Partager la publication "Vous avez aimé la 5G ? Vous allez adorer la 6G !"
2037, quelque part en Finlande. Dans un train à très grande vitesse, une femme consulte son assistant personnel, un hologramme déclenché par un simple tapement dans la paume de sa main. Pendant ce temps, son compagnon, qu’on imagine ingénieur, travaille directement sur sa table en bois, transformée en une sorte d’écran.
Arrivée à Helsinki, notre héroïne, après avoir validé à distance une livraison grâce à la biométrie, rejoint son compagnon. Il vient de boucler avec le sourire sa réunion à distance par holographie. Dix-sept ans après le grand confinement, les poussifs logiciels de visioconférence Zoom, Jitsi ou Meet semblent n’être que de lointains cauchemars.
Cet article a initialement est publié dans WE DEMAIN n°33, paru en Février 2021, actuellement disponible en kiosque et sur notre boutique en ligne.
Cette vidéo futuriste mise en ligne par l’université d’Oulu (nord de la Finlande), qui mêle réalité augmentée, représentations holographiques et véhicules autonomes, est censée nous présenter ce que permettra la 6G. De la science-fiction ? Peut-être pas tant que cela. Car des chercheurs définissent déjà les contours de la prochaine génération de communications mobiles. Alors que les premiers réseaux 5G viennent tout juste d’être activés en France – sans grand enthousiasme –, on prépare en effet déjà la suite à Oulou, bastion de Nokia devenu une technopole ultradynamique.
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En janvier, la firme finlandaise a d’ailleurs pris la tête de Hexa-X, un consortium européen réunissant entreprises et laboratoires de recherche qui doit plancher sur les futurs standards de la technologie.
“Il y a deux ans, les industriels ne voulaient pas trop en parler, mais maintenant c’est le sujet qui les mobilise”, précise Mehdi Bennis, l’un des 300 chercheurs d’Oulu qui travaillent déjà sur la 6G.
S’ils récusent parfois le terme de 6G, trop marketing, les scientifiques ont déjà quelques idées sur ce sujet. Ils imaginent pousser encore plus loin la virtualisation des réseaux de communications mobiles, notamment grâce à l’intelligence artificielle – pour simplifier, il s’agit de remplacer pare-feux, routeurs ou passerelles par des logiciels plus faciles à faire évoluer qu’un matériel dédié, comme le smartphone a remplacé le téléphone, la console de jeux et le podomètre.
D’autres soulignent qu’un effort pourra être fait sur la question de la consommation énergétique – par exemple en inventant des surfaces peu énergivores capables de relayer le signal dans les immeubles. Mais surtout, les scientifiques cherchent à mettre au point un réseau encore plus rapide.
Dans ses nombreux rapports publiés depuis septembre 2019, l’université d’Oulu table sur un débit d’un téraoctet (1 000 Go) par seconde, contre 10 à 20 Go par seconde pour la 5G (vitesse théorique), une latence réduite de 1000 à 100 microsecondes, et une vitesse de connexion de 1000 km/h contre 500 km/h pour la 5G.
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Une course à la puissance destinée à répondre à l’essor anticipé des véhicules autonomes et des objets connectés. “Sur la latence, la 5G offre déjà de très belles performances, mais pour un fonctionnement en milieu industriel, avec des robots, il faudrait encore la diviser par dix, remarque Laurent Bouillot, le dirigeant de Siradel, une société d’ingénierie en télécommunications. Et si demain nous avons des trains en hyperloop [circulant à plusieurs centaines de km/h], la vitesse de déplacement sera telle que nous perdrons la connexion, avec le système actuel.”
Pour augmenter le débit, les ingénieurs espèrent que les progrès de la miniaturisation rendront possible l’utilisation de la bande de fréquence térahertz, des ondes électromagnétiques déjà au cœur des recherches. “Si on arrive à les utiliser, ce sera l’acte de la naissance de la 6G”, estime Philippe Owezarski, directeur de recherche au CNRS. Cette montée dans les bandes de fréquence, déjà en cours avec la 5G, est un enjeu clé. “Cela permet de construire des antennes massives qui peuvent être plus directionnelles, et donc avec un moindre rayonnement, tout en augmentant les débits”, souligne l’informaticienne Inbar Fijalkow, professeure à l’université de Cergy-Pontoise.
Mais le visage final de cette téléphonie du futur est loin d’être défini. “Le débat autour de la 6G porte sur ses futurs principes fondamentaux : les ingénieurs partagent leurs visions, car il faut que l’activité de recherche démarre très longtemps à l’avance”, explique Jean-Luc Beylat, le président des centres de recherches Nokia Bell Labs France.
“Si chaque génération de téléphonie mobile dure à peu près vingt ans, il faut environ une décennie pour la mettre au point : nous tablons sur un déploiement en 2030”, abonde Mehdi Bennis, un diplômé de l’École polytechnique de Lausanne recruté il y a quinze ans par l’université d’Oulu.
Le 3GPP, la structure qui regroupe sept organisations normatives dans les communications mobiles, se concentre pour le moment sur les normes autour de la 5G. Les industriels ne devraient donc pas débattre avant cinq ans de la sixième norme. Qui sera, en toute logique, dans la suite de la cinquième.
“La 5G est supposée s’adresser aux écosystèmes industriels, mais c’est la 6G qui le fera vraiment”, résume un fonctionnaire européen.
Une constante entre les différentes générations : la promesse des téléphones de première génération, c’était de passer des appels, mais il a fallu attendre la 2G, appelée également le GSM, pour que le téléphone mobile prenne son essor, dans les années 1990.
En attendant la révolution promise par l’université d’Oulu, il reste pas mal de pistes de réflexion pour les ingénieurs. “On voit bien à quel point le télétravail est pénible, et qu’il y a une demande pour avoir de meilleures conditions de représentation à distance et de réalité augmentée, rappelle Inbar Fijalkow. Ce besoin en train de se créer ne va pas s’arrêter parce que l’on aura trouvé un vaccin contre le Covid-19.” Mais où vont donc s’arrêter nos “besoins” ?
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