Adopte-une-poule.com ou comment “l’ubérisation” gagne les poulaillers

“Les poules sont des animaux sensibles. Elles s’adressent à vous et vous parlent. Elles veulent interagir avec vous. En fait, elles sont comme un chien ou un chat, sauf que … ce sont des poules”, déclarait Phil Thompkins au New York Times en octobre 2013. Quelques semaines plus tôt, cet éleveur de Pennsylvanie et sa femme, Jenn Thompkins, domiciliés à Freeport, non loin de Pittsburgh, avaient lancé Rent the chicken , le premier site Internet de location de poules aux particuliers.

Ouvert à dix États américains et deux régions canadiennes, ce service vise principalement les “suburbs”, ces zones résidentielles où vivent les classes moyennes supérieures américaines. Pour une durée maximale de six mois et un tarif compris entre 400 et 600 euros – tout dépend du nombre de poules -, les utilisateurs de Rent the chicken s’offrent le plaisir de voir gambader ces gallinacés dans leur jardin.

Mais surtout celui de récolter chaque jour des oeufs frais. Deux poules pondeuses en donnent en moyenne 10 à 14 par semaine, selon les deux éleveurs, dont le service inclut la livraison d’un petit poulailler, ainsi que toute la panoplie du parfait aviculteur : des aliments pour volailles, un paquet de grains organiques, le livre Fresh Eggs Daily de Lisa Steele et un manuel pour s’occuper de ses oiseaux et contribuer à leur épanouissement personnel.

De la location à l’adoption

Les périodes de location s’étendent entre mai et novembre, lorsque les poules produisent le plus d’œufs. Mais si, comme l’indique le site, “vous réalisez que vous êtes nés pour élever des poules”, vous pouvez les “adopter”. En somme, les racheter à la société pour un montant compris entre 250 et 350 dollars la paire de poules. Si en revanche, vous ne nouez aucun lien avec vos cocottes avant la fin du bail, vous pouvez les rendre.

À noter que, si jamais une poule succombe pendant la période de location, la société la remplace, à condition qu’elle ne doive pas son trépas à de la maltraitance ni à de la négligence. Cela, même si aucun contrôle spécifique n’est opéré par la start-up pour veiller au bien-être de ces bêtes à plumes.

Depuis la création du site, seuls deux cents clients  ont utilisé ce service outre-Atlantique. Mais récemment, il a fait l’objet d’un regain d’intérêt. En cause : la flambée des prix des œufs. Ces derniers ont augmenté de 85 %, selon le Ministère du Travail américain, suite à une épidémie de grippe aviaire survenue début 2015, qui a contraint les éleveurs à abattre 40 millions de volailles.

Réductions des déchets

En France aussi, il est possible de louer des poules. Au cours de l’hiver 2013, Clément Bonafé, un jeune ingénieur installé dans le Sud-Ouest, a lancé Kiloupoule. La plateforme fonctionne sur le même principe que sa cousine américaine : 30 euros par mois les deux poules et leur poulailler, mais sans limite de temps. La livraison est gratuite en Midi-Pyrénées, mais possible partout en France.

Afin de bichonner ses volailles, le site commercialise aussi des compléments alimentaires, des abris de tout type, mais aussi des mangeoires permettant de les laisser vivre en autonomie le temps d’un week-end, ou plus.

L’objectif du jeune entrepreneur : “favoriser l’agriculture urbaine et participer à la réduction des déchets ménagers”. Car au delà des oeufs qu’il génère, l’élevage de poules par les particuliers français semble d’abord perçu comme un moyen écologique d’éliminer les déchets.

Cet animal, selon kiloupoule.fr, peut en effet ingérer 150 kg de déchets végétaux par an. Soit une économie de 150 à 200 euros réalisée sur le traitement de chaque tonne de déchets. Alors, si vous voulez manger plus sain, tout en réduisant votre quantité d’ordures ménagères, souvenez-vous : les poules ont la cote. Cot…

Clara Potier
Journaliste à We Demain
@ClaraPotier

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