Partager la publication "“Deviens ce que tu es : comment je me réinvente chaque jour aux Grands Voisins”"
Toute personne qui s’oppose à cette maxime est jugée intolérante et liberticide. La doxa ne considère plus qu’une bonne convergence des devenirs de chacun est une condition nécessaire à un demain possible et souhaitable.
Il est aujourd’hui d’usage de penser qu’une nouvelle société adviendra grâce à de nouvelles législations ou à de nouveaux progrès techniques. Et ainsi, l’homme contemporain attend des solutions et écoute des hommes qui disent en avoir.
La liberté de l’homme réduite à sa liberté de consommer
S’améliorer dans son être n’est plus à l’ordre du jour, et certains pensent qu’une modification d’un brin d’ADN réglera un jour le sujet. Vaste programme. Vaste croyance. L’histoire a pris une tournure passive, elle est subie.
Pendant ce temps, l’être en manque de devenir étouffe. La vie qui doit s’écouler reste confinée, les tensions apparaissent et ainsi notre temps est celui des ressentiments et des névroses.Comment alors cette immobilité de l’être est-elle rendue possible ? Peut-être parce que la liberté de l’homme s’est réduite à la liberté de consommer.Or c’est la liberté qui permet ce “oui“, qui enclenche ce mouvement.
Liberté par rapport à l’éducation, liberté par rapport aux acquis familiaux et liberté, de façon plus globale, sur ce cadre qui nous est donné, aux choses qui sont permises et aux choses qui ne se font pas.
Quelles sont les forces en présence ? D’un côté la loi des hommes, une bienséance qui se mélange aux modes et aux morales, et de l’autre, le désir de chacun, qui créé le mouvement.
Grands Voisins, ancien hôpital et îlot d’expérimentation
Jusqu’en 2018, un millier de personnes y œuvrent quotidiennement et un autre millier y vit dans l’urgence des centres d’hébergement. Par le nombre d’habitants, le site est plus grand que 90% des communes françaises.
La gouvernance, à charge de trois associations, s’aligne avec le paradigme actuel de la démocratie participative : parler et débattre, donner la parole et chercher le consensus. Ainsi, lors des conseils des Grands Voisins, chaque mois, dans le grand amphithéâtre des médecins du bâtiment Lelong, les voisins débattent et proposent des cadres à l’action collective.
Oui à demain, mais construisons d’abord et ensemble une mécanique du système. Parlons et débattons du comment, jusqu’à oublier le quoi, jusqu’à oublier le vivant et sa dynamique qui irrigue chaque action, jusqu’à oublier le désir de chacun.
S’exprimer à travers la photographie, la peinture ou encore la cuisine
C’est ce voisin artiste qui a peint un obscur couloir un week-end de pleine lune, et aujourd’hui le “couloir aux pigeons” est une direction qu’on indique. C’est ce résident, Maël qui avait soif d’art et qui aujourd’hui porte la galerie. Mais c’est aussi Vincent, François, Paul… et les autres, partout, ici à Paris comme dans tous les endroits du monde.
La réponse à demain réside dans cette liberté de chacun à surfer sur le système pour créer et innover, pour attraper des moments et les faire réapparaître plus tard, plus grands. Quand les forces qui existent en chacun se libèrent, des initiatives personnelles, impromptues et naturelles, expérimentent des projets, ils éclairent demain et emportent.
La recherche d’une réponse collective me semble de plus en plus vaine, libérons les réponses individuelles, elles sont par nature généreuses, car l’homme est bon (au fond). Gardons nous de tout vouloir contrôler et acceptons les voix discordantes, c’est de là que le mouvement s’enclenche.
Les individus doivent se mettre en mouvement
Je crois dans la “révolution moléculaire” de Deleuze.
Mon roman Alaska en raconte une, j’en ai vu certaines aux Grands Voisins, notre planète pourrait en compter sept milliards. J’appelle chaque individu à se mettre en mouvement, sans attendre le système, le devenir s’impatiente.
Par Frédéric Ghiglione
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