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À la découverte des Pôles avant qu’ils ne disparaissent : Du Groenland au Kamtchatka

RÉCIT. Par Jean-Paul Curtay, nutrithérapeute et auteur.

Le 30/09/2016 par WeDemain
RÉCIT. Par Jean-Paul Curtay, nutrithérapeute et auteur.
RÉCIT. Par Jean-Paul Curtay, nutrithérapeute et auteur.

De l’Islande à la péninsule antarctique, Jean-Paul Curtay est parti en “croisière-expédition” autour des nouvelles routes maritimes rendues possibles suite à la fonte des glaces. Chaque semaine, il raconte son expédition à We Demain.

Une envie impérieuse de tout voir, – a-t-elle pris naissance au sein des longues journées de solitude passées devant la fenêtre de ma chambre d’enfant, dans les livres, dans les rêveries sur ce qu’il pouvait y avoir au-delà de mon univers très cadré ? – m’a entraîné dans une centaine de voyages.

Depuis quelques années, suite à la fonte accélérée des glaces et à l’appréhension qu’elles ne disparaissent avant d’avoir pu aller à leur rencontre, les déplacements se sont retrouvés magnétisés vers les pôles.

Premier voyage, le Cap Nord, le Spitzberg et le Nord de l’Islande ; deuxième, le Sud et le Sud Ouest du Groenland ; troisième la Laponie ; quatrième à partir d’Ushuaïa et de la Patagonie, les Malouines, la Géorgie du Sud, l’île de la Déception et la péninsule Antarctique ; et aujourd’hui, c’est le départ pour le quatrième vers le Nord du Groenland, pour effectuer le passage du Nord Ouest entre l’Atlantique et le Pacifique d’habitude impossible à cause des glaces, au cœur de la dentelle des îles de l’Archipel Arctique, royaume de l’ours polaire, du Grand nord canadien et du Nunavut jusqu’à l’Alaska.

Traversée jusqu’au Kamtchatka

Ensuite traversée jusqu’au Kamtchatka pour finir par quelques incursions chez son cousin brun qui a élu domicile autour des volcans et des geysers. Avant d’atterrir au Groenland, à Kangerlussuaq, à 65° de latitude nord, juste au dessous du cercle arctique qui commence à 66°, la mer de nuages se transforme. On la dirait veinée.

Plus l’avion descend, plus je me pose de questions. Ce sont les nuages ou c’est la calotte glaciaire ? Puis, plus de doutes : ces veines, ce sont des rivières sur l’inlandsis, ponctuées de milliers de petits lacs. On dirait la glace poreuse, en décomposition. Une araignée liquide gris-bleutée a tissé sa toile sur le Grand Blanc.

La dernière fois que je suis venu, il y a trois ans, ce n’était pas du tout comme cela. À l’arrivée 11 degrés. L’anorak est superflu sur la chaloupe qui me transfère jusqu’à L’Austral. Le navire va lever l’ancre vers Sisimiut, la deuxième ville la plus peuplée du Groenland : 5498 habitants.

Un paysage urbain, au charme surréaliste

Kalaallit Nunaat – c’est le nouveau nom officiel du Groenland – dont la surface fait quatre fois celle de la France ne recense que 57 000 habitants ! À Sisimiut, comme dans l’Arctique scandinave, les maisons rouge sang, bleu éclatant, vertes, jaunes sont en bois. Du port jusque loin à l’intérieur des terres, autant de bateaux, tout aussi colorés, sur cales, que de maisons et des luges immenses perchées, en attente de l’hiver.

Un paysage urbain, au charme surréaliste. Sur la droite deux immenses os de baleine forment un portique vers la vieille église, le musée, une maison aux murs de plusieurs mètres d’épaisseur de pierres plates et de tourbe à côté de laquelle on peut passer sous un vrai kayak en peau de phoque.

La rue principale qui monte beaucoup m’apparaît tout à coup incroyablement active quand je la compare à celle de Nuuk, la capitale visitée en 2013 : ballet incessant de belles voitures,- et même un grand nombre de taxis – alors qu’il n’y a aucune route en dehors de la ville -, des ados qui dévalent à vélo, des filles en jeans avec leurs grands cheveux qui courent jusqu’au centre d’activité péri-scolaire, des “Butik” de toutes sortes, trois supermarchés, un musée, un centre culturel, un immense complexe omnisport, et un nombre étonnant de mères avec des poussettes…

Le peuple qui habite près des renardières

Sisimiut, qui signifie “le peuple qui habite près des renardières”, une ancienne colonie baleinière, est devenue grâce à la pêche (crevette, flétan, saumon, cabillaud), aux usines de conditionnement (10 000 tonnes de crevettes par an), aux services portuaires, aux tanneries de peaux de rennes et de phoque, à l’artisanat, la localité la plus dynamique du Groenland.

Dans les ateliers où les artistes sculptent des andouillers de rennes, des fanons de baleines, des ivoires de morse ou de narval, les pièces les plus impressionnantes sont les tupilaks, des figurines difformes et grimaçantes représentations d’anciens fétiches chamaniques qui étaient des assemblages de cadavres d’oiseaux, d’animaux et parfois d’humains fabriqués pour jeter des sorts… Sisimiut, la dernière ville avant des semaines peuplées de fjords, d’icebergs, de glaciers, de phoques et d’ours…

Jean-Paul Curtay.

Pour en savoir plus :
Guides Grand Nord, Groenland – Kalaallit Nunaat, Grand Nord Grand Large
Nathalie Michel et Stéphane Niveau, Cap au Nord, Gallimard

Jean-Paul Curtay, a commencé par être écrivain et peintre, au sein du Mouvement Lettriste, un mouvement d’avant-garde qui a pris la suite de Dada et du surréalisme, avant de faire des études de médecine, de passer sept années aux États-Unis pour y faire connaître le Lettrisme par des conférences et des expositions, tout en réalisant une synthèse d’information sur une nouvelle discipline médicale, la nutrithérapie, qu’il a introduite en France, puis dans une dizaine de pays à partir des années 1980.

Il est l’auteur de nombreux livres, dont Okinawa, un programme global pour mieux vivre, le rédacteur de www.lanutritherapie.fr, et continue à peindre et à voyager afin de faire l’expérience du monde sous ses aspects les plus divers.

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