🪴 À peine le portail franchi, les effluves de lavande, de citron et de sapin vous emplissent les narines. Posées sur l’herbe grasse de ce petit nid de verdure à moins de 40 kilomètres de Paris, de grandes cuves noires sont remplies d’un épais liquide translucide. C’est ici que Sarah Zekri, 36 ans, professeure d’anglais, vit et mène sa deuxième activité : la fabrication de lessive 100 % naturelle.

🪵 En parallèle de ses cours au collège de Soignolles-en-Brie, elle débarrasse ses proches des cendres issues de leurs cheminées ou poêles à bois. Avec, la Soignolaise prépare une lessive 100% Seine-et-Marne et naturelle. Dans son petit jardin, Sarah applique une recette simple et ancestrale. L’idée lui a été soufflée par Nadia Huillisen, la souriante voisine : “Ma grand-mère utilisait cette technique pour laver son linge. Depuis, je lui file un coup de main”.

En 2023, WE DEMAIN a noué un partenariat avec le Centre de Formation et de Perfectionnement des Journalistes (CFPJ). Quinze jeunes journalistes en contrat de professionnalisation ont travaillé à la production d’une série d’articles autour des initiatives dans les territoires. Retrouvez ici l’ensemble des sujets publiés sur la question.

Une technique bien huilée

🌧️ Dans de grandes bassines Sarah dépose d’abord la cendre de bois. “Un tamis me permet de ne garder que les bonnes cendres que je laisse tremper.”  Pour cela, elle utilise exclusivement de l’eau de pluie. L’eau du robinet, chargée en calcaire, ne permet pas la bonne dilution de la potasse, le principe actif du mélange, dont est naturellement chargée la cendre de bois. Pour assurer ce “made in Soignolles”, Sarah a également installé un système de collecte des eaux de pluie relié à ses gouttières. 

⏱️ Elle poursuit avec enthousiasme : “Il n’y a plus qu’à attendre que la macération fasse son effet”, dit-elle en remuant avec ses doigts le liquide qui s’épaissit déjà au contact du potassium. Dans un silence d’Église qui définit bien l’ambiance de Soignolles-en-Brie, elle sort un drap blanc usagé : “C’est mon filtre”, dit-elle en riant. “Je transfère le mélange vers un autre bac en le filtrant, ainsi, tous les éléments indésirables restant disparaissent.”

Une lessive 100 % naturelle vendue 4€ le litre

🔋 Sarah stocke un jerricane dans son garage : “C’est grâce à ça que je transporte ma lessive sur des lieux de vente, j’incite les gens à venir avec leurs récipients même si j’en propose également aux nouveaux acheteurs.” Les bidons Soignolaine sont recyclés et apportent toutes les informations nécessaires à la clientèle dont le prix :  4 euros pour un litre.

💶 Cela représente un coût légèrement plus élevé que les 2,5 euros en moyenne dans les supermarchés, selon Consoglobe.com. Soignolaine ne représente qu’une goutte de pluie dans un océan de lessives conventionnelles, dont “100 % des composants sont en grande majorité d’origine pétrochimique, non-biodégradables et rejetés massivement dans l’environnement.”

Laver le linge sale en famille

🎗️ Sarah vend approximativement 100 litres de lessive par journée de marché, ce qui symbolise “une belle réussite” aux yeux de celle qui aimerait “vivre pleinement de cette activité d’ici peu”. Pour cela, elle s’appuie sur le soutien de ses proches, à commencer par celui d’un ami élagueur qui lui a fourni ses premiers sacs de cendres. Commerçante en maroquinerie, Nadia Huillisen a aussi mobilisé sa cousine pizzaiolo qui cuit ses margheritas au feu de bois. “Je l’ai aussi emmené sur les marchés et je lui ai apporté des conseils de vente”, ajoute la fidèle voisine.

📍 Pierre Galinou fait également partie des premiers à avoir cru en Sarah. Le directeur de la Maison de l’Environnement de Grand Paris Sud à La Futaie, n’a pas hésité lorsque son amie lui a proposé d’installer des lieux de dépôts de cendres dans son établissement : “On veut soutenir cette démarche exceptionnelle et sensibiliser le public à des questions environnementales importantes”, déclare-t-il avant de souligner “qu’en plus d’être 100 % naturel, le produit est aussi 100 % local.” Ce dernier argument plaît également à Marie-Jeanne Balligand, une des premières consommatrices de lessive Soignolaine : “Le prix est correct. J’ai des problèmes de peau donc l’idée d’avoir des produits naturels me rassurait. En plus d’être bon pour la planète, c’est bon pour mes habits.”

🧴 Afin de diffuser son savoir-faire et de prêcher pour la production naturelle, Sarah organise des ateliers de sensibilisation lors de festivals ou d’évènements “zéro-déchet”, comme les “rencontres du faire chez soi”, organisées le 17 juin à la Maison de l’Environnement de Grand Paris Sud, “en attendant de pouvoir intervenir dans des écoles du coin” et de pouvoir former la génération future aux gestes vertueux du quotidien.

Tutoriel : comment fabriquer sa lessive à la cendre

ETAPE 1 : Sarah collecte les cendres qui proviennent des bois de chauffages issues d’essence comme le chêne, le frêne, le bouleau ou le hêtre. Elle les tamise à la main pour évacuer le surplus de résidus non-voulus.

ETAPE 2 : L’eau de pluie est ensuite récupérée. Elle permet à la potasse de s’y diffuser facilement. Le mélange macère durant 6 à 8 jours. La décantation fait effet, les résidus de cendre tombent au fond du récipient. Naturellement, la préparation devient visqueuse.

ETAPE 3 : Le mélange est filtré, là encore à la main, simplement à l’aide d’une casserole et d’un drap. Quelques huiles essentielles sont ensuite ajoutées pour apporter du parfum à la lessive. Cela permet d’assainir et de désinfecter le linge.

ETAPE 4 : La lessive 100 % naturelle est enfin prête, elle peut être stockée (dans un jerricane par exemple). Préparation de grand-mère par excellence, la recette varie en fonction des quantités souhaitées.

Autrice : Marwan Nabli

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