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ChoViva : le goût du chocolat, le fort impact carbone en moins

Aliment plaisir par excellence, le chocolat est pourtant un fléau pour la planète. D’un part, l’exploitation des cacaoyers encourage la déforestation car elle nécessite de larges surfaces de terrain. On estime qu’ils couvrent un total de 12 millions d’hectares sur la planète, soit la superficie du Nicaragua. Et le WWF affirme que 70 % de la déforestation illégale de la Côte d’Ivoire, premier producteur mondial, est liée à la culture du cacao. D’autre part, il faut pas moins de 3 400 litres d’eau pour faire une tablette de 200 grammes. Ensuite, la transformation des fèves de cacao pour obtenir le chocolat est fortement émissive de gaz à effet de serre. Problème : la Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique) estime que la consommation de chocolat aura augmenté de 20 % entre 2020 et 2025.

En tablettes, en truffes, en gâteaux, en pépites… les Français sont amoureux du chocolat. Nous en consommons plus de 7 kilos par an et par personne (quelque 40 tablettes) et sommes les sixièmes plus gros consommateurs au monde. Avec une spécificité par rapport à nos voisins : nous aimons tout particulièrement le chocolat noir, très riche en cacao brut. Or, 1 kilo de cacao émet 23,2 kilos de CO2 en moyenne au niveau mondial (dont 95 % de l’impact dû à la déforestation). C’est plus que certaines viandes et poissons…

Gros plan sur les mains d’un agriculteur qui coupe une cabosse de cacao sur un cacaoyer. Crédit : Narong KHUEANKAEW / iStock.

L’alternative ChoViva pour moins solliciter les terres des pays du Sud

Une start-up allemande, fondée en 2021 et basée à Munich, a mis au point une alternative au chocolat pour réduire les besoins croissants en fèves de cacao. Planet A Foods utilise un processus de fermentation exclusif pour transformer des ingrédients d’origine locale – comme l’avoine et les graines de tournesol – en un produit breveté, “ChoViva”. Ce substitut au cacao peut ensuite entrer dans la fabrication d’un chocolat sans fève de cacao. Une excellente nouvelle, d’autant plus que le cours du cacao a largement dépassé son plus haut historique depuis 46 ans, selon Trading Economics.

Les chocolatiers sont donc en quête d’une alternative moins chère, mais pour autant crédible, au cacao. Planet A Foods, qui vient de lever 15,4 millions d’euros pour le développement de ChoViva, a ainsi commencé à signer des contrats avec des marques comme Lindt, qui l’intègre dans sa nouvelle gamme végétalienne, ou encore la compagnie aérienne Lufthansa.

En raison, notamment, des effets du réchauffement climatique sur les cacaoyers, le prix du cacao explose ces derniers mois. Crédit : Trading Economics.

Fermentation et torréfaction pour retrouver le goût du cacao

La clé de l’idée d’innovation a été la prise de conscience par les fondateurs, la docteure Sara Marquart et son frère Maximilian, que le goût et l’arôme du chocolat proviennent de la fermentation et de la torréfaction. Et non de la fève de cacao brute elle-même. D’autres aliments transformés de la même manière que le cacao donneront donc un arôme chocolaté.

Le duo a testé plus de 100 ingrédients qui pouvaient servir d’alternatives aux fèves. “Nous avons testé de très nombreuses matières premières pour nous rapprocher le plus possible du goût du chocolat, explique Sara Marquart. Aujourd’hui, Choviva se compose d’avoine et de graines de tournesol. Ils subissent un processus similaire à celui du cacao dans la production de chocolat.” Planet A Foods fait fermenter ces céréales dans un dispositif assez proche de celui du brassage de la bière.

“Elle affirme que son procédé émet 90 % de CO2 en moins que la matière première traditionnelle.”En raison des ingrédients et de la manière dont ils sont transformés, Choviva a le goût du chocolat tout en ayant une empreinte carbone jusqu’à 90 % inférieure à celle du chocolat traditionnel”, affirme la cofondatrice.

Maximilian et Sara Marquart, les deux cofondateurs de Planet A Foods. Crédit : Planet A Foods.

Planet A Foods aspire à multiplier les alternatives alimentaires plus écologiques

Le principal défi de Planet A Foods aujourd’hui ? Construire de nouvelles usines pour répondre à la demande croissante en ChoViva. Et développer d’autres alternatives plus écologiques à d’autres matières premières qui posent de gros problèmes à la planète. Comme l’huile de palme. “Nous voulons développer les graisses nécessaires à la production de chocolat. En les combinant à ChoViva, elles pourront servir d’alternative au beurre de cacao”, précise Sara Marquart. La jeune femme a aussi étudié les substituts à une autre fève, celle du café.

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