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Zéro émission nette : comment vraiment décarboner et faire une différence en 2050 ?

Se projeter en 2050, c’est se projeter dans le dérèglement climatique et ses effets. Parler de 2050, c’est aussi se poser la question de l’objectif neutralité carbone. À cette date, l’Europe vise le zéro émission nette de gaz à effet de serre (GES) pour tous les pays membres. Mission impossible ? L’entrepreneur Jean-Baptiste Rudelle se veut néanmoins relativement optimiste. L’ancien PDG de Criteo est le co-fondateur de The Galion Project, think tank des entrepreneur.e.s de la Tech qui s’intéressent à l’impact économique, social et environnemental de leurs entreprises. Et il s’intéresse de près à la décarbonation.

Jean-Baptiste Rudelle s’est exprimé lors de notre cycle de conférences we are_ DEMAIN sur le bilan carbone actuel et les pistes pour tenir notre trajectoire de décarbonation à horizon 2050, que ce soit au niveau de la France, de l’Europe ou du monde. Il s’est efforcé de nous expliquer comment il est possible de vraiment décarboner afin de faire une différence en 2050. Un défi hors de notre portée ? Pas si sûr… à condition de mener une politique volontariste. Et nous avons tout à y gagner.

3 grands coupables au réchauffement climatique

Commençons par le commencement : “Nous avons enregistré une énorme croissance de l’utilisation des énergies fossiles ces derniers siècles. Une augmentation concomitante avec la hausse des gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Réduire cela va être très compliqué, c’est certain”, souligne Jean-Baptiste Rudelle. Et de pointer les trois grands coupables du réchauffement climatique le charbon, le pétrole et le gaz. Ce dernier, souvent perçu comme “presque propre” contribue au contraire significativement aux émissions de GES. E t’est donc l’usage en priorité de ces trois énergies fossiles qu’il faut réduire.

Finalement, si on recherche des énergies très peu polluantes, seules les énergies renouvelables permettent de tenir une trajectoire de décarbonation pour 2050. Certes, pour fabriquer des panneaux solaires ou des éoliennes, il faut encore des émissions de CO2, mais cela reste nettement inférieures à celles des combustibles fossiles. “La bonne nouvelle, c’est qu’en 20 ans, nous avons réduit le coût de fabrication du photovoltaïque par dix. C’était inespéré.” Autre “bonne” nouvelle : “Climatiser nécessite bien moins d’énergie que de réchauffer. C’est de l’ordre d’un facteur 3. C’est toujours ça de gagné, même si on sait tous qu’une hausse de 3 ou 4 degrés aura des conséquences dramatiques.”

“En 20 ans, nous avons réduit le coût de fabrication du photovoltaïque par dix.”

Jean-Baptiste Rudelle

L’Europe en pointe dans la décarbonation

“Sur les 30 dernières années, l’Europe a déjà fait beaucoup d’efforts pour décarboner malgré tout ce qu’on peut en dire, explique Jean-Baptiste Rudelle. Les 27 membres ont réussi à réduire de presque 30 % leurs émissions de GES, avec une nette accélération de la trajectoire sur les dix dernières années. Parallèlement, sur ces 30 dernières années, le monde à l’échelle globale suit une trajectoire opposée et a augmenté de +63 % ses émissions.”

Mais avant de se féliciter des efforts réalisés, certes très louables, il est néanmoins utile de rappeler que l’Europe a été un des tout premiers contributeurs aux émissions de gaz à effet de serre depuis la révolution industrielle (fin XVIIIe, début XIXe). “Nous avons une responsabilité historique”, rappelle Jean-Baptiste Rudelle.

Un processus de plus en plus onéreux

Plus nous allons avancer vers le zéro émission nette, plus le processus va coûter cher car plus il sera complexe. Il sera donc très difficile d’atteindre cet objectif en 2050. Pour Jean-Baptiste Rudelle, une des solutions serait d’investir dans la trajectoire zéro émission nette à l’étranger. “Tous ces milliards pour décarboner les dernières tonnes de carbone en Europe, ce serait beaucoup plus rationnel d’aller les les injecter dans les pays développement. De dire par exemple, on va remplacer les centrales à charbon en Inde par des panneaux solaires etc. Cela aurait un impact sur les émissions globales plus important pour chaque euro dépensé. Mais ça, politiquement, en Europe, c’est difficile à accepter…”

“Il faut aussi avoir en tête que plus l’Europe décarbone, plus son poids dans les émissions de GES globales se réduit. En 1990, nous représentions 17 % des émissions, en 2021, 7,5 % et en 2050, nous ne devrions plus peser que pour 2,8 %.”

Décarboner, une nécessité morale ? Pas seulement…

“Il n’y a pas que l’argument moral qui doit peser dans la balance quand il s’agit de réduire nos émissions de CO2. Nous y avons aussi tout intérêt pour deux raisons majeures. D’abord, gagner notre indépendance énergétique. Et avec la guerre en Ukraine, il est apparu clairement que c’était crucial. Ensuite, parce que ces efforts menés, ces milliards d’euros investis peut aussi nous conférer un leadership technologique en la matière”, insiste Jean-Baptiste Rudelle.

Si, à l’heure actuelle, l’essentiel de l’Asie n’a pas pris le virage de la transition écologique à la hauteur des enjeux, il est certain que cela va évoluer dans les décennies à venir. L’Europe a donc tout intérêt à être très en avance en la matière pour, dans le futur, bénéficier d’un avantage compétitif. Nous aurons établi un éventail d’outils efficaces – testés et approuvés – et de technologies que nous pourrons proposer aux pays en demande.

“Toutes les technologies à impact pour 2050 existent déjà”

“Il faut comprendre que toutes les technologiques qui auront un impact en 2050 sont déjà sur le marché. Elles existent déjà. Celles qui sont dans les laboratoires aujourd’hui n’arriveront à maturité que pour la seconde partie du siècle”, prévient-il. Les usines osmotiques, la fusion nucléaire… ce n’est pas pour le prochain quart de siècle.

Alors comment faire vraiment la différence en 2050 pour tendre le plus possible vers le zéro émission nette ? En continuant à améliorer notre efficacité énergétique, en étant plus sobre… et surtout en s’attaquant à la décarbonation des secteurs les plus polluants. “Il faut regarder les ordres de grandeur. Le plus facile à décarboner, c’est la production électrique. Et plus le temps va passer, plus on aura de besoins en électricité. L’industrie, c’est bien plus compliqué. Les deux plus gros émetteurs, c’est le ciment et la métallurgie. Dans ces domaines, des innovations existent mais il faut les déployer. Il y a un seul secteur où on n’a pas de solution pour l’heure, c’est l’avion. L’avion à hydrogène, personne n’y croit. L’avion électrique, personne n’y rcoit non plus. La seule piste à l’heure actuelle, ce sont les SAF, les carburants de synthèse. Mais cela coûte cinq fois le prix du kérozène normal“, conclut-il.

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