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Label Église Verte : à Paris, l’écologie intégrale s’invite à Saint-Jean-Bosco
🐓 🐓 Nuggets et Jean Poule II s’en donnent à cœur joie. Montées dans le bac à compost, elles fouillent les épluchures à la recherche de vers dodus. “Je vais leur mettre directement dans le bac, il y a plein d’asticots”, s’exclame gaiement un père de famille. Comme d’autres paroissiens ce jour-là, il est venu déposer le contenant de son bio-seau avant le début de la messe.
🌿 Au fond du jardin, à l’arrière de l’église de style Art déco Saint-Jean-Bosco, quatre bacs à compost ont été installés en 2020, date à laquelle la paroisse a adopté ses deux poules. C’est en 2020 aussi que Saint-Jean-Bosco a adhéré au label Église verte qui accompagne les lieux de cultes chrétiens vers une “écologie intégrale”. Ce concept intègre des aspects environnementaux, économiques et sociaux.
Dans les pas de l’encyclique “Laudate Si”
✝️ “Après plusieurs réunions de réflexion, nous avons créé un groupe ‘Laudato Si’, du nom de l’encyclique du pape François écrite en 2015”, contextualise Aurélie, paroissienne responsable du groupe. Le texte, le premier du genre publié par l’Église catholique et consacré aux questions environnementales et sociales, alerte sur la préservation de “la maison commune”, enjoignant les fidèles à des changements de modes de vie et de consommation d’énergie avant la fin de ce siècle.
⛪️ Selon Marie-Lorraine Houot, chargée de suivi chez Églises vertes : “Depuis septembre 2017, 850 communautés dont 600 paroisses et églises locales chrétiennes ont obtenu le label Église verte.” Un chiffre qui représente moins de 2 % des églises en France. Que signifie mettre en place une démarche église verte dans une paroisse ? “Il y a d’abord une facette biodiversité, avec le jardin”, explique Aurélie en désignant les plans de tomates entourés de courges, framboisiers et fraisiers.
🕊️ L’espace vert de la paroisse étant répertorié parmi les jardins collectifs du 20e arrondissement, la mairie a fourni le bac d’apport, celui de broyât et les deux bacs de maturation pour le compost. Une maison à insectes, un nichoir pour les oiseaux et des bio seaux distribués aux paroissiens ont également été mis à disposition gratuitement. “Cela nous a permis de débuter notre action en nous appuyant sur ces dispositifs citoyens”, note la responsable du groupe “Laudato Si”.
En 2023, WE DEMAIN a noué un partenariat avec le Centre de Formation et de Perfectionnement des Journalistes (CFPJ). Quinze jeunes journalistes en contrat de professionnalisation ont travaillé à la production d’une série d’articles autour des initiatives dans les territoires. Retrouvez ici l’ensemble des sujets publiés sur la question.
Investir dans la sobrité pour une église plus durable
🔥 Le bâtit aussi est concerné. “Techniquement, on a fait beaucoup d’efforts sur ce point”, insiste Jean-Alain, responsable du bâti au sein du conseil pastoral de l’église Saint-Jean-Bosco, érigée en 1938. Pour tenter de réduire sa consommation d’énergie durant l’hiver, la paroisse a remplacé la vieille chaudière de l’église pour un modèle moins consommateur. Coût de l’opération : 140 000€, que les paroissiens ont associé à quelques actions et comportements plus sobres (diminution des périodes de chauffe, baisse de la consigne de température). La méthode semble efficace : -12,2 % de gaz consommé durant l’hiver 2021/22 et 29,2 % de moins l’année dernière.
🌧️ “J’ai voulu mettre en place un collecteur d’eau, se rappelle également Aurélie, le regard s’élevant vers la nef. Mais, la paroisse souffre d’un statut juridique très flou, car nous ne sommes ni une société ni un particulier.” Sans aides ni subventions, l’installation d’un dispositif de récupération des eaux pluie n’a pas encore été possible. Autre domaine stratégique : l’isolation, “un puits sans fond” compte-tenu de la taille du bâtiment et des murs, se désole Jean-Alain tandis que les rayons du soleil de 10 heures, filtrés par les vitraux, illuminent l’allée centrale. “On a fait doubler une partie des vitraux pour les protéger des intempéries mais aussi pour une meilleure isolation”, poursuit le responsable du bâti. Une facture globale d’un peu plus de 100 000€.
Des économies de bout de chandelle…
📄 10h30. L’église s’est remplie d’une centaine de paroissiens constituant une assemblée d’une grande diversité. Un Kyrie Eleison ” Seigneur, prends pitié”) est entonné. Aucune feuille n’a été distribuée pour suivre le chant. A la place, les paroles sont projetées sur un écran devant le chœur de l’église. En 3 ans, 96 000 feuilles de papier ont été ainsi économisées. Ce sont ces petits gestes mis bout à bout qui rendent leur action visible. “On gratte les cierges et on les recycle pour éviter de gaspiller des lumignons en plastique”, explique Aurélie avec enthousiasme.
♻️ Au-delà du matériel, il y a enfin l’aspect liturgique. Pendant la messe ou les temps forts comme Pâque, l’Avent ou le Carême, le Père Xavier Ernst délivre un message de conscience écologique. “Si j’intégrais le thème de l’encyclique dans la célébration une fois par an autour du 4 octobre, fête de la Création, aujourd’hui il revient en filigrane tout au long de l’année”, confie le curé.
Cette sensibilisation dépasse même les murs de la bâtisse, comme lors d’action avec des associations du quartier comme Moissons Solidaires, qui redistribue les invendus récupérés sur les marchés parisiens. La démarche églises vertes a également vocation à inspirer d’autres paroisses lors de conférences ouvertes à tous, croyants ou non.
Autrice : Bleuenn Féquant
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