Partager la publication "Effondrement écologique : ces citoyens sonnent l’alarme"
> À lire aussi : notre interview de Pablo Servigne, Rafael Stevens et Gauthier Chapelle dans le numéro 22 de We Demain, disponible en kiosques, Relays, librairies et sur notre boutique en ligne.
Et si, à cause du réchauffement climatique, le monde tel que nous le connaissons n’existait plus dès 2030 ? Voire même dès 2020 ? C’est la conviction grandissante d’écologistes français qui se dénomment les « collapsologues ». Avec des essais, des séries YouTube, des podcasts ou des réunions, ils tentent d’alerter leurs concitoyens sur l’imminence d’une catastrophe mondiale à venir.
Selon eux, les crises écologiques que nous contemplons comme l’acidification des océans ou l’augmentation des feux de forêts ne sont que le début d’un « effondrement » global des écosystèmes prévu autour des années 2030. Et qui pourrait mener, de notre vivant, à celui de notre civilisation.
A l’origine de la « collapsologie », on trouve les travaux de Pablo Servigne et Rafael Stevens (lire notre interview dans le numéro d’été de la revue We Demain), qui ont popularisé en France dès 2015 le concept d’effondrement avec le livre Comment tout peut s’effondrer. Un essai qui explique de façon accessible les dernières recherches en climatologie, les modèles mathématiques utilisés et pourquoi nous sommes dans une situation critique… De quoi en faire un succès de librairie et impulser une nouvelle tendance « pessimiste » dans l’écologie française.
Aujourd’hui, celle-ci commence à se structurer autour d’associations telle Adrastia ou de groupes Facebook comme Transition 2030 (11 000 membres). Et depuis un an apparaît une deuxième génération de « collapsologues » qui tentent de toucher un public plus large que celui des « lecteurs d’essais déprimants de 300 pages », affirme Clément Montfort.
En septembre 2017, ce vidéaste de 31 ans publiait la première vidéo de sa web-série « Next » (8,6K abonnés) où il interviewe des personnalités de la collapsologie, comme l’ancien ministre Yves Cochet. « Avant j’étais dans une angoisse personnelle : pourquoi est ce qu’on ne parle pas de la crise écologique dans les médias ? Faire la série m’a rendu ça plus supportable », explique Clément Montfort. « J’essaie de faire mon boulot de journaliste et de raconter ce qui se passe ».
Auteur d’un précédent documentaire sur La guerre des graines, il dit avoir démarché plusieurs chaînes de télé avant de se tourner vers le financement participatif. « Les chaînes ont peur de faire peur…. Mais ce n’est pas grave, car maintenant je fais du circuit-court et je suis libre de mon format ! ».
Ce qui le mène à monter des interviews fleuves en noir et blanc sur la fin éventuelle de notre monde. Une dizaine d’épisodes formant une première saison sont déjà parus.
« J’en avais marre d’essayer de convaincre. Je veux faire une série pour les gens qui s’intéressent et s’informent. Je ne peux pas rappeler à chaque fois ce qu’est la COP21 ou le GIEC », explique-t-il, tout en regrettant un faible nombre d’abonnés comparé à d’autres Youtubeurs.
« Je pense qu’il faut dire les choses de façon adulte. Et tant pis si ça fait peur à certains tant que ça permet à d’autres de réagir ».
Une démarche partagée par Alexia Soyeux, animatrice du podcast Présages. « J’ai découvert le livre de Pablo Servigne en septembre dernier, au moment où je quittais un emploi dans le marketing chez LVMH. Je n’étais plus du tout en accord avec les valeurs du groupe et ça a été pour moi un bouleversement intellectuel »,analyse la jeune femme.
« Ce n’est pas que je n’écoutais pas le discours écologiste auparavant, mais je ne l’entendais pas ».
Après plusieurs mois de lectures (« quand j’ai découvert “le taux de retour énergétique”, j’ai su que notre avenir allait être compliqué… ») elle qui adore les podcasts décide de créer une émission pour « cesser de ruminer mes questions et pouvoir les poser ». Depuis mars 2018, une dizaine de spécialistes, dont Isabelle Delannoy – auteure de l’Economie symbiotique, ou le polytechnicien Jean-Marc Jancovici, ont défilé devant son micro avec en moyenne 3 000 auditeurs. « Le sujet reste marginal et beaucoup de gens qui m’écrivent me racontent l’incompréhension de leurs proches ».
C’est pourquoi d’autres collapsologues privilégient la communication vers le grand public, comme Julien Wosnitza qui a publié le 16 mai un petit livre de 96 pages nommé Pourquoi tout va s’effondrer aux éditions des Liens qui Libèrent.
Deux semaines et 6500 exemplaires plus tard, il intervenait sur la scène du festival We Love Green pour alerter sur le « collapse ». Un parcours étonnant pour ce jeune homme de 24 ans qui, il y a à peine trois ans, étudiait la finance pour devenir banquier. « J’ai pris conscience que le système marchait sur la tête et que je ne voulais plus y participer ». Il décide alors de rejoindre l’ONG Sea Sheperd et découvre au même moment le livre Comment tout peut s’effondrer, qu’il décide de condenser avec l’accord de ses auteurs.
« Mon but était de faire un recueil des données importantes pour alerter ceux qui n’ont pas le temps de lire les gros livres sur le sujet. Et avec de belles illustrations pour alléger le ton », explique-t-il.
« Notre système n’est plus résilient. Certains imaginent un futur à la Mad Max. D’autres un retour à la Terre. Ma seule certitude est qu’on peut atténuer les effets de l’effondrement, notamment par notre consommation en devenant végétarien ».
Il ne reste aux collapsologues qu’un medium à explorer : la rencontre humaine. C’est le pari de Valerie G. et Marc P. Un couple d’écologistes qui sillonne depuis avril et jusqu’en juillet les routes de France à bord de deux vélos couchés qu’ils ont fabriqués avec du bois de récupération. « On ne vient pas comme des conférenciers, mais on organise des débats dans les villages en lien avec des associations comme les Amis de la Terre. Les gens sont très heureux d’aborder le sujet de l’effondrement car il est encore tabou. On collecte beaucoup d’infos aussi, avec des notes, des vidéos… on voudrait en faire quelque chose à notre retour », raconte Valérie.
Eux-mêmes ont choisis de mettre leur style de vie en accord avec leurs principes. Ils ont fondé l’année dernière un éco-lieu baptisé la « Ferme Légère » où ils développent la permaculture et l’autonomie énergétique.
« La perspective d’un effondrement n’a fait que confirmer la pertinence d’un mode de vie que nous avions déjà adopté», conclut Marc. « Je ne sais pas de quoi demain sera fait mais je crois que l’information, la réduction de nos besoins et l’entraide seront nos meilleurs outils de survie ».
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