Partager la publication "Le projet (pas si) fou qui mettrait Pékin à 2h de New York"
C’est plus rapide que le plus rapide des Airbus, mais ce n’est pas un avion. C’est un transport terrestre, mais ce n’est pas un train. Ça peut traverser les océans, mais ce n’est pas un bateau. Si l’
Hyperloop ambitionne de concurrencer tous les modes de déplacements existants, c’est qu’il ne ressemble à aucun d’entre eux.
“Hyperloop consiste en un tube à basse pression avec des capsules, transportées à grande vitesse sur la longueur du tube”.
Présenté comme « le cinquième moyen de transport révolutionnaire » après la voiture, le train, le bateau et l’avion, ce tube géant, dans lequel des nacelles seraient propulsées sur coussin d’air à des vitesses oscillant entre 1 200 et 6 500 km/h, permettrait théoriquement de rallier Pékin de New York en deux heures. Après un an d’annonces et de conjectures, le milliardaire américain Elon Musk à l’origine du projet, vient de dévoiler un document de 57 pages, « Hyperloop Alpha », qui rend le projet crédible à l’horizon 10 ans.
Un rêve ancien Le procédé n’est pas si révolutionnaire. Dès la fin des années 1960, différents types d’Aérotrains sont expérimentés en France. Ils promettent de propulser leurs passagers à 300 km/h dans des wagons qui ne touchent pas le sol grâce de à l’air expulsé vers les rails. L’idée, finalement abandonnée au profit du TGV, a encore son lot de nostalgiques. La Suisse a aussi longtemps envisagé de relier ses villes principales grâce à un métro souterrain utilisant la sustentation électromagnétique pour planer au-dessus du sol, avant de suspendre le projet en 2009 devant son coût pharaonique. Plus récemment, certaines lignes, comme le Transrapide de Shangaï, ont prouvé la viabilité des navettes « flottantes » sur rail pour les courtes distances.
Hyperloop opère la synthèse de toutes ces tentatives en les conjuguant avec les avancées technologiques les plus récentes. Le tube basse pression dans lequel filent les navettes permet en effet de lever beaucoup d’obstacles. Il diminue fortement les frottements avec l’air extérieur, qui ralentissaient les trains à sustentation magnétiques. Il protège des intempéries extérieures, comme le vent, qui avait tendance à faire dévier le wagon de sa trajectoire. Il permet ainsi, en reposant sur des pylônes haut de cinq mètres, de filer droit vers sa destination en évitant les obstacles et les reliefs du terrain. En prime, les panneaux solaires qui tapissent sa structurent permettent de réduire sa facture énergétique… à zéro.
Elon Musk, Steve Jobs des transports Pour Elon Musk, il ne s’agit pas d’un coup d’essai. Après avoir fondé puis revendu la plateforme de paiement Paypal, le businessman s’est tourné vers le secteur des transports, où il s’est taillé une réputation de visionnaire. En 2002, à 29 ans, il fonde la société
SpaceX, qui développe et produit des véhicules de lancement spatiaux aujourd’hui sollicités par la NASA et la Station Spatiale Internationale. Un an plus tard, il lance
Tesla Motors, une entreprise spécialisée dans la construction de voitures 100% électriques, à une époque où même les hybrides peinent à convaincre les investisseurs. Sorti en 2008, le
Roadster Tesla est aujourd’hui la coqueluche de la Silicon Valley
(lire Tesla accélère sa conquête de l’Amérique). Si l’Hyperloop semble tout droit issu de la science-fiction, les victoires passées de son inventeur contribuent ainsi à le rendre crédible.
Anti-rail Ce tube du futur est aussi un pied de nez à la construction du
TGV San Francisco-Los Angeles, récemment avalisée par l’Etat de Californie. Un chantier emblématique de l’Amérique d’Obama, décidée à rompre avec le tout avion, auquel les républicains étaient fermement opposés. Avec Hyperloop, Elon Musk prétend pouvoir faire mieux et moins cher que le rail, et relier les deux villes en 35 minutes pour moins de 20 dollars par passager. Il assure aussi ne pas vouloir gagner des milliards supplémentaires, mais montrer que le temps de l’énergie propre et des transports novateurs est arrivé.
En gage de bonne foi, Musk avance selon les principes de l’open-source. Rédigé à la première personne et avec un certain humour, le rapport invite dès ses premières lignes à participer : «
Il y a sans aucun doute diverses erreurs et des éléments à optimiser (…) Vos retours sont attendus pour faire avancer le design de l’Hyperloop et passer du concept à la réalité. » D’ici quatre ans, Musk aimerait construire un prototype pour prouver sa viabilité. Il appartiendra ensuite à qui le veut de s’en saisir pour bâtir une première ligne.