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Lézard mutant, crevette, corail… Les nouvelles créatures de la crise climatique

Face aux bouleversements des écosystèmes, animaux et végétaux ont toujours eu des réponses adaptatives. Or la crise écologique actuelle accélère sérieusement ce processus de sélection naturelle ! Notre planète a déjà connu des bouleversements de cette ampleur, les plus importantes étant la crise du crétacé tertiaire (– 65 millions d’années). Un pic de chaleur à l’ère éocène (– 56 millions d’années). Ainsi qu’un fort changement à la fin de la dernière ère glaciaire (– 12 000 ans). Mais aucun d’entre eux n’avait touché à ce point l’ensemble de la biosphère ou n’avait demandé aux animaux un changement de mode vie aussi rapide.

Théâtre d’une détérioration inédite, l’ère de l’anthropocène, dans laquelle nous évoluons, voit aussi croître de façon spectaculaire les performances de la sélection naturelle. Des réponses physiologiques des mondes animal et végétal qui, pour certaines, ont été observées en une seule génération. Transformations des membres, du système sensoriel, des modes de reproduction, d’alimentation ou de communication… Aucune option n’est exclue par le vivant !

Capacités créatives des organismes vivants

Même les végétaux entament des migrations afin de fuir le réchauffement. Un seul rapport, publié par l’Académie des sciences en 2017, coordonné par Sandra Lavorel, Jean-Dominique Lebreton et Yvon Le Maho, fait état de différents processus d’adaptationnisme. Depuis, de nouvelles découvertes ont été établies partout dans le monde.

Mais ce domaine d’études demeure méconnu car il ne traite pas des causes du changement climatique. Plutôt des capacités de résilience du vivant et de ses interactions face aux effets de ce changement : « Au-delà de l’émotion du public vis-à-vis des risques d’extinction d’espèces emblématiques, ce sont les modifications apportées à ces interactions qui doivent donc retenir le plus d’attention », souligne le rapport. Si ces observations ne concernent que quelques espèces, les scientifiques voient le commencement d’un phénomène mondial dont il faut décrypter les codes de façon urgente. Le fruit d’un fascinant rapport de force entre les contraintes des nouveaux milieux et les folles capacités créatives et vitales des organismes vivants.

En voici quelques exemples.

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1. Lézard des villes

Dans de nombreuses régions tropicales, l’expansion chaotique des mégalopoles a effacé les frontières entre zones naturelles et zones urbaines. Toute une faune sauvage cohabite désormais avec les citadins. Ce qui change non seulement le mode de vie des animaux mais aussi leur évolution physiologique. Prenez le lézard Anolis cristatellus, qui vit au Costa Rica. Son corps a changé en une décennie au contact du béton.

Après plusieurs années d’observation par des chercheurs américains et portoricains, spécialisés dans l’évolutionnisme animal urbain, ce lézard se révèle préférer le substrat des villes. Les différentes matières composant les sols, les habitats et les infrastructures – que celui des forêts naturelles environnantes. Des matières très diversifiées qui offrent de meilleures conditions de vie au petit reptile. Pour cela, ses pattes ont dû vite s’adapter.

C’est en grimpant d’immeuble en immeuble, en traversant les routes et autres infrastructures urbaines que ses membres se sont progressivement allongés. D’autres facteurs, comme l’augmentation des températures et le changement du taux d’humidité, ont contribué à la transformation du corps du lézard. Notamment certaines couches de sa peau, devenue plus épaisse et plus résistante. En quelques générations et à quelques dizaines de kilomètres de distance, la même espèce s’est scindée en deux modèles génétiques différents.

À lire aussi : “Il faut arrêter d’opposer biodiversité et climat”

2. Crevettes aveugles

Des biologistes de l’université de Rostock et de Hanovre (Allemagne) ont découvert que certaines espèces de crevettes de la famille des malacostracés (la Thermosbaenacea, la Palaeographia et les mictacés pouvaient modifier leur système sensoriel en fonction de leur environnement. Sous l’effet de la chaleur, de la pollution ou des changements de courants, ces crevettes ont trouvé refuge dans les cavernes inhospitalières des fonds marins.

Les animaux n’utilisant plus leurs yeux dans l’obscurité, c’est tout leur organe visuel qui s’est retrouvé progressivement atrophié. Un phénomène encore très difficile à évaluer dans le temps. Le système nerveux et neuronal, qui dirige les sens de la crevette (vue, odorat, toucher), a alors pu se « recycler ». Pour se spécialiser dans les autres fonctions, tactile et olfactive. Une reconversion qui permet à ces petites nageuses ne pas perdre leurs capacités de déplacement. Et de chasse…

À lire aussi : La protection de la biodiversité, un bon pari économique

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