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Économie légère : 16 idées low-tech pour avancer dans le bon sens

Maisons isolées au chanvre, climatiseurs alternatifs, voitures poids plume, assainisseurs d’eau, réfrigérateurs passifs… La low-tech gagne du terrain pour accompagner la transition écologique. Encore faut-il donner à cette économie légère toutes ses chances pour en faire un axe central de développement. Heureusement, de bonnes volontés y travaillent.

Le 16/09/2024 par Vincent Rondreux
climatisation adiabatique
Création d'un système de climatisation adiabatique par Entreautre Crédit : ENTREAUTRE RLT.
Création d'un système de climatisation adiabatique par Entreautre Crédit : ENTREAUTRE RLT.

L’opposition entre high-tech d’un côté et low-tech de l’autre est un vieux refrain. Une caricature, même. Pourtant, « la low-tech ne concerne pas seulement des objets. C’est aussi une manière de les utiliser, une approche qui peut s’appliquer dans les domaines high-tech », avertit l’ingénieur Philippe Bihouix, dans son livre L’Âge des low-tech. C’était il y a dix ans. Depuis, ces low-tech, qui alignent les innovations, ont été jugées suffisamment pertinentes pour être « institutionnalisées ». Une réalité consignée, en 2022, dans un rapport de l’Ademe, l’Agence de la transition énergétique.

Mais ces initiatives restent encore limitées à « des produits de niches », déplore Philippe Bihouix. Lueur d’espoir, « on remarque davantage d’innovations low-tech dans deux secteurs : l’habitat, avec des matériaux locaux sobres et efficaces, la ventilation naturelle ; et la mobilité, avec des modèles issus du vélo classique, des projets de petites voitures, voire de trains légers. »

Low-tech et réindustrialisation de la France peuvent aller de pair

Outre un « changement culturel » lié à la consommation, l’autre condition nécessaire à un changement d’échelle est de « mettre en place des incitations financières. Aujourd’hui, le système fiscal se concentre sur le travail humain, plus important dans l’approche low-tech, et pas sur les machines. Il ne privilégie pas les efforts organisationnels par rapport aux externalités (CO2, ressources extraites, pollutions, préventions et sobriété à la source) par rapport à la gestion des dégâts », explique Philippe Bihouix.

Pourtant, les low-tech pourraient participer à la réindustrialisation de la France, « dans le domaine des objets du quotidien : ameublement, vêtements, petit outillage, hygiène, transport… Même si ce n’est pas sur toute la chaîne de valeur. » En attendant, petit tour du côté de ces initiatives qui diffusent dès à présent l’esprit low-tech.

À lire aussi : « L’économie légère, c’est une économie du plus faible impact sur la planète, la biodiversité, le climat et notre santé »

1. Réparation : le réseau Repair Cafés

Partis d’Amsterdam en 2009, les ateliers collaboratifs de réparation Repair Cafés (équipements électriques, petits électroménagers, ordinateurs, vêtements, etc.) croisent l’approche low-tech. Forts de leur succès, ils sont aujourd’hui un réseau mondial de l’ordre de 3 200 lieux, dont 600 en France. Des lieux utiles, d’animation et de lien social. repaircafe.org

2. Santé : la détection des maladies

Démonstration de Kdog das la détection du cancer du sein. Crédit : Kdog / Institut Curie.

Si le high-tech apporte beaucoup au secteur de la santé, les low-tech peuvent également s’avérer utiles, par exemple en matière de prévention. C’est ce qu’a montré le foldoscope pour la détection précoce de la malaria. Ce microscope au prix minimal s’imprime comme une feuille de papier, s’assemble par pliage, et nécessite juste pile, LED, lentille optique… Low-tech aussi, l’utilisation de chiens pour détecter les cancers du sein à partir de sueur absorbée par compresses, selon une étude (KDOG, Cancer Detect Groupe) de l’institut Curie. kdog.curie.fr

3. Mobilité : les voitres légères

Plus une voiture est petite et légère, plus sa construction s’avère simple, plus elle est sobre et économique. Avec son programme Agami, la recherche low-tech a travaillé sur les matériaux composites biosourcés, les procédés de production, les carburants… Après la Gazelle développée par Gazelle Tech à Blanquefort, en Gironde, voici l’Ulive de la société Avatar Mobilité, à La Rochelle : 4 places, peu de composants, maintenance simplifi ée, toit solaire, impact total de 20 g de CO2/km. Un projet issu d’une initiative de l’association et lieu collaboratif rochelais, Esprit 360, qui a créé la société en 2021.

Alliant technologie de pointe, frugalité, robustesse, confort, ce véhicule solaire aérodynamique, au design fonctionnel, ne doit peser que 350 kg à vide… Tout en pouvant supporter la même masse en charge et rouler à 90 km/h. Résultat : une consommation énergétique divisée par trois par rapport à un véhicule électrique traditionnel. Autonomie : 30 km grâce au toit solaire, 150 km sur batteries. L’Ulive est développée en open source, tout comme sa micro-usine locale. Mise en vente espérée pour 2026, environ 15 000 euros hors taxes (système de précommande ouvert). avatarmobilite.com

4. Eau : la piste de la phytoépuration

Avec les bactéries, le substrat et les plantes, la phytoépuration (énergétiquement et logistiquement autonome) est considérée par les low-tech comme la solution la plus écologique pour l’assainissement des eaux usées. À Bréal-sous-Monfort (Ille-et- Vilaine), Aquatiris multiplie les produits pour différents types d’habitations (maisons traditionnelle avec jardin, habitations flottantes, mobiles…) pour la gestion des eaux pluviales, pour la réutilisation des eaux usées. aquatiris.fr

5. Numérique : et pourquoi pas le paiement au gigaoctet consommé ?

Un smartphone est un objet high- tech, mais on peut l’utiliser de manière low-tech. C’est ce que propose l’opérateur télécom coopératif TéléCoop avec notamment le forfait « sobriété ». Outre les appels téléphoniques, SMS et MMS, les données mobiles sont ici facturées aux gigaoctets consommés. Selon TéléCoop, ses abonnés consomment en moyenne 2,06 Go par mois, soit 13 Go de moins que la moyenne nationale. Et ils conservent leur appareil plus longtemps. telecoop.fr

6. Mobilité : petits trains dans la campagne

Pour la low-tech, la grande vitesse est mortifère. Elle tue l’alternative à l’avion et à la voiture qu’offre le train. Près de Strasbourg, le groupe Lohr développe pour la SNCF un train léger, baptisé « Draisy », afin de « donner un nouveau souffle aux petites lignes ferroviaires » rurales. Charge réduite, essieux orientables, 14 mètres de long pour 20 tonnes et 80 passagers dont 30 assis… Les premiers tours de roue de ce petit train électrique à batteries (et se rechargeant en gare) sont prévus pour 2025, avant un service commercial en 2028. Comme un écho au projet de Ferromobile, voiture rail-route, de l’ancien ministre Arnaud Montebourg. lohr.fr

7. Formation : une option low-tech pour les ingénieurs

La low-tech est aussi affaire d’ingénieurs. De plus en plus, on leur demandera d’intégrer dans leurs créations, les questions d’utilité, de sobriété énergétique, de ressources, de réparabilité, d’impacts environnementaux, d’accessibilité au plus grand nombre… Pour répondre à ce besoin et à l’attente d’un nombre croissant d’étudiants, Centrale Nantes a lancé l’option « Ingénierie des low-tech » en 2022. Au menu 2023/24 : études pour le catamaran We Explore de Roland Jourdain, pour la récupération d’urine dans les toilettes sèches, pour l’utilisation en cuisine et pasteurisation de « rocket stove » (poêle en forme de fusée, ndlr). low-techs.ec-nantes.fr

8. Eau : des systèmes d’arrosages autonomes

Pas besoin de systèmes complexes pour alimenter sobrement ses plantes en eau. La low-tech a réactualisé l’antique technique des oyas, récipients poreux en terre cuite que l’on enterre pour qu’ils diffusent lentement l’eau dans les végétaux, en proposant une autofabrication. Dans l’Hérault et les Vosges, des artisans en font leur entreprise. Au menu : de grands et de petits oyas, pour jardins, pots de fleurs et autres jardinières. Avec une économie d’eau estimée à plus de 187 millions de litres d’eau pour ses utilisateurs. oyas.eco

9. Énergie : chauffage, séchage, cuisson solaire

L’utilisation directe de l’énergie solaire, via la chaleur, est une pierre angulaire des produits low-tech. En Île-de-France, l’entreprise Solar Brother conçoit et distribue désormais toute une gamme de séchoirs, fours, barbecues… Outre les particuliers, c’est au tour des professionnels d’adopter ce type de cuisson : le boulanger normand Arnaud Crétot, des patrons de campings, ou encore des restaurateurs, à l’instar de la cheffe étoilée Nadia Sammut à l’Auberge La Fenière, dans le Lubéron. Un « plus » pour sa cuisine sans gluten base de produits bio et locaux. solarbrother.com

10. Habitat : la climatisation adiabatique

Avec le réchauffement, la protection contre la chaleur devient vitale. Or, nos climatiseurs sont énergivores. Approche low-tech de la problématique : le recours à l’antique climatisation adiabatique, c’est-à-dire qui utilise l’évaporation de l’eau pour abaisser la température de l’air… En Rhône-Alpes, l’agence de design Entreautre développe, grâce à l’impression 3D, un rafraîchisseur en céramique où, pour plus d’efficacité, l’eau circule dans un labyrinthe inspiré de l’arborescence des coraux. entreautre.com

11. Mobilité : de nouvelles déclinaisons du vélo

Galian Cycles
La mobilité douce pour tous avec Galian Cycles. Crédit : DR.

Si le vélo n’est pas forcément considéré comme un objet low-tech, il reste malgré tout le véhicule le plus sobre et pratique pour les courtes distances. Ses déclinaisons sont multiples : vélos-cargos, triporteurs, vélomobiles, utilisation low-tech des pédaliers (machines à laver, fonctionnement d’outils…). À Rennes, la société Galian Cycles vient de lancer une nouvelle sous-famille baptisée le « cargotail ». Son vélo, le « Formidable », allie un empattement important entre les deux roues et un porte-bagage allongé. De quoi embarquer un couple avec deux enfants… galiancycles.com

12. Numérique : Nanosites

La low-tech utilise bien entendu internet. Néanmoins, la réalisation d’un site tel que lowtechlab.org observe des principes particulièrement sobres : il répond juste aux besoins préétablis, avec l’idée générale que la réduction du transfert de données réduit la consommation électrique, l’usure des équipements, et donc l’empreinte environnementale. Avec la même approche, l’agence Everest (aujourd’hui Useweb) a lancé dès 2021, à Rennes, la commercialisation de « nanosites », des sites écoconçus bien plus légers que la moyenne… Donc plus accessibles à tous. useweb.fr

13. Agriculture : des outils pour l’agroécologie

L’approche low-tech va de pair avec la permaculture, dont l’une des bases est de travailler sur des planches de culture surrélevées, jamais piétinées : le travail du sol reste donc réduit. À Renage, dans l’Isère, la coopérative l’Atelier paysan accompagne les agriculteurs dans la conception et la fabrication d’outils adaptés à cette culture : butteuse à planche pour dresser les buttes, cultibutte pour travailler la terre sans labourer, etc. À ce jour, plus de 30 plans et tutoriels ont été validés avec des autoconstructeurs un peu partout en France. latelierpaysan.org

14. Énergie : le stockage d’énergie par air comprimé

Le stockage d’énergie par air comprimé est une alternative durable et résiliente. À Lausanne, Enairys Powertech a développé, pour le marché résidentiel, un système (HyPES ) qui couple un moteur électrique et un compresseur d’air hydropneumatique (à piston liquide). Stocké en bonbonnes, l’air comprimé est ensuite utilisé à la demande pour produire de l’électricité, avec la même machine. Selon l’Ademe, un tel système pourrait « faire émerger un véritable réseau décentralisé économe en ressources ». enairys.com

15. Habitat : des matériaux géosourcés et biosourcés

Torchis, bauge, pisé… Les low-tech dépoussièrent les constructions ancestrales en matériaux locaux (paille, chanvre, bois…) ou géosourcés (terre, pierres…). De plus en plus d’architectes y ont recours. Exemple : à Paris, dans le XIXe arrondissement, un ancien lycée a été réhabilité pour devenir la médiathèque James-Baldwin et une Maison des réfugiés, tout juste ouverte. Sur la feuille de route de l’architecte Philippe Madec : réemploi de l’existant, résille en bois tressé, terre coulée, ventilation naturelle… Une « réalisation modèle » qui allie écologie, lien social et inclusion. atelierphilippemadec.fr

16. Alimentation : des compostages en tous genres

Composteurs, lombricomposteurs, bokashi… Différentes techniques low-tech permettent de composter ses déchets alimentaires de manière efficace, que l’on possède ou non un jardin. Or, la loi 2020 sur le gaspillage oblige désormais chaque ménage à disposer d’une solution de compostage, qu’elle soit personnelle ou collective. Même si cette obligation européenne reste encore théorique, ce type de produits va se généraliser. lowtechlab.org

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