Partager la publication "Impact écologique de Bitcoin, quel est le problème ?"
Dans le monde, on recense environ 56 millions d’utilisateurs de portefeuilles Bitcoin, soit moins de 1 % de l’humanité (1). Et pourtant, malgré cet usage restreint, la plus populaire des cryptomonnaies engloutirait déjà une part significative de la production électrique mondiale. Environ 0,53 %, selon un observatoire de l’université de Cambridge (2). L’impact écologique de la blockchain – les système sur lequel repose ces monnaies – mérite-t-il d’être élevé au rang de scandale écologique ? Voici des éléments de réponse pour mieux comprendre ce problème complexe.
Avec Bitcoin, plus besoin d’autorité de contrôle : ce grand registre numérique s’appuie sur la blockchain pour valider des transactions. Un système qui repose, pour Bitcoin, sur le travail des mineurs. En clair, des internautes qui apportent la puissance de calcul de leurs machines, preuves de travail à l’appui. En résolvant des casses-têtes mathématiques, ils sécurisent les échanges. Une tâche de plus en plus ardue qui leur rapporte, en échange, de nouveaux bitcoins créés. Or ces circuits intégrés consomment beaucoup d’électricité. Tous sont branchés en série dans de véritables fermes numériques,
Mais quelle quantité exactement ? Eh bien ce n’est pas si simple que cela à calculer. Comme l’indique elle-même l’université de Cambridge, on ne sait pas exactement quel matériel utilisent les mineurs. Ou si ces derniers consomment également de l’énergie pour refroidir leurs installations. Ce qui explique que le calcul des universitaires anglais est une estimation théorique. Un ordre de grandeur qui a cependant inquiété jusqu’au patron de Tesla, Elon Musk. L’investisseur, qui fait décidément la pluie et le beau temps dans l’univers des cryptomonnaies, a décidé de prendre ses distances d’un bitcoin jugé trop polluant. On ne peut plus, désormais, acheter ses voitures électriques en bitcoins.
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Malgré cette polémique récente, la question de l’impact écologique du bitcoin divise depuis plusieurs années. Un ingénieur français spécialisé dans la sécurité informatique, Marc Bevant, prenait déjà la défense de la cryptomonnaie en 2016 dans un article fouillé sur son blog. “La plupart des mineurs sont obligés d’utiliser l’énergie hydroélectrique, car l’utilisation d’énergies renouvelables bon marché est une nécessité pour gagner dans l’industrie minière ultra-compétitive”, affirmait-il par exemple.
Selon un rapport de l’université de Cambridge publié en septembre 2020, 76 % des mineurs d’une blockchain fonctionnant sur des preuves de travail utiliseraient dans leur mix énergétique des énergies renouvelables. La part totale des énergies renouvelables dans leur consommation, selon l’étude, serait de 39 %.
Cela ferait même de la blockchain, affirment certains, un soutien indirect à la recherche et développement de projets de production d’électricité renouvelable. Ses défenseurs affirment que les fermes de minage de cryptomonnaies sont un moyen efficace d’utiliser les énergies vertes lorsqu’elles sont produites en surplus. Une manière d’équilibrer un système énergétique de plus en plus basé sur les sources décarbonnées. D’autres taxeront ces arguments de “greenwashing”. Car les énergies renouvelables sont loin d’être sans impact sur l’environnement.
Pour Alex de Vries, qui l’explique sur son site Digiconomist, le problème est plus vaste que celui de la simple consommation d’énergie. Car le minage génère en soit d’importantes quantités de déchets électroniques. Selon ce datascientist néerlandais spécialiste de la blockchain, le matériel devient en effet rapidement obsolète. Résultat : l’empreinte carbone du bitcoin serait comparable à celle d’un pays comme le Portugal. Mais cette estimation du “meilleur ennemi du bitcoin”, elle aussi, est contestée.
Quel que soit l’impact environnemental réel de Bitcoin, plusieurs initiatives ont été lancées pour le réduire. En témoigne l’existence de nouvelles crypto-monnaies qui font de l’écologie leur argument principal. Pour contourner le problème, elles ont fait évoluer leur technologie. Plutôt que de faire reposer la sécurité de leur grand registre de transactions sur des “preuves de travail” (c’est le cas de Bitcoin), qui consomment beaucoup d’énergie, elles se basent sur des “preuves d’enjeu”.
Explications : Là où la “preuve de travail” s’apparente à une course de vitesse dans le calcul, la “preuve d’enjeu” se base sur la participation des acteurs – ces derniers mettent en séquestre une partie de leurs actifs pour pouvoir valider des blocs. Autrement dit, il s’agit de demander à seulement certains utilisateurs, choisis au hasard, de prouver leur participation à la crypto-monnaie pour pouvoir valider les échanges.
Plusieurs blockchains ont adopté cette technique. D’abord le Peercoin, une crypto-monnaie aujourd’hui en jachère. Mais c’est aussi le cas de Tezos, une plateforme open-source de contrats intelligents qui compte sa propre monnaie, le Tez. Ou encore de Polkadot, un projet qui se veut à la croisée des blockchains vouée à faire dialoguer les cryptomonnaies.
Un mouvement suivi par la deuxième crypto-monnaie mondiale, l’ether, dépendante de la plateforme Ethereum. Ses développeurs espèrent faire baisser la consommation d’énergie de 99 % en basculant d’une blockchain basée sur une preuve de travail à une preuve d’enjeu. Une transition amorcée qui doit se conclure dans les mois à venir. “Les jours gourmands en énergie d’Ethereum sont comptés, et j’espère que c’est également vrai pour le reste de l’industrie”, résume son responsable de la recherche et développement, Carl Beekhuizen.
(1) Selon cette étude
(2) https://cbeci.org/cbeci/comparisons
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