Partager la publication "Durabilité et rentabilité : comment concilier les deux en entreprise ?"
À l’occasion des rencontres NéoBusiness 2023 qui se sont tenus les 8 et 9 novembre à Bordeaux sous l’égide de la région Nouvelle-Aquitaine, Jean-Dominique Siegel, cofondateur de WE DEMAIN, a animé une table ronde sur le thème de la durabilité et rentabilité en entreprise. Autour de Navi Radjou, conseiller et essayiste, spécialiste de l’innovation Jugaad, étaient présentes Nathalie Meurer, directrice du développement durable chez les cognacs Hennessy, Noémie Chocat, VP Strategy chez Saint-Gobain et Laurence Jacquot, directrice des achats de Lectra (logiciels et systèmes de découpe automatique de cuir ou textile).
À l’occasion de ces échanges, la discussion s’est portée sur la façon dont ces trois organisations intègrent les pratiques de responsabilité sociale des entreprises (RSE) et de développement durable dans leurs stratégies d’entreprise. “Il y a de vrais défis mais aussi des opportunités à adopter des pratiques commerciales plus durables, a expliqué Noémie Chocat. Pour Saint-Gobain, nous nous concentrons sur la construction durable. Une vraie nécessité quand on sait que 40 % des émissions de CO2 dans le monde viennent du bâtiment. Donc notre stratégie business et notre stratégie RSE sont devenues une seule et même stratégie.”
“C’est une vraie fierté pour Lectra : nous produisons 100 % de nos équipements en France. 60 % de nos approvisionnements, de nos composants, qui sont sourcés localement et 95 % qui viennent d’Europe, souligne Laurence Jacquot. Quand tous nos concurrents ont basculé leur production en Chine, la direction de Lectra a décidé de ne pas les suivre. La réflexion était la suivante : l’ancrage territorial fait en partie la force d’un modèle. Et la loyauté des fournisseurs depuis 50 ans et pour les années à venir, c’est aussi ça notre force.” En se développant et en devenant leader mondial dans son domaine, Lectra a gardé cette ligne de conduite mais a choisi de produire au plus près de ses marchés. Elle a donc une usine aux États-Unis et une autre en Asie.
Et Noémie Chocat d’abonder : “Il est crucial de travailler avec des écosystèmes locaux et de maintenir une forte connexion avec le territoire, en adaptant les approches de durabilité en fonction des spécificités régionales. Saint-Gobain est présent dans 75 pays dans le monde, mais nous avons vraiment un modèle d’affaire très local. Nous avons à peu près 1 000 usines dans le monde. Chacune se source avec des matières premières locales et produits localement pour le marché local.” La réduction des émissions de CO2 se fait aussi usine par usine, en tenant compte des spécificités locales. En Norvège, l’énergie est hydroélectrique. En Inde, elle est fournie par la biomasse.
Au niveau de l’emploi aussi, la durabilité joue une carte employeur. Désormais, et quel que soit l’âge, les candidats interrogent l’entreprise sur sa transition écologique de manière de plus en plus récurrente. C’est devenu un véritable critère pour attirer, ou rebuter, de possibles employés. “La raison d’être dans le travail, tout comme l’équilibre vie pro / vie perso, est devenue primordiale dans la phase de recrutement, souligne Laurence Jacquot. Nos engagements en termes de durabilité sont également importants pour donner du sens au travail de l’ensemble des salariés. Mais encore faut-il faire savoir ce que l’on fait dans ce domaine. Cela a été une de nos priorités ces derniers mois. Mettre en avant nos actions en matière de décarbonation.”
Et Navi Radjou d’acquiescer : “C’est en effet très important de faire connaître ses actions. C’est un défaut assez français de ne pas suffisamment mettre en valeur ce qu’on fait de bien. On appelle ça le green hushing. À l’inverse du green washing, on ne va pas se vanter de ses actions, y compris celles inutiles, mais on va au contraire passer sous silence ses initiatives durables. C’est dommage…” Ce manque de transparence rend plus difficile pour les consommateurs d’évaluer si une entreprise est réellement durable. Et cela peut aussi jouer sur son attractivité .
L’ancrage local est primordial. Prendre soin de son environnement direct aussi. “Pour la fabrication du cognac, le sol est la matrice de notre produit, pointe Nathalie Meurer, directrice du développement durable chez les cognacs Hennessy. Nous avons donc développé tout un programme autour des sols vivants justement pour créer et réintroduire la biodiversité. Car ce qui fait la richesse d’un vin ou d’un spiritueux, c’est le sous-sol.” Restaurer et préserver les écosystèmes terrestres est devenu une priorité pour le groupe Moët-Hennessy dans son ensemble.
Parallèlement, Hennessy s’est fixé l’objectif ambitieux de réduire de moitié ses émissions carbone d’ici 2030 en valeur absolue. “Pour tenir notre trajectoire, nous n’avons pas une réponse simple mais nous explorons différentes pistes et changements de pratique. Cela concerne tous les domaines de notre activité : la vigne bien-sûr, mais aussi l’embouteillage, les transports, les emballages, etc. Le but est que le cumul de toutes ces actions nous permette d’atteindre notre objectif. Et ce, sans rogner sur la rentabilité.“ Un véritable travail d’équilibriste qui est aussi l’occasion de remettre à plat des process et d’innover dans des domaines longtemps laissés de côté.
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