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Corentin de Chatelperron : « En matière de low-tech, le vivant est souvent la solution la plus efficace »

Et si on s’appuyait sur la nature pour réduire notre impact carbone ? Lors du Premier Forum de l’Économie Légère, Corentin de Chatelperron est intervenu pour revenir sur ses multiples expériences low-tech. Lors de sa présentation « Design-moi un monde plus léger », il a évoqué son tour du monde en quête de bonnes idées pour un monde plus durable. Pendant dix ans, à travers son expédition « Nomade des Mers », il a parcouru 25 pays à la recherche d’innovations durables. Aujourd’hui, il poursuit son aventure à… Boulogne-Billancourt, dans les Hauts-de-Seine.

Accompagné de la designeuse Caroline Pultzans, Corentin de Chatelperron, ingénieur de formation, a investi un appartement de 26 m2. Pendant 120 jours, ils imaginent « comment on pourrait vivre en ville en 2040″ tout en adoptant « un mode de vie respectueux de la planète ». Dans ce studio, véritable « biosphère urbaine » tout a été pensé pour être le moins énergivore possible et pour générer peu ou pas de déchets. Objectif : prouver qu’il est possible de vivre en zone urbaine tout en respectant la limite des « 2 tonnes d’équivalent carbone par an et par personne » afin de respecter l’Accord de Paris visant à limiter le réchauffement climatique à +1,5 °C.

Les solutions low-tech ont de l’avenir

« Le low-tech, c’est une démarche qui vise à répondre à nos besoins de la manière la plus astucieuse possible, avec le moins de ressources, tout en étant accessible et durable », résume-t-il. Au cours de son voyage, il a rencontré des inventeurs qui utilisent des solutions basées sur le vivant pour résoudre des problèmes du quotidien.

Parmi les exemples marquants, Corentin cite Kuala Lumpur (Malaisie) où il a découvert l’utilisation des larves de mouches soldat noires pour dégrader efficacement les déchets organiques. « Si nous avions dû traiter ces déchets avec des machines, cela aurait nécessité des infrastructures énergivores et beaucoup de maintenance. En confiant ce travail aux larves, nous obtenons un résultat plus efficace et écologique. », souligne-t-il.

Il évoque également la culture de la spiruline, une micro-algue nutritive qui nécessite peu de ressources pour se développer. Ces innovations montrent que le vivant peut offrir des solutions plus efficaces que les technologies complexes. « En matière de low-tech, le vivant est souvent la solution la plus efficace. »

Une biosphère urbaine à Boulogne-Billancourt

Cette expérience d’appartement low impact à Boulogne-Billancourt est soutenue par des partenaires comme l’Agence spatiale européenne, qui fournissent des capteurs high-tech pour mesurer la qualité de l’air et d’autres indicateurs. « La high-tech nous sert d’échafaudage pour mettre en place un système low-tech très efficace », précise Corentin.

Mais l’intérieur du studio a surtout été pensé en mode recyclage, seconde main et solutions malines. Deux panneaux photovoltaïques fournissent l’électrcité nécessaire. La douche a été optimisée (micro-gouttes façon crachin breton) pour consommer le moins d’eau possible. Surtout, elle permet aussi à des champignons, des pleurotes en l’occurence, de pousser. « Les eaux usées de la douche sont filtrées et transformées grâce à des bactéries pour ensuite venir nourrir des plantes, dont les pleurotes. »

1 kilo de champignons par semaine grâce à une simple douche

Le système fournit environ 1 kilo de champignon par semaine pour les repas de Corentin et Caroline. Et leur consommation d’eau – 150 litres par personne et par jour en moyenne en France – est divisée par dix. Dans le même ordre d’idée, les toilettes sèches intègrent des larves de mouches soldates. Elles sont chargées de transformer les déjections en compost qui est ensuite réutilisé de deux manières. D’une part, pour faciliter la pousse d’aliments hors sol dans l’appartement et d’autre part pour fournir chaque semaine à une ferme à proximité en échange de fruits et légumes.

L’objectif final de cette expérimentation à Boulogne-Billancourt est de partager les résultats avec le plus grand nombre. « À la fin, nous produirons un rapport technique détaillant ce qui a fonctionné ou non. Le but est que n’importe qui puisse répliquer ces solutions gratuitement », annonce-t-il. Une web-série sera également diffusée sur Arte pour sensibiliser le public et montrer les solutions possibles. Même en zone urbaine dense.

Redéfinir notre imaginaire du futur

Pour Corentin de Chatelperron, il est essentiel de repenser notre vision de l’avenir. « J’ai grandi avec des visions du futur comme ‘Star Wars’, avec des voitures volantes. Mais ce futur est périmé car il ne correspond pas aux limites planétaires. Nous avons besoin d’un nouvel imaginaire qui soit désirable et soutenable », affirme-t-il.

En s’appuyant sur le vivant et des solutions low-tech, il est convaincu que nous pouvons construire un monde plus léger. Un monde respectueux de l’environnement et adapté aux défis actuels. « C’est une démarche applicable à tout : il s’agit d’analyser nos besoins et d’y répondre de la manière la plus sobre et ingénieuse possible », conclut l’ingénieur.

« Analyser nos besoins et y répondre de la manière la plus sobre et ingénieuse possible. »

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