Découvrir

Kimbal Musk, le frère d’Elon Musk qui s’attaque à l’obésité aux États-Unis

2 000 dollars aux instituteurs américains prêts à passer plus de temps avec leurs élèves dans un potager en plein air. Voilà la somme offerte en septembre et octobre par l’ONG Big Green, cofondée en 2011 par Kimbal Musk.

À 49 ans, le frère cadet d’Elon Musk est plus discret que le patron de Tesla et de SpaceX. Il ne fait pas la Une de la presse en envoyant des touristes dans l’espace. Ce restaurateur n’en porte pas moins une grande ambition : inverser la courbe de l’obésité et du surpoids, dont souffrent 70 % des Américains. En soignant le mal à la racine. “Il faut apprendre dès l’école à cultiver la terre pour se nourrir avec des aliments de qualité. Et d’une manière générale reconnecter les Américains à la nature”, explique Kimbal Musk, lors d’une conférence de presse en ligne, son éternel chapeau de cowboy planté sur la tête. 

Une finalité que Big Green ne saurait atteindre à elle seule. En parallèle, “The Million Gardens Movement”, initié par Kimbal Musk au printemps 2020, veut équiper un million de foyers défavorisés d’un jardin potager.  Enfin, pour mettre à la diète les citadins en surpoids, l’entrepreneur social a lancé en 2018 à New York et dans le Michigan la chaîne de fermes urbaines Square Roots (Racines Carrées) dont les légumes et fines herbes font un carton.

25 % des enfants américains ne savent pas que le ketchup est fait de tomates

L’obésité tue chaque année autant que la cigarette”, déplore Kimbal Musk. Elle n’a cessé de croître aux États-Unis ces dernières décennies. En 1997, elle affectait moins de 20 % de la population ; en 2017-2018, elle touchait 42,4 % des adultes et un enfant ou adolescent sur cinq, selon les Centers for Disease Control and Prevention (CDC). “Le plus dingue, commente Kimbal Musk, c’est que les Américains sont obèses et affamés à la fois car les aliments consommés manquent de qualités nutritionnelles. Or mal nourri, on ne peut pas bien fonctionner.”

À l’origine de cette malbouffe, un manque d’éducation. Les trois quarts des adultes Américains emploient à tort le mot “healthy”,  selon une étude publiée par le New York Times en juillet 2016. Ils se désintéressent aussi de la composition des plats et condiments les plus populaires : 25 % des Américains de moins de 16 ans ne savent pas que le ketchup est fait de tomates, comme au Royaume-Uni, révélait par exemple une enquête menée l’année précédente. Ketchup, hamburgers, chips, sodas se résument en un mot : “food”.  

Apprendre à se nourrir soi-même

Pour enseigner aux enfants d’où proviennent les aliments de base, Kimbal Musk crée Big Green en 2011 avec le chef Hugo Matheson. Les programmes de l’ONG sont conçus pour que l’enfant passe une heure et demie par semaine les mains dans la terre. Près de 700 écoles à ce jour ont adopté ses programmes. Avec de nombreux bénéfices : les légumes servent à la consommation des élèves et professeurs, contribuent à leur faire aimer des aliments variés et leur donnent le goût du jardinage. Une activité que 10 % des enfants poursuivent à la maison, selon les sondages effectués par l’association.

Kimbal Musk en personne fait la tournée des jardinières en distribuant ses sourires aux enfants. Mais, insiste-t-il, dans une newsletter de 2018, “je me concentre d’abord sur […] les communautés [défavorisées] les plus touchées par les maladies liées à l’obésité. Ensuite nous toucherons chaque enfant des 100 000 écoles des États-Unis. [Ce] n’est pas quelque chose que je réussirai par moi-même. C’est un GRAND effort pour tout le monde en Amérique.”

Kits de jardinage

Il s’agit donc d’accélérer, avec le soutien d’autres ONG (Green Schoolyards America, Children and Nature Network, School Garden Support Organization Network, par exemple) grâce à cette subvention de 2 000 dollars versée aux écoles.

Autre moteur : The Million Gardens Movement créé par Musk pendant le confinement tend à “fédérer les gens qui aiment jardiner et veulent aider les autres à le faire”, précise le site. Elle a donc distribué 1 000 kits de jardinage à des personnes en précarité alimentaire, comprenant graines de radis, fraises, tomates et surtout pommes de terre. “Souvent le jardinage intimide les gens. Ils se disent qu’ils ne sont pas capables. En réalité ce n’est pas difficile, il y a peu des choses à savoir…, martèle le frère du milliardaire.  

La ferme du futur selon Kimbal Musk

Produire une partie de sa nourriture est aussi une solution au problème des déserts alimentaires. Les jeunes, découragés par l’agriculture intensive, le dérèglement climatique et la pollution de la terre et de l’eau, ne veulent plus être fermiers. Pour susciter des vocations, Kimbal Musk implante ses “fermes du futur” à New York en 2018, puis dans le Michigan en 2020. Des containers de 30m2 équipés de LED qui reproduisent la lumière du soleil italien sont reliés au cloud pour être contrôlés via une application Smartphone.

Des plans de salades, d’aubergines, de navets, de fines herbes y sont cultivés en hydroponie. Leurs racines se nourrissant d’eau enrichie de sels minéraux. Dans les supermarchés Morton Willliams de New York “ça s’arrache comme des petits pains”, témoigne le gérant d’un magasin de la 56ème rue.

Le Covid-19 a révélé des failles majeures dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire industrielle et accéléré le mouvement agricole local déjà en pleine croissance. Square Roots permet aux villes d’être plus résilientes : nos fermes [containers] peuvent s’implanter n’importe où en ville, quelle que soit la rigueur du climat, pour répondre à la demande toute l’année”, fait valoir Kimbal Musk.

Un projet donc assez différent de celui de son frère. Même si les Musk sont très proches. Celui qui siège au conseil d’administration de Tesla et de Space X n’avait pas hésité à déclarer devant les chaînes de télévision couvrant le lancement de Square Roots en 2018 : “Je me concentre sur ma mission d’apporter une vraie alimentation à tout le monde [sur Terre] mais la technologie que nous construisons à Square Roots peut et sera utilisée sur Mars !”

Recent Posts

  • Déchiffrer

Christophe Cordonnier (Lagoped) : Coton, polyester… “Il faut accepter que les données scientifiques remettent en question nos certitudes”

Cofondateur de la marque de vêtements techniques Lagoped, Christophe Cordonnier défend l'adoption de l'Éco-Score dans…

14 heures ago
  • Ralentir

Et si on interdisait le Black Friday pour en faire un jour dédié à la réparation ?

Chaque année, comme un rituel bien huilé, le Black Friday déferle dans nos newsletters, les…

20 heures ago
  • Partager

Bluesky : l’ascension fulgurante d’un réseau social qui se veut bienveillant

Fondé par une femme, Jay Graber, le réseau social Bluesky compte plus de 20 millions…

2 jours ago
  • Déchiffrer

COP29 : l’Accord de Paris est en jeu

À la COP29 de Bakou, les pays en développement attendent des engagements financiers à la…

3 jours ago
  • Déchiffrer

Thomas Breuzard (Norsys) : “La nature devient notre actionnaire avec droit de vote au conseil d’administration”

Pourquoi et comment un groupe français de services numériques décide de mettre la nature au…

4 jours ago
  • Respirer

Les oursins violets, sentinelles de la pollution marine en Corse

Face aux pressions anthropiques croissantes, les écosystèmes côtiers subissent une contamination insidieuse par des éléments…

4 jours ago