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“À la Riverside School, les enfants sont le changement qu’ils veulent voir dans le monde”

RÉCIT. Par Héléna Hugot, fondatrice de l’association Les Petits Plus, partie à la visite des écoles et crèches alternatives en Asie du Sud et Sud-Est.

Le 17/08/2016 par WeDemain
RÉCIT. Par Héléna Hugot, fondatrice de l’association Les Petits Plus, partie à la visite des écoles et crèches alternatives en Asie du Sud et Sud-Est.
RÉCIT. Par Héléna Hugot, fondatrice de l’association Les Petits Plus, partie à la visite des écoles et crèches alternatives en Asie du Sud et Sud-Est.

Dans le cadre de la création de l’école des parents et des enfants à Lyon, Héléna Hugot, fondatrice de l’association Les Petits Plus, est partie à la rencontre des acteurs du changement en Asie. Pour We Demain, elle relate sa visite de la Riverside School, à Ahmedabad en Inde.
 
“Soyez le changement que vous souhaitez voir dans le monde”. La célèbre sentence de Gandhi est affichée à l’entrée de l’école. Son ombre est partout, tutélaire dans chaque recoin de l’école Riverside School à Ahmedabad, là où Mahatma Gandhi créa son premier ashram.
 
La Riverside School a été lancée en 2001 par Kiran Bir Sethi, qui ne souhaitait pas scolariser son premier enfant dans une école “sans connexion au monde”. Kiran, alors designer, décide avec cinq professeurs de créer sa propre école, dans sa maison, derrière une base militaire, au sein d’une magnifique forêt tropicale.

L’aventure commence mal : Malgré des annonces dans les journaux locaux, aucun enfant n’est inscrit à la rentrée. Kiran prend son téléphone et convainc cinq amis d’y scolariser leurs enfants. Les professeurs finiront cette première année avec 25 enfants inscrits.

Comprendre autrui pour pouvoir l’aider

L’école est payante. Néanmoins, chaque classe accueille cinq élèves pour qui la scolarité est entièrement gratuite, issus de milieux plus modestes. Un empowerment (capacitation) est également pensé pour les parents : ceux qui ne peuvent pas payer l’école sont invités à prendre part aux tâches techniques et organisationnelles. 
Tout le projet pédagogique est construit autour de l’interaction avec autrui. À commencer par l’écoute : chaque lundi matin, les enfants apprennent à s’écouter autour d’un “Quoi de neuf ?” à la Freinet. Chaque semaine, les plus grands accompagnent aussi les plus petits au sein d’une unité pédagogique baptisée “Buddy interactions” – des séances au cours desquelles ils lisent des histoires aux plus petits ou leur apprennent à se servir d’un ordinateur.
 
Tous les enfants sont bilingues en anglais et ressemblent singulièrement à des écoliers européens, vêtus de leurs joggings et baskets, loin des saris ou des uniformes trop grands et usés des écoles publiques. Autour d’eux, une organisation majoritairement constituée de jeunes femmes s’occupe des classes. Elle se départage entre “school leaders” et professeurs-assistants. Ces derniers s’effacent aussitôt dès qu’un “school leader” pénètre dans la classe, ce qui n’est pas sans rappeler une certaine distinction sociale en Inde.


Les enfants sont libres d’aller et venir et entrent en contact avec les adultes avec un naturel et une aisance sidérante. Ils ont l’air tout simplement heureux, bien dans leur peau et sûrs d’eux.

“I can” power

Au sein des classes, par unité de quatre et encadrés par trois ou quatre professeurs, ils apprennent autant à classer, qu’à aimer lire, jouer, créer dans les espaces “maker spaces” ou les salles de créativité artistique. Ici, les parents n’ont pas leur mot à dire : ce sont les enfants qui choisissent leurs activités, en fonction de leurs souhaits.

Ils sont par ailleurs libres de changer d’activité ou de partir se reposer à l’écart du groupe. Lorsqu’ils sont plus âgés, ils doivent entrer en “persévérance” dans le cadre d’un projet de cinq ans à plusieurs, pour lequel ils auront pour mission de résoudre un problème qu’ils auront eux-même identifié.

“Dans la vie, lorsqu’on rencontre un problème, on ne peut pas faire comme s’il n’existait pas ou simplement faire avec. Il faut prendre les choses en main et décider de le résoudre petit à petit. Par exemple, lorsque nous avons emmené des enfants visiter une unité de soins palliatifs pédiatrique, ils se sont rendus compte que les patients n’y souriaient plus”, explique Neena Mehta, responsable du Riverside Learning Centre, le centre d’apprentissage et de formation pour les éducateurs du monde. 
 

Les murs étaient tristes et les enfants n’y vivaient que des soins et des larmes de leurs parents. Les enfants de Riverside ont donc décidé d’aller repeindre leurs murs. Ces fresques enfantines et leurs jeux ont redonné une nouvelle vie à ces espaces. Depuis, la pratique s’est généralisée dans certaines unités pédiatriques d’Inde”.

Les enfants peuvent changer les choses

“Nous confrontons les enfants à la réalité. Pour leur faire comprendre la nécessité de ne pas gaspiller, ils vivent une journée sans manger. Pour leur faire comprendre les droits de l’homme, nous organisons une journée de travail au cours de laquelle les enfants travaillent sans pause, en roulant des petits bâtons d’encens par exemple.”, poursuit Neena Mehta, arguant que ces pratiques font réagir les enfants dès le lendemain “à leur échelle”.

Ce, en allant discuter avec le commerçant voisin de la nécessité d’abolir le travail des enfants, ou en allant parfois jusqu’à mobiliser les pouvoirs publics. “Nous leur faisons prendre conscience dès qu’ils sont petits qu’ils “peuvent changer les choses”. C’est le pouvoir du “I can””, affirme Neena. Les enfants de Riverside font de leurs statuts de privilégiés un atout et un devoir :
 

“Il n’y a rien ici que je n’aime pas faire”, m’explique une petite fille d’une douzaine d’années dans un anglais parfait. “Ici, je peux peindre des tableaux qui seront vendus et dont les profits seront reversés à une ONG locale, ou tout simplement regarder les papillons voler”.

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