Partager la publication "“Les perspectives de changement climatique sont l’occasion de repenser nos jardins”"
“Vous auriez du voir la Normandie à l’été 2018 : l’herbe n’y était plus verte mais bien jaune, comme en Sicile.” Cette année encore, la sécheresse a touché la France, parfois même dans des régions tempérées.
Un phénomène qui se répète d’année en année, observe Olivier Filippi, botaniste, à la tête d’une pépinière installée à Loupian (Hérault).
Spécialiste des plantes adaptées aux conditions difficiles, il répond aux questions de We Demain concernant l’avenir des jardins ornementaux, à l’heure où 85 départements français sont encore concernés par des restrictions d’eau.
Réchauffement climatique oblige, il nous faudra rapidement trouver des alternatives au gazon et aux fleurs demandant trop d’arrosage, selon lui, de manière à n’utiliser cette précieuse ressource qu’en zone potagère. “Revoir notre conception du ‘beau jardin'”, en somme. Entretien.
Olivier Filippi : Il existe une multitude de plantes résistantes aux fortes chaleurs capables de se passer d’irrigation sur le long terme. On en compte pas moins de 25 000 autour de la méditerranée – soit 1/10 de la flore mondiale – et 75 000 si on inclut toutes les régions du globe où elles sont présentes.
Loin d’être un facteur limitant, la sécheresse permet donc d’élargir la gamme végétale et les techniques du jardinier. Le raisonnement inverse est une erreur culturelle : c’est comme si on avait le choix entre une voiture polluante et une voiture non polluante, et que l’on choisissait la seconde.
Pour aller plus loin, consulter le catalogue des plantes pour jardin sec de la Pépinière Filippi
En jardin d’ornementation, inutile d’arroser les plantes quotidiennement. Mais ce n’est pas parce qu’une espèce résiste à la sécheresse dans la nature qu’elle y résistera dans le jardin : cultivée dans un premier temps en pot, son développement racinaire n’est pas le même que dans la terre au même stade de croissance et de végétation.
Lors de la première période de sécheresse qui suit la plantation, il va donc falloir lui apporter de l’eau, peu fréquemment mais en profondeur : c’est ce qu’on appelle la “période de reprise”. Avec 3 arrosages le soir une fois toutes les 3 semaines – ce qui revient à 5 ou 6 soirs d’arrosage pour une plante pour toute sa vie ! – plutôt qu’un petit verre chaque soir, l’eau descendra par gravité dans le sol pour y former une tâche humide qui tirera les racines vers le bas.
Il est parfois nécessaire de préparer un sol pour aider l’eau à s’y infiltrer correctement, comme souvent pour les sols argileux, par exemple. Surélever un massif pour obtenir des points hauts et bas, créer des tranchées facilitant l’évacuation… Diverses techniques de drainage existent pour faciliter l’écoulement de l’eau et ainsi limiter son évaporation.
Une autre solution consiste à apporter un paillage au pied des végétaux : toujours composé d’une texture différente de celle du sol, il vient créer une “rupture de continuité capillaire”. Gravier, écorce de pin… Sa composition dépendra des espèces végétales plantées et de la densité du jardin. Autre avantage : le paillis limite aussi la prolifération des adventices – les herbes non désirées – qui, dans les deux première années suivant la plantation, peuvent être en compétition hydrique avec les autres plantes.
Pas tout à fait. Il est primordial de connaître les particularités de la zone climatique où l’on se situe et d’observer son évolution face au changement climatique avant de choisir les espèces à planter. Pour cela, on doit avant toute chose étudier la nature du sol de notre jardin : est-il argileux, limoneux, sableux..?
La seconde question à se poser concerne le type d’hiver local, puisque toutes les plantes résistantes à la sécheresse ne le sont pas forcément vis-à-vis du froid. Prenons l’exemple de la lavande : l’espèce Lavandula dentata, originaire du sud de l’Espagne ou du Maroc, résiste à la sécheresse mais se montre très frileuse l’hiver. À l’inverse, la Lavandula x intermedia, originaire du bassin méditerranéen, est quant à elle très résistante au froid.
Les perspectives de changement climatique sont l’occasion de repenser nos jardins. La pelouse est un problème psychologique du jardinier. Bien souvent, elle a une vocation de remplissage : c’est une manière de se débarrasser de son terrain, en quelque sorte. Sur des surfaces de plus de 50m2, c’est surtout un non sens écologique ! On ne laisse pas le temps de fleurir ses graminées : on gâche de l’eau pour que la pelouse pousse alors qu’on la coupe avant qu’elle n’y parvienne. J’ai écrit un livre entier sur cette thématique : Alternatives au gazon.
Pour aller plus loin, consulter le livre : Filippi O., Alternatives au gazon, Actes Sud
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