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Altruwe : un réseau social peut-il booster l’altruisme?

Qui oserait, aujourd’hui, défendre les réseaux sociaux ? Les reproches sont connus : propagation des fake news, manque criant de modération, mauvaise protection des mineurs, addiction numérique, surexploitation des données personnelles… Dernièrement, Time Magazine consacrait sa couverture aux déboires de Mark Zuckerberg avec cette question provocatrice : « Faut-il définitivement ’supprimer’ le réseau social ? »

C’est pourtant dans ce contexte que deux entrepreneurs français s’apprêtent à lancer, mi-novembre, Altruwe, un réseau social d’un nouveau genre puisque dédié à ceux qui « s’engagent pour l’altruisme ». Et ceci sans aucun but lucratif. Une utopie ? Peut-être, mais qui bénéficie déjà du soutien de Matthieu Ricard, du romancier à succès Laurent Gounelle, du chef étoilé Thierry Marx et de plus d’une vingtaine de fortes personnalités du monde des médias, du secteur associatif ainsi que des intellectuels et des entrepreneurs à succès…

Nous avons rencontré les deux fondateurs pour mieux comprendre leur pari.

WE DEMAIN : Lancer un réseau social altruiste et sans but lucratif, n’est-ce pas complètement utopique ?

Jérémie Mani : Oui, très probablement ! Nous en sommes pleinement conscients. Mais c’est une utopie murie, réfléchie et assumée. Les chances de succès étaient au départ très aléatoires et c’est d’ailleurs cela qui nous motivait. Il y a plein de réseaux sociaux, et c’est extrêmement difficile d’émerger, surtout sans moyens financiers importants…

Yves Delnatte : … mais paradoxalement, c’est cela qui pourrait faire que cela marche ! Chercher à mettre en avant l’altruisme – qui est une valeur magnifique – et le faire sans recherche de profit est probablement ce qui a rendu Altruwe sympathique auprès de toutes les personnalités qui nous poussent et nous soutiennent.  Toutes s’accordent à dire : « Il faut le tenter ! » Et on aura besoin de leur crédibilité et de leur notoriété pour se faire connaitre auprès du grand public.

Quels sont les grands principes d’Altruwe ?

Jérémie Mani : Altruwe est le réseau social de ceux qui s’engagent pour l’altruisme. Concrètement, il s’agira d’une application mobile, communautaire, ayant deux ambitions principales. La première : rassembler un grand nombre de contenus (articles, vidéos, podcasts…) positifs, inspirants, qui donnent envie d’agir à son niveau. La deuxième, essentielle : organiser leur partage en dehors de l’appli, sur les plateformes traditionnelles : Facebook, Twitter, WhatsApp… ! Chaque membre pourra diffuser les contenus les plus à même d’inspirer, d’influencer positivement ses relations. On souhaite que ces partages soient massifs ! 

Yves Delnatte : Ces contenus existent déjà sur le web, par exemple sur WEDEMAIN.fr bien évidemment. Mais ils n’ont pas toujours la visibilité qu’ils méritent et sont parfois coincés entre trois homicides et quatre faits divers. C’est à nous tous de les partager pour en décupler la portée. Donc si on résume : 1) on rassemble sur l’application des contenus inspirants, 2) on les partage massivement en dehors de l’application. Le tout avec une sérieuse couche de modération au milieu et une dose de gamification, pour que cela reste une expérience agréable et communautaire. 

A lire aussi : Indigo, “un réseau social pour réconcilier fin du mois et fin du monde”

Pourquoi avoir choisi l’altruisme ?

Yves Delnatte : avec Jérémie, on s’est demandé : quelle est le plus petit dénominateur commun entre toutes les actions positives ? Y a-t-il une valeur partagée par tous ceux qui aspirent à changer d’époque ? En lisant les œuvres de Matthieu Ricard, Jacques Lecomte ou encore Jacques Attali, on s’est rendu compte que cette valeur était probablement l’altruisme. C’est-à-dire cette capacité à se soucier du bien-être d’autrui. 

Jérémie Mani : Plus encore, on a réalisé que cette valeur non seulement se cultive, mais elle se partage ! Que par mimétisme social, plus on voit ou on entend parler d’actions altruistes, plus on a de chance de le devenir un peu plus soi-même. Donc l’ambition d’Altruwe c’est de créer une dynamique, en fédérant tous ceux qui sont persuadés qu’une société plus altruiste saura mieux faire face aux nombreux défis que sont les nôtres. Et parce qu’il ne peut y avoir d’ambition sans date butoir, on s’est donné 1 000 jours pour avoir un impact. Ce sera un réseau social éphémère.

Comment comptez-vous tenir financièrement ? Il y a des coûts associés pour faire tourner une telle application…

 Jérémie Mani : C’est tout à fait exact. Yves et moi avons fait toute notre carrière dans le digital : lui à la tête d’une grosse agence de conception d’applications mobiles et de sites web. Moi, dans la modération des réseaux sociaux notamment. Et tous les deux avons revendu nos entreprises respectives. Grâce à ces moyens nous avons pu financer le lancement d’Altruwe de façon conséquente. Mais cela ne suffira pas sur le long terme et il faudra convaincre des mécènes de soutenir l’initiative.

Yves Delnatte : Nous avons été rejoints très tôt par deux personnalités extraordinaires, Sarah Herz et Arnaud de Saint Simon qui ont mis leur compétence et leur réseau professionnel au service du projet. Cela permet d’obtenir beaucoup de services pro bono ou à un tarif très inférieur au prix de marché. 

Altruwe sort courant novembre : quels seront les premiers défis à relever ?

Yves Delnatte : Le plus difficile commence. Car concevoir et développer une application mobile, créer un logo et une plateforme de marque, tout le monde peut le faire. Mais personne n’a la recette magique pour faire connaître l’application, faire en sorte qu’elle soit téléchargée, utilisée et plus globalement créer une communauté impliquée et dynamique.

Jérémie Mani : Nous croyons beaucoup au concept de « murmuration ». Quand des milliers d’étourneaux s’envolent dans le ciel dans ce qui ressemble à une chorégraphie bien orchestrée. Il n’y a aucun « leader » mais tous semblent coordonner leurs mouvements de façon spontanée. On a beaucoup d’énergie, d’enthousiasme. Et si on échoue, on recommencera différemment !

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