Lecture d’hiver : “La Dernière Étreinte. Le Monde fabuleux des émotions animales…”

Une chronique parue dans We Demain n°24

“Nous imaginons que nous sommes des acteurs rationnels et que nous savons ce que nous faisons, alors que les autres espèces seraient des automates. Les choses ne sont pas si simples, au contraire”, assure le biologiste, primatologue et éthologue américano-néerlandais Frans de Waal dans la préface de La Dernière Étreinte. La ressemblance entre l’homme et l’animal est manifeste, démontre-t-il, et elle repose en premier lieu sur les émotions.
     

“Émotions qui nous portent et qui cherchent à prendre le dessus, de la colère à la peur, en passant par le désir sexuel et l’affection.”


Contrairement aux sentiments, qui sont connus de celui qui les éprouve et dont on peut faire état en communiquant par le langage, les émotions sont des états du corps et de l’esprit qui induisent un certain comportement : expressions faciales, timbres des voix… C’est vrai chez l’humain comme chez le chimpanzé, que connaît très bien notre auteur. La réaction de Mama, vieille matriarche chimpanzé, qui se fend d’un immense sourire à la visite du professeur van Hooff, “ami” de quarante ans, est édifiante. 

Le primatologue du Centre national de Yerkes (Atlanta), qui est aussi psychologue, alerte : il est temps de reconnaître à quel point TOUS les animaux sont mus par les émotions. Si, pour encore beaucoup de scientifiques, nous devons nous prémunir de tout anthropomorphisme, si cette idée selon laquelle les animaux seraient doués d’émotions met encore mal à l’aise nombre de chercheurs, Frans de Waal ose affirmer qu’il faut arrêter de croire en l’incomparabilité des hommes. C’est ce qu’il appelle l’”anthropodéni”.

“Il faut se rendre à l’évidence que nous sommes des êtres cent pour cent émotionnels”, au même titre que les primates, pachydermes, oiseaux ou poissons, assène-t-il. Il prédit d’ailleurs que la science des émotions sera la prochaine frontière de l’étude du comportement animal. Une ère qui ne s’annonce pas sans profonds bouleversements.
 

La Dernière Étreinte. Le Monde fabuleux des émotions animales… Et ce qu’il révèle de nous, par Frans de Waal, Les Liens qui libèrent, 384 pages, 22 euros.

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