Partager la publication "Bertrand Piccard : “plus de 700 start-up écolo nous ont rejoint”"
- Vous annonciez en septembre dernier, dans le numéro 19 de la revue We Demain, le lancement de votre “Alliance mondiale pour des solutions efficientes”. Une organisation dont l’objectif est de labelliser 1 000 initiatives rentables et protectrices de l’environnement. Où en est on aujourd’hui ?
Bertrand Piccard : C’est un grand succès ! 731 projets nous ont déjà rejoints et 520 autres sont à l’étude. Nous lançons désormais le processus de labellisation, une analyse des projets par des experts indépendants issus de l’Union Européenne, de l’Ademe ou de grandes entreprises comme Air Liquide ou Engie.
C’est la première fois qu’un label est créé pour prouver la rentabilité de solutions environnementales. Une idée répandue est que la protection de notre planète coûte cher … je veux démontrer le contraire, que cela peut rapporter.
Pendant longtemps, on a opposé la société civile et l’industrie dans la lutte contre le changement climatique. Je pense que c’est une illusion naïve de penser que l’on peut avoir un impact sans les inclure. D’où l’importance de parler leur langage et de mettre en avant l’emploi ou les richesses créés.
- N’y a t-il pas un risque que ces technologies engendrent un “effet rebond” et que l’impact écologique ne soit à la fin supérieur ? On le voit par exemple avec les objets connectés ou les LED qui sont bourrés de terres rares dont l’extraction est très polluante…
C’est une très bonne question. Pour moi, la croissance verte c’est remplacer ce qui est polluant par des solutions efficientes. Si nous ne le faisons pas et restons à technologie constante, nous subirons une augmentation exponentielle de notre consommation énergétique et donc de la pollution. En d’autres termes, le rebond existera de toute façon.
Actuellement, 6,1 millions de personnes meurent chaque année à cause de la pollution de l’air… Mais on peut changer les choses, ce n’est pas une fatalité. En développant par exemple le stockage des énergies renouvelables, on peut lisser la consommation et baisser ainsi de 20 % les besoins de production électrique d’un pays. C’est énorme ! Il faut que chaque élément de la chaine s’imbrique dans les autres.
- Pouvez-vous nous citer trois exemples de technologies transformatives promues par votre Alliance ?
Bien sûr. Il y a par exemple la start-up française Net SAS qui installe des boitiers sur les moteurs de voitures thermiques. Cela fait baisser de 80 % le niveau de particules émises par le moteur et réduit de 20 % la consommation d’essence. Une telle solution est amortie en seulement 6 mois !
Une jeune pousse indienne a mis au point un ventilateur qui utilise le même moteur que Solar Impulse. Ce qui permet de baisser de 65 % la consommation. Ils ont déjà distribué 100 000 unités et évité 14,7 tonnes de CO2.
Il y a aussi une entreprise mexicaine qui a conçu un système de stockage d’énergie à l’aide de poids en mouvement, grâce à un moteur électrique qui se transforme en alternateur. Une idée vraiment originale et efficace pour stocker l’énergie.
- Comment voyez-vous le monde dans 20 ans ?
Il y a deux possibilités. Soit l’humanité ne réagit pas et on subit toutes les conséquences du réchauffement climatique avec par exemple la montée des eaux, des famines ou des maladies tropicales en Europe. Soit on agit. Aujourd’hui, honnêtement, on ne sait pas qui va gagner. Tous ceux qui veulent unir leurs forces doivent s’impliquer pour faire pencher la balance.
Lorsque que j’ai lancé le projet Solar Impulse, beaucoup d’ingénieurs m’ont dit qu’il ne pourrait jamais voler. Désormais, tout le secteur aéronautique investit dans l’électrification ! C’est ce type de dynamique que nous voulons désormais porter sur l’ensemble de l’industrie.
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