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Written by 16 h 33 min Déchiffrer, Societe-Economie

Xavier Casiot : “L’hydroélectricité est une réponse clé à la décarbonation du système électrique français”

En France, les petites centrales hydroélectriques – elles sont environ 2 300 – jouent un rôle crucial dans la transition énergétique. Xavier Casiot, président de France Hydro Électricité, nous éclaire sur les enjeux et perspectives de ce secteur.

Le 28/11/2024 par Florence Santrot
barrage de rivière jura
Ce barrage de rivière dans le Jura, établie sur l'Ain, fait partie des petites centrales hydroélectriques du maillage français. Crédit : Sloot / iStock.
Ce barrage de rivière dans le Jura, établie sur l'Ain, fait partie des petites centrales hydroélectriques du maillage français. Crédit : Sloot / iStock.

Avec une production annuelle de 54,8 TWh en 2023, l’hydroélectricité représente environ 12 % du mix énergétique français, se plaçant ainsi comme la deuxième source d’énergie renouvelable après l’éolien. Ce rôle est porté en partie par les petites centrales hydroélectriques : un peu plus de 2300 installations réparties sur le territoire sur 250 000 km de cours d’eau. Elles produisent à elles seules 7 TWh par an. Ces infrastructures, souvent méconnues, participent à la transition énergétique en garantissant une électricité décarbonée, locale et flexible, indispensable à l’équilibre du réseau.

Au cœur de cette dynamique, l’association France Hydro Électricité fédère 750 centrales et près de 200 fournisseurs d’énergie. Cette organisation, présidée par Xavier Casiot, défend les intérêts des petites centrales face aux enjeux techniques, climatiques et réglementaires. Fort d’une longue expérience dans le secteur, Xavier Casiot explique à WE DEMAIN les principaux enjeux et défis auxquels fait face son secteur dans la transition énergétique et comment il aborde la question de la transition énergétique.

À lire aussi : Reportage : comment fonctionne une centrale hydroélectrique

WE DEMAIN : Quel est le poids des petites centrales hydroélectriques dans le mix énergétique ?

Xavier Casiot : Ces petites centrales produisent entre 6 et 7 TWh par an, soit près de 10 % de l’énergie hydraulique française, qui totalise un peu plus de 50 TWh. Cela correspond à la consommation électrique de 1,3 millions de Français. En termes de capacité installée, elles représentent environ 10 % du parc hydroélectrique global.

Ces installations assurent une production locale et flexible, contribuant à la fois à l’équilibre du réseau électrique et à la décarbonation. Elles fonctionnent essentiellement au fil de l’eau, c’est-à-dire sans barrage de retenue ou réservoir. Ces petites centrales peuvent donc fonctionner en permanence et fournir une énergie en continu. Cela qui en fait une excellente source d’énergie renouvelable en complément d’autres, au fonctionnement intermittent.

Comment ces installations s’adaptent-elles aux enjeux du dérèglement climatique ?

Les petites centrales s’adaptent de plusieurs manières. Nous travaillons sur l’efficacité des équipements, en anticipant les évolutions climatiques comme les crues ou les sécheresses. Le vrai défi, ce sont les inondations et donc un afflux d’eau soudain.

Nous tâchons d’équiper nos retenues afin qu’elles puissent évacuer les crues et aider effectivement aussi à l’aménagement du territoire au global. Parce qu’il y a beaucoup de populations qui vivent sur le long des cours d’eau. En plus de fournir de l’électricité, elles jouent donc aussi un rôle essentiel dans l’aménagement et la gestion des cours d’eau.

Quel est l’impact des centrales hydroélectriques sur la biodiversité ?

Contrairement à certaines idées reçues, les petites centrales hydroélectriques créent souvent de la biodiversité. Bien sûr, lors de la création, les travaux vont dégrader l’environnement alentour mais c’est temporaire. Cela aurait tendance à la renforcer. La raison est assez simple : quand vous avez un morceau de cours d’eau avec un certain niveau et une certaine typologie de biodiversité, quand vous créez un site, cela ajoute un nouveau faciès d’habitat aquatique que la nature peut coloniser.

Le plus gros enjeu est au niveau piscicole et, en la matière, on a plusieurs centaines d’années d’expérience. Que ce soit avec les passes à poissons, avec les dévalaisons, etc. In fine, l’aménagement d’un cours d’eau modifie localement les habitats aquatiques, favorisant la colonisation par de nouvelles espèces. Mais cela nécessite de rester très vigilant.

Le parc de petites centrales est-il en bon état ? Y a-t-il des projets en cours ?

Globalement, le parc est bien entretenu, grâce à un cadre réglementaire exigeant. Nous avons aussi un marché dynamique, avec environ 40 nouvelles centrales construites chaque année. Cela reste modeste comparé à d’autres énergies renouvelables, mais ce sont des projets de long terme, exigeants techniquement et écologiquement.

Quelles innovations marquent aujourd’hui le secteur de l’hydroélectricité ?

Elles sont nombreuses ! Que ce soit sur les turbines, la gestion automatisée ou les prévisions météorologiques, les progrès sont constants. Nos centrales modernes atteignent des rendements impressionnants, parfois jusqu’à 98 % et en moyenne à 75 %, un record parmi les énergies renouvelables. Ces innovations permettent à la petite hydroélectricité de rester compétitive et durable.

Selon vous, quel est l’avenir de cette filière dans le mix énergétique ?

Je pense que l’hydroélectricité jouera un rôle croissant dans la production électrique en France. Notamment pour répondre aux besoins de flexibilité du réseau face à la montée en puissance des énergies intermittentes comme le solaire et l’éolien. Plus il y aura d’énergies renouvelables de ce type sur les réseaux électriques, plus on aura besoin d’hydraulique pour pouvoir gérer les pics de production, de consommation, etc. L’hydraulique permettra d’équilibrer le système électrique. Son développement est donc essentiel pour garantir une production décarbonée et résiliente.

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