrialisés comme la France, premiers fautifs
Elle a également profité de sa présentation pour rappeler que les pays industrialisés, comme la France, sont les premiers fautifs. “Dans le monde, 10 % des personnes émettent 40 % des gaz à effet de serre mondiales, tandis que les 50 % les plus pauvres en sont responsables que de moins de 15 % des émissions, et sont souvent particulièrement vulnérables aux impacts climatiques.” En outre, “L’empreinte carbone d’une personne en France est d’environ 9 tonnes par an, largement au-dessus de la moyenne mondiale (avec environ 40 % liée aux importations).”
Des actions qui ne sont pas sans conséquences majeures. “Chaque incrément de réchauffement supplémentaire intensifie des risques majeurs, dans chaque région du monde” et “intensifie la dégradation des écosystèmes et les risques de perte de biodiversité”, met-elle en garde les ministres.
“Chaque incrément de réchauffement supplémentaire intensifie des risques majeurs, dans chaque région du monde”
Valérie Masson-Delmotte
“Chaque décision compte”
Face à ce constat, Valérie Masson-Delmotte a tenu à rappeler l’urgence climatique actuelle. “C’est le moment d’agir, chaque décision compte.” Pour chaque secteur, des leviers d’actions sont disponibles et préconisés par le GIEC, notamment. Elle souligne, en outre, l’importance d’adopter “des styles de vie sobres en carbone“.
Son inquiétude vient aussi du fait de l’absence de prises de décision, ou de décisions trop timides. “Les écarts se creusent entre ce qui est réellement mis en place (souvent limité, réactif) et les transformations nécessaires pour renforcer la résilience à moyen et long terme“, regrette la climatologue. Surtout que “dans tous les scénarios examinés, il faut s’attendre à atteindre +1,5 °C (en moyenne sur 20 ans) dans les prochains 20 ans, et il est critique de s’y préparer pour limiter les risques (et d’aider les plus fragiles à le faire).”
Valérie Masson-Delmotte se veut malgré tout encore optimiste. “Il reste une étroite fenêtre d’opportunité pour limiter la casse, mais elle se referme rapidement – chaque année d’inaction va exacerber les risques à venir, avec des menaces croissantes pour le bien-être et la santé planétaire.” Bref, c’est le moment où jamais. En espérant que cette présentation aura eu un écho auprès des personnes présentes lors du séminaire gouvernemental.
L’ensemble des slides présentées par Valérie Masson-Delmotte sont disponibles en téléchargement ici : https://sharebox.lsce.ipsl.fr/index.php/s/ARrA7UaYSk3MNit