Partager la publication "Après la polio, quelle sera la prochaine maladie vaincue ?"
Mardi 25 août : les médias parlent tous d’un virus, mais pas du Covid-19. Le poliovirus sauvage, l’agent pathogène responsable de la poliomyélite, vient d’être déclaré “éradiqué” en Afrique par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). En quatre ans, aucun nouveau cas de poliomyélite d’origine naturelle n’a été recensé dans les 54 pays du continent.
Today, the @WHO African Region celebrates the eradication of wild #polio! Reaching every last child with the polio vaccine has meant extraordinary courage, determination & a truly collective effort.
Watch how Africa kicked out wild polio: https://t.co/WBc5ipql7L #poliofree pic.twitter.com/wTsmiwq0fA
— WHO African Region (@WHOAFRO) August 25, 2020
Mais attention : le terme “éradication” (pourtant employé dans les publications de l’OMS) n’est pas tout à fait adapté. Le virus de la variole est, à ce jour, le seul à avoir totalement disparu de la surface du globe, même si plusieurs maladies sont visées par des campagnes d’éradication.
En infectiologie, on parle d’éradication lorsque le nombre de cas est réduit à zéro, sur le long terme et à l’échelle mondiale. À ce titre, le virus variolique est le seul à avoir été “éradiqué”. L’année 2020 marque d’ailleurs les 40 ans de la disparition de la maladie.
Une victoire sur le virus qui aura nécessité 14 ans de vaccination de masse, de campagnes de sensibilisation et de surveillance des personnes infectées. La maladie ne survient plus de façon naturelle, mais des stocks de virus variolique sont encore conservés, selon l’OMS, dans deux laboratoires de confinement renforcé.
La variole (ou petite vérole) affectait l’humanité au moins depuis l’Antiquité : les traces d’éruptions cutanées caractéristiques ont été retrouvées sur des momies égyptiennes datant du IIIe siècle avant notre ère. Introduit en Europe par les échanges marchands, l’expansion arabe en Espagne et les croisades, le virus était extrêmement meurtrier. Trois personnes contaminées sur dix en moyenne succombaient à la maladie.
Au sens strict du terme, la polio n’a pas été “éradiquée” : l’annonce de l’OMS ne concerne que le continent africain. Moins utilisé, le terme d’élimination – qui désigne la disparition d’un virus à l’échelle régionale – est plus adéquat. L’OMS vise l’éradication totale de cette maladie, mais la situation s’avère complexe. À l’état sauvage, il existe trois souches de poliovirus différentes. Si deux d’entre elles ont disparu de la surface du globe (et du continent africain depuis 2016), la souche 1 est toujours active au Pakistan et en Afghanistan.
Des “virus vaccinaux” ont également fait leur apparition. Ils sont issus des poliovirus atténués contenus dans les vaccins oraux et qui se retrouvent dans les excréments humains puis dans l’environnement. Ces agents pathogènes peuvent exceptionnellement muter pour retrouver leur virulence originelle. Ils représentent alors un danger pour les communautés sous-vaccinées. 16 pays africains connaissent actuellement des flambées de poliovirus de type 2 dérivé d’une souche vaccinale, le PVDVc2. Seul le poliovirus sauvage a donc été éliminé !
Cet agent pathohène côtoie l’humanité depuis l’Égypte Antique (des traces de la maladie ont été retrouvées sur un squelette datant de 3400 ans avant J.C). En Europe et aux États-Unis, les grandes épidémies remontent au XXe siècle. La maladie, qui s’attaque au système nerveux et qui peut entraîner des paralysies permanentes, voire la mort, a été progressivement endiguée à partir de 1958, date des premières campagnes de vaccination de masse.
La dracunculose, ou “maladie du vers de Guinée”, est la première maladie d’origine parasitaire à être visée par un programme d’éradication de l’OMS. Dans les années 1980, elle affectait une vingtaine de pays et touchait plus de 3,5 millions de personnes.
En 2018, seuls trois pays étaient encore confrontés à des cas de dracunculose humaine : l’Angola, le Soudan du Sud et le Tchad. Les dernières données de l’OMS, qui datent de 2019, font état de quatre cas humains (un en Angola, trois au Tchad). L’éradication complète de la maladie semble être en bonne voie.
La dracunculose est causée par un vers parasitaire dont les larves sont libérées dans l’organisme lors de l’ingestion d’eau contaminée. Après environ un an d’infection, le ver émerge généralement des pieds, entraînant la création d’un œdème douloureux et de potentielles infections bactériennes.
Il s’agit de l’une des premières maladies que l’OMS et l’Unicef ont cherché à éradiquer, dès 1950. Le pian est causée par une infection bactérienne que l’on retrouve principalement chez les communautés défavorisées des régions forestières tropicales en Afrique, Asie, Amérique latine et du Pacifique. Elle provoque l’apparition de nombreux ulcères jaunâtres sur la peau, ainsi que des douleurs et des gonflements le long des os.
S’il n’existe pas de vaccin contre la maladie, des injections d’antibiotiques ont prouvé leur efficacité. En 2012, l’OMS a fixé l’année 2020 comme année butoir pour l’éradication du pian. En mai 2016, elle a déclaré que l’Inde était exempte de la maladie, mais le pian reste actif dans 13 pays selon des données de 2019.
À première vue, la rougeole semblait facile à éliminer. Il n’existe pas de réservoir animal du virus et un vaccin existe depuis plus de cinquante ans. L’OMS espérait même l’éradiquer avant 2015. Mais, en dépit d’une augmentation de la couverture vaccinale (environ 85 % des enfants dans le monde avaient reçu une dose du vaccin antirougeoleux en 2016, contre 72 % en 2000), le virus est encore actif, notamment au Libéria, à Madagascar, en République Démocratique du Congo, en Somalie et en Ukraine.
Si ces pays concentraient, en 2019, près de la moitié des cas de rougeole dans le monde, les pays dits développés ne sont pas en reste. La même année, une flambée épidémique touchait les États-Unis et plusieurs pays d’Europe. Le Royaume-Uni et la Grèce ont ainsi perdu leur statut de pays où la rougeole avait été “éliminée”. En cause ? L’affaiblissement de la couverture vaccinale – qui devrait être de 95 % pour une élimination locale – fragilisée par l’essor des mouvements anti-vaccins.
L’OMS a toujours pour objectif d’éliminer la maladie. Et regrette la défiance envers un vaccin qui permettrait d’éradiquer un virus qui n’a rien d’anodin. Avant la généralisation de la vaccination, on enregistrait tous les deux ou trois ans d’importantes épidémies de rougeole qui pouvaient causer plus de deux millions de décès.
Toutes les maladies ne peuvent pas être éradiquées, c’est pourquoi seules quelques unes font l’objet d’un programme d’éradication. Pour être une bonne candidate, elles doivent de préférence ne pas posséder de réservoir animal et être facile à prévenir et à traiter.
La grippe ne sera ainsi probablement jamais éradiquée, puisqu’elle est susceptible de passer de l’oiseau à l’Homme. Le virus est également connu pour ses régulières mutations, qui rendent impossible la création d’un vaccin efficace sur le long terme. Quant au Covid-19, vous l’aurez compris, son éradication n’est pas pour tout de suite…
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