Créée en 1920, la dernière ferme de Seine Saint-Denis va connaître une nouvelle vie

C’est la dernière ferme en activité aux portes de Paris. À l’instar du petit village d’irréductibles Gaulois résistant encore et toujours à l’envahisseur, cette ferme de 3,7 hectares située à Saint-Denis depuis 1920 est une miraculée de l’expansion urbaine qui a grignoté l’agriculture locale.

René Kersanté a su maintenir un maraîchage traditionnel sur ce domaine agricole dont il hérité de sa grand-mère. À l’annonce de sa retraite l’année dernière, la ville de Saint-Denis, propriétaire du domaine depuis 1983, a décidé de chercher un repreneur. Parmi les différents projets, celui retenu est porté par une alliance hétéroclite entre le Parti Poétique, un collectif local d’artistes, et les fermes de Gally, un réseau de fermes pédagogiques. À partir de fin juin, ils investiront le domaine pour y proposer des cours d’art et de cuisine pour les enfants ainsi que des ateliers sur le lombricompostage, l’agroforesterie ou encore l’apiculture.

Un enfant de Saint-Denis pour un second souffle

Quand la mairie de Saint-Denis lance cet appel à projet en mai 2016 afin de trouver un successeur au septuagénaire René Kersanté, Olivier Darné, créateur du Parti Poétique, n’hésite pas longtemps avant de postuler à la reprise de l’exploitation : “J’ai réfléchi trois nuits et j’ai posé notre candidature”, glisse t-il au Parisien. Enfant de la Saint-Denis, il connaît bien René Kersanté, pour avoir arpenté maintes fois les rangs de salade du domaine à ses côtés. Et désormais, c’est lui qui a les clés de la maison. 

Le Parti Poétique, lui, se présente comme un collectif d‘artistes, qui travaille aujourd’hui sur le tryptique “Nature, Culture, Nourriture” et qui s’est notamment fait connaître en implantant des ruchers sur les toits de l’Hôtel de ville de Saint-Denis. C’est conjointement avec les ferme de Gally, qui apporteront leur expérience professionnelle et leur capacité financière, qu’il espère poursuivre le travail de René Kersanté tout en y apportant de nouvelles dimensions.
 
Olivier Darné explique dans le magazine Alimentation générale que “l’enjeu est de voir comment un collectif d’artistes peut répondre à une proposition de la ville de reprise patrimoniale de cette terre, tout en maintenant son niveau de production nourricière”.

Une transition vers la permaculture

L’équipe du Parti poétique, mettra en place un système de permaculture sur un hectare de l’exploitation, qui compte au total trois hectares de terres arables. Le reste sera géré par la Ferme de Gally qui produira des légumes destinés à la vente maraîchère de proximité.

L’un des défis à relever sera de conserver un niveau de productivité similaire à celui des années 2000. Difficile : un million de salade sortait du domaine chaque année à cette époque. Pour ce faire, le Parti Poétique encourage des maraîchers et des agriculteurs à venir gonfler ses rangs. 

concerts et projections de film au milieu des salades

Les nouveaux gestionnaires de la ferme souhaitent ajouter un volet pédagogique au maraîchage classique. Un domaine que les Fermes de Gally maîtrisent parfaitement, elles qui ont créé la ferme pédagogique de Saint-Cyr-L’Ecole en 1995 et celle de Sartrouville en 2005, toutes deux localisés dans les Yvelines.

Olivier Darné espère que la ferme redonnera du liant et du sens à un tissu local éclaté, comme il l’expliquait au Monde : “À Saint-Denis, la diversité est réelle : 135 nationalités différentes, un savoir-faire culinaire formidable, mais aucune réciprocité culturelle ou économique entre les quartiers populaires et le quartier d’affaires qui s’est développé autour du Stade de France.”

Une touche artistique sera également apportée par Le Parti Poétique, qui considère ce lieu comme “un espace de production et de programmation culturelle, avec des rendez-vous organisés comme des projections de cinéma, des concerts au milieu des salades, des banquets”.

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