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En Malaisie, une entreprise sociale promeut une mode éthique et durable

RÉCIT. Par Anne-Sophie Roux, porteuse du projet Wānanga Trek.

Le 09/05/2017 par WeDemain
(Crédit : Charles Lottmann)
(Crédit : Charles Lottmann)

De Nouvelle-Zélande au Bhoutan, du Pacifique à l’Himalaya, le Wānanga Trek est un reportage solidaire mené par Anne Sophie, étudiante en sciences politiques de 21 ans. Chaque mois, elle racontera ses aventures à We Demain.

Notre Trek des Alternatives nous a menés en Malaisie, pays d’Asie du Sud-Est où nous avons découvert — en nous engageant auprès d’Earth Heir (les Héritiers de la Terre) —, les dessous de tout un système, immense et souvent dissimulé : l’industrie  de la mode, troisième industrie la plus importante au monde, qui entrave les droits de l’homme et pollue l’environnement.

En 2013, au Bangladesh, l’écroulement du Rana Plaza, un immeuble entier dédié à la fabrication du coton pour une grande marque de vêtements.

Cet évènement a provoqué une prise de conscience mondiale, concernant le respect des conditions de travail des travailleurs et travailleuses du secteur de la mode, qui a conduit à la construction d’un mouvement citoyen : la Fashion Revolution.

Earth Heir, pionniers de la mode éthique en Malaisie

L’Asie est le continent le plus touché par le travail forcé dans l’industrie de la mode. Selon l’Organisation Mondiale du Travail, le nombre de victimes sur le continent s’élevait à 11,7 millions en 2013. En Afrique, deuxième continent le plus touché par celui-ci, ce nombre était de 3,7 millions la même année.

Earth Heir, entreprise sociale née en 2013 dans la banlieue de Kuala Lumpur, fait figure de pionnier à de nombreux égards. Sa fondatrice, Sasibai Kimis, travaille avec des communautés marginalisées en Asie : réfugiés, artisans des Sociétés Premières Orang Asli ou encore personnes handicapées ; en Malaisie, au Cambodge, en Inde et en Thaïlande.

Mais plus que de participer à l’empowerment des plus marginalisés, Earth Heir désire également préserver l’héritage culturel de ces artisans : leur savoir-faire. Leur devise, “Celebrating Craftmanship” — en français “Célébrer l’Artisanat” — dit tout de leur volonté de promouvoir des techniques traditionnelles menacées par l’industrie globale de la mode dite “rapide”.

Une marque de luxe écologique et éthique

N’utilisant que des matières végétales, l’ensemble de leurs collections est entièrement recyclable.

La consommation énergétique de leur production est réduite au strict minimum, grâce à la valorisation de techniques manuelles, qui rendent chaque produit unique.

Earth Heir contribue ainsi à minimiser l’impact environnemental, tout en créant de la valeur sociale et culturelle.

En se présentant comme une marque de luxe, Earth Heir s’attaque également au plus gros enjeu de l’industrie de la mode : selon le Fashion Transparency Index 2016, ce sont en effet des marques plus luxueuses comme Chanel ou Louis Vuitton qui sont le moins éthiques et transparentes sur leurs modes de production.

Un revenu équitable pour les artisans d’Earth Heir

Pour rendre compte des effets de cette entreprise sociale, menant un combat aussi inspirant, nous avons rencontré des artisans qui travaille avec Earth Heir.

Uncle Ng, est un artisan handicapé vivant à Kuala Lumpur. Atteint de la polio, son handicap l’a complètement coupé du monde du travail il y a une dizaine d’années.

Depuis sa maison — qui est aussi son atelier —, il tisse et fabrique des sacs, cabas, paniers, chaises et tables en fibres de rotin. Pouvoir travailler depuis chez lui, pour un salaire plus élevé que la moyenne du pays et selon des horaires qu’il fixe lui-même, constitue donc une grande chance.

Uncle Ng travaille le rotin avec une rapidité et une dextérité hypnotisantes. Il réalise les sacs et cabas phares de Earth Heir, et reçoit 50 %de leurs ventes, ce qui lui assure ainsi qu’à sa famille des revenus suffisants.

Earth Heir ade les artisans à préserver leurs savoirs traditionnels

Un peu plus à l’Ouest de Kuala Lumpur, en bordure des forêts les plus anciennes au monde, les femmes Orang Asli — “Premiers Peuples” en malais — sont également employées par Earth Heir, avec qui elles perpétuent leurs savoirs ancestraux.

Les Orang Asli ne constituent même pas 1 % de la population nationale. La tribu des Mah Meri (à l’origine orthographié Hma’ Meri) est une communauté côtière, vivant principalement de la pêche et dont le nombre en 2003 atteignait seulement 2 896 personnes.

Le développement rapide de leur région pour la production d’huile de palme — la Malaisie en est le deuxième plus gros exportateur au monde — a eu de nombreux impacts négatifs sur les communautés premières.  Celles-ci ont néanmoins réussi à conserver leur “adat ” (culture, héritages, normes sociales et traditions).

Earth Heir les aide à conserver leurs techniques artisanales ancestrales, faisant partie intégrante d’un héritage riche et divers, tout en permettant leur empowerment. Les femmes tissent et tressent des feuilles et fibres de Pandanus pour en faire des paniers, pochettes et tapis aux motifs traditionnels.

Les consommateurs se mobilisent pour faire pression sur les marques

Nous engager auprès d’Earth Heir nous aura permis de découvrir tout un monde où les lignes, bien qu’auparavant très opaques, sont désormais en train de bouger.

Grâce à des citoyens, des consommateurs, qui se sont mobilisés pour faire pression sur les marques en exigeant de la transparence et du respect pour les travailleurs comme pour l’environnement, une voie durable et éthique se dessine progressivement dans l’industrie de la mode.

En Malaisie comme en Asie, beaucoup de choses sont encore à construire pour le respect des conditions de travail et de l’environnement. Les artisans que nous avons rencontrés, les employé.e.s d’une entreprise sociale, durable et éthique, pionnière en Malaisie, ont renforcé notre foi en la force du citoyen pour faire la différence !
 

Si vous souhaitez en savoir plus sur les projets, les initiatives et les personnes qui font vivre les communautés rencontrées par Anne Sophie Roux, rendez-vous sur le blog de Wanangatrek.com
 

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